« C’est intolérable ! »
Mr. Gourdin venait de rentrer en trombe dans son bureau, dans une colère noire… Ou plutôt rouge, à en juger par la teinte grenat dont des parait élégamment son gros et flageolant visage. Des moustaches rancies pendaient de part et d’autre des ses grosses lèvres violacées, sales, lestées de restes de repas et autres horreurs en putréfaction.
« C’est intolérable » vitupéra-t-il encore.
Son assistant n’osait rien dire, tout timoré qu’il était. Il s’appelait Rufus, et il était bien fluet, avait les épaules fines et une allure gracile. Mr. Gourdin le soupçonnait d’être inverti, tant il était exaspéré par l’architecture aérienne de son craintif assistant. Mais il se gardait bien de le lui dire, il tenait à cet élément. Bien qu’inefficace au possible dans le feu de l’action, Rufus était un administrateur acharné, un faiseur de rapports méticuleux, un vétilleux qui ne laissait rien passer. Le laisser rentrer dans une pièce c’était laisser filtrer les indices à travers son cerveau, où ils s’assemblaient et se désassemblaient jusqu’à former un ensemble cohérent, imparable.
Si vous vous faisiez arrêter par Mr. Gourdin et son assistant, vous étiez coupable. Et même si vous ne l’étiez pas ça revenait au même. A présent Rufus travaillait sur cette histoire de secte. Une affaire inquiétante. Récemment le palais d’Aberon avait connu quelques troubles, mais l’assaut fomenté par de mystérieux colombophiles s’était interrompu, brusquement. On disait que leur Dieu leur était apparu, et qu’ils l’avaient suivi dans les cieux. Les autorités Surdéennes préféraient plutôt vanter le mérite de leurs services secrets. Quoiqu’il en fut le vent de révolte qui avait couru sur tout l’Alagaësia c’était apaisé, brusquement maté par cette terrible nouvelle. Mais ici, c’était différent. Quelqu’un s’acharnait à exciter le soulèvement, dirigeait la secte et rassemblait ses fidèles.
On l’appelait le prophète. Pour Mr. Gourdin c’était ridicule, jamais on avait eu l’outrecuidance de bafouer le culte et les mœurs aussi ouvertement. Un temple avait été saccagé, des prêtres pendus par les pieds. Des personnes avaient subi des sévices plutôt en dessous de la ceinture ineffables dans l’horreur. Et nous ne nous attarderons pas à tenter une description succincte de ces agressions, car même la censure la plus sévère ne saurait atténuer l’ignominie que représentaient ces actes.
« C’est intolérable ! Cette secte doit être écrasée, le mouvement rongé, brûlé, égorgé ! »
« Monsieur oublie sûrement que le culte est insaisissable, on ne sait pas où se trouve leur QG »
« Pourtant on entend souvent parler de leur prophète, et puis les gens savent où le trouver. Pourquoi pas nous ? »
« Les gens ont droit aux informations. Mais pas nous. Je suggère que l’on envoie un agent infiltré dans leur temple »
« Mais qui ? Certainement pas vous, voyez vous ! » le chef de la garde jeta un regard méprisant à son assistant, qui en était devenu rouge comme un homard trop cuit.
« Pourquoi pas ce chirurgien un peu louche, qui s’est récemment engagé comme médecin légiste ? »
« Cette folle ? Non, elle serait capable de demander ta vivisection comme rétribution »
« Ou la votre, Mr. Gourdin » Rufus se faisait plus pernicieux, sa voix prenait une forme plutôt déplaisante. Poisseuse, insidieuse, lourde.
« Ce sera toi qu’elle découpera en rondelles ! Donc tu as eu une bonne idée. Nous l’enverrons »
« Je reconnais là votre génie » le Rufus se faisait flagorneur, obséquieux. Mais Mr. Gourdin était un esprit assez limité, et il ne décela pas toute la fausseté de ces paroles.
« C’est pour ça que je vous aime bien, Rufus. Allez me chercher le docteur. »
[Bon, je fais pas encore arriver mon perso, je te laisse un post à survivre ^^]