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La fuite

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Liv de Sula


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La fuite  Vide

Liv de Sula
L'Oeil
Message Sujet: La fuite | Lun 21 Avr 2014 - 9:57


La fuite


L’odeur était infecte, oppressante. Lise remonta machinalement son col par-dessus don nez, espérant échapper au dégoût qui l’assaillait. C’était un mélange de fragrances violentes. Celles du sang et des chairs brûlées couvraient encore celle de la putréfaction. Le massacre devait être récent. Un an auparavant, la simple idée d’une pareille boucherie aurait suffi pour faire tourner de l’œil la jeune femme. Mais le temps avait fini par gommer ses phobies, à grands coups de malheurs, rendant l’horreur plus acceptable à chaque fois qu’elle y était confrontée. Le mal par le mal comme on dit.

Ayant sondé mentalement les lieux, Lise savait que plus rien ne vivait dans cette cave. Qui que ce soit, il avait fait un impressionnant ménage. Lise ne connaissait qu’une personne assez puissante pour faire un tel nettoyage.

* Il n’aurait pas… *

Elle l’aurait su si des Premier Hommes avaient fait une descente dans le quartier. Ce lieu n’était connu que de peu de personnes ça limitait grandement les suspects. Un des membres du Cercle se serait retourné contre les autres ? Ça n’aurait pas été surprenant, les traîtrises était courantes dans ce milieu où l’avidité et l’ambition gouvernaient. Néanmoins pas un n’était assez puissant pour prendre le pas sous tous les autres et tous étaient trop soupçonneux pour oser s’allier à un autre. Non, ça ne pouvait être que lui. Et pourtant la jeune femme refusait de l’admettre.

Reniant tous les principes de prudence qu’on lui avait inculquée, elle s’enfonça dans l’étroit escalier. Elle s’arrêta devant la porte de bois qui ne tenait plus que sur un gond. Elle avait été proprement défoncée. Lise hésita. Voulait-elle vraiment voir ? N’en savait-elle pas déjà assez ? Elle se retourna pour remonter quand une conscience effleura la sienne. Elle réagit aussitôt, suspectant le meurtrier d’être resté sur les lieux. Elle laissa l’esprit l’inspecter de plus près avant de refermer les tentacules de sa propre conscience sur lui, l’entourant et le serrant pour le paralyser. Elle y arriva avec tant de facilité qu’elle suspendit sur attaque, s’attendant à plus de résistance de la part de la personne qui aurait été capable d’un tel massacre.

* C’est… toi… Murmura l’esprit que Lise reconnut comme celui d’un de ceux qu’elle croyait mort. Peur qu’il revienne… Blessé… Caché… *

Le discours était haché mais limpide, le sorcier après avoir été mis hors combat avait dissimulé sa conscience afin de se faire passer pour mort. C’est ainsi qu’il avait échappé à l’inspection préliminaire de la jeune femme.

Lise dénoua son étreinte mentale sans toutefois rompre le contact. Elle ouvrit la porte d’un coup de pied et se rua à l’intérieur. Le spectacle morbide d’une douzaine de corps mutilés la fit chanceler. Certains cadavres étaient pliés dans des postures que la nature ne permettait pas. D’autres étaient assez largement entaillés pour que leurs organes glissent par-dessus la peau. Tous présentaient des traces de brûlures. La peau n’était ni cloquée, ni noircie, simplement foncée ; comme grillée par la foudre. Dans un coin, des couvertures brûlaient allègrement. L’incendie ne manquerait pas de se propager et de nettoyer la scène.

La gardienne déglutit péniblement, retenant un haut-le-cœur et s’avança vers le seul survivant. Elle n’eut besoin que d’un regard pour savoir qu’il ne survivrait pas. N’importe qui aurait pu en arriver au même jugement. Son tronc gisait dans une épaisse marre de sang, à un pas de ses jambes.

L’agonisant dû lire ce constat dans l’esprit de la jeune femme, car il s’agrippa à sa conscience, comme pour éviter de sombrer. Cette dernière n’eut aucun mal à le contenir, il était très faible. Il s’en rendit compte et se détacha lentement, en laissant des images s’épanouir à la surface de son esprit.

Lise aurait voulu pouvoir fermer les yeux pour s’épargner ce spectacle. Mais elle maintint le lien ténu qui reliait leur conscience. Elle vit la porte s’ouvrir à la volée et une silhouette s’engouffrer dans la cave en tourbillonnant. Sa lame s’agitait si vite qu’on ne la distinguait que par de brefs éclats avant qu’elle ne fasse jaillir une cascade de sang d’un premier homme. L’ombre continua de danser au milieu des sorciers masqués. Ses coups violents brisaient ceux que sa lame épargnait. Plusieurs fois, des éclairs jaillirent de son corps et frappèrent tout ce qui se trouvait autour de lui. Il trancha le témoin d’un seul coup de sa faux et le regarda s’effondrer. Ses yeux brillant d’une colère froide ressortaient sur sa peau sombre.

Le sorcier s’effondra dans un soupir, à bout de force et ses souvenirs disparurent aussitôt. Mais Lise sentait toujours le regard du sombre peser sur elle. Elle avait gravée ce témoignage étranger dans sa propre mémoire. Maintenant, elle ne pouvait plus échapper à la vérité : l’auteur du massacre n’était autre que Charlie.

Elle sentit la douleur étreindre le vieil homme, l’attirant avec une lenteur effroyable dans les abîmes de la mort. Elle tendit la main vers un poignard sacrificiel planté à même le sol. Elle l’arracha sèchement et se tourna vers le mourant. Elle le redressa et soutînt sa tête avant de planter la lame dans sa nuque, le tuant sur le coup. Elle retira ensuite la lame et la replanta dans le sol à côté du mort avant de se lever.

Son regard balaya une dernière fois le spectacle d’horreurs. Le feu atteignit un bol d’huile et l’embrasa instantanément, envoyant une boule de feu s’écraser au plafond où d’épaisses tentures s’enflammèrent aussitôt.

Il était temps de partir.

La jeune femme força ses jambes à la faire sortir du charnier et attendit de s’être remontée à la surface pour laisser ses pensées s’exprimer à nouveau. À cette heure-ci elle ne risquait pas de faire de mauvaise rencontre. Et – surtout - Charlie serait en vadrouille dans les sous-sols où se tenait l’essentiel de la vie clandestine de Gil’ead.

La guilde des masques était une obscure secte de sorciers et de sombre ritualistes. Le monde ne regretterait probablement aucun de ses représentants. Mais Lise leur vouait un grand intérêt, elle s’était approchée du Cercle après que Charlie ait fermement refusé de lui enseigner la moindre notion de s’approchant de la sorcellerie. L’Art Sombre passionnait la jeune gardienne et les arguments de Charlie n’avaient su lui faire renier son intérêt les esprits et les secrets ésotériques qui les entourent.

La jeune femme était parvenue à échapper aux pièges que lui tendirent certains sorciers et triompha de plusieurs mises à l’épreuve. Les sorciers la toléraient parmi eux, ne décelant pas plus de danger chez elle que chez un animal de compagnie. D’ailleurs même si elle ne s’abandonnait à aucune servilité, la jeune femme assistait volontiers ceux qui lui demandaient et obtenait régulièrement quelques leçons de leur part. Au final, la plupart de ses vieillards étaient heureux de pouvoir partager des bribes de leur savoir. L’intérêt d’une belle jeune femme flattait leur égo et ils se disaient enchanté de laisser ainsi un héritage aux générations futures. Lise buvait leurs enseignements et se montrait bonne observatrice quand elle n’était pas occupée à s’exercer elle-même. Le tout dans le plus grand secret. Du moins en avait-elle été convaincue jusqu’à aujourd’hui.

Charlie ne s’était sûrement pas occupé de cette bande de vieillards sans une raison précise. Et cette raison n’était autre que Lise elle-même. Elle en était certaine. S’il n’avait pas hésité à massacrer une secte entière pour empêcher la jeune femme d’en apprendre plus sur la sorcellerie, que serait-il prêt à faire pour l’empêcher de quitter la ville ? Mieux valait ne pas s’éterniser assez longtemps pour lui poser la question.

Apercevant une patrouille de Premiers Hommes, Lise baissa la tête et continua de marcher au même rythme. Ses cheveux emmêlés et ternis par le mauvais temps cachaient partiellement son visage et la tunique qu’elle portait ne mettait pas son corps en valeur. Ces atours lui permettait généralement de passer inaperçue auprès des envahisseurs. Le déguisement fonctionna cette fois encore et la jeune femme dépassa les gardes sans encombre. Elle tourna deux rues plus loin et s’aventura dans les ruines d’une taverne donc les éboulis dissimulaient une des entrées vers la ville souterraine qui s’était épanouie sous les ruines de Gil’ead, au nez et à la barbe des soldats rouges. Cette entrée était la plus proche de la cavité dans laquelle Charlie et sa protégée avaient élu domicile quelques mois plutôt.

Le physique atypique de Charlie l’empêchait de se montrer à la surface sans attirer l’attention des gardes. Il s’était fort bien accoutumé à la vie souterraine, tandis que Lise éprouvait le besoin régulier de prendre un bol d’air frais à la surface. Grâce à cela elle avait pu identifier la plupart des passages où le monde du dessous communiquait avec celui du dehors. Elle s’arrêta à bonne distance pour sonder brièvement leur demeure.

* Personne. * Commenta intérieurement la gardienne.

Elle entra prudemment à l’intérieur et se dirigea directement vers le coin qu’elle s’était aménagée. Elle commença par se changer, abandonnant ses frasques bouffantes pour des habits pratiques et solides, plus adaptés au voyage. Elle rassembla ensuite quelques affaires – le strict nécessaire – dans une couverture qu’elle roula soigneusement. Elle s’assit dessus pour éviter qu’elle ne se déroule et entreprit de la saucissonner avec une lanière de cuir longue de six pieds. Son nœud achevé, il restait assez de longueur pour qu’elle s’arrange un semblant de bretelle. Elle passa ainsi son paquetage en bandoulière et s’approcha de la sortie. Elle sonda à nouveau les environs proches sans trouver la trace de Charlie. Elle ne prenait pas la peine de cacher sa propre conscience, pas encore.

Elle sortit et se dirigea vers un des boyaux les plus fréquentés. Elle croisa Faya, une femme qui vivait du marché noir chez qui Lise venait régulièrement s’approvisionner. Comme la gardienne s’y attendait, la trafiquante ne manqua pas de remarquer son bagage et l’interrogea sans réserve.

« Je vais en surface pour quelques jours, expliqua la jeune femme, peut-être quelques semaines. J’aimerai voir de mes yeux ce qu’on m’a raconté sur Teirm. »  

La marchande connaissait ses origines nostroises et hocha la tête, la mine sombre.

« Le Tueur d’Ombre est au courant ? Ajouta-t-elle néanmoins.
- Oui, je l’ai prévenu. »

Le mensonge était aisé, c’était devenu une habitude depuis qu’elle vivait sous l’occupation des Premiers Hommes. Elle lui adressa un hochement de tête entendu puis continua jusqu’à un autre accès vers l’air libre. Une fois dehors, elle arrangea ses cheveux se dirigea vers un des postes de garde en périphérie ouest de la ville. Son accoutrement ne manquerait pas de la faire remarquer, elle y comptait bien d’ailleurs.

Les gardes ricanèrent quand un des Rouges l’interpela.

« Elle va où comme ça ?
- À l’ouest ! Lança-t-elle d’un ton jovial. Je dois me réapprovisionner en grain à Yazuac. »

C’était une raison valable. Le Yazaret n’avait pas été sévèrement touché par la guerre et nombre de leurs cultures étaient intactes. Il était courant de s’y rendre pour acheter des produits frais, ou même de quoi ensemencer ailleurs.

« À cette heure-ci, il y a du brigandage sur les routes, c’est pas prudent. Peut-être qu’elle devrait attendre demain. Il sourit, elle aussi.
- Peut-être que vous pourriez m’escorter sur une partie du trajet. »

Il était aisé d’aguicher ces soldats. Après avoir travaillé des années dans une maison close, des factionnaires qui mourraient d’ennui pendant des heures à leur poste étaient des proies faciles. Celui-ci devait déjà s’imaginer les jeux auxquels ils pourraient jouer une fois cachés dans un sous-bois, à l’abri des regards indiscrets.

Après une demi-douzaine de minute de chevauchée, Lise abandonna son corps sans vie dans un fossé, débarrassa la monture de ses parures militaires et continua vers l’ouest. En route elle croisa une maigre caravane de marchand. Elle troqua sa monture contre une des leurs.
Une fois éloignée des voyageurs, elle se concentra pour dissimuler sa présence spirituelle. Si Charlie ou Sombral la surveillaient, ils ne pouvaient plus la détecter. Elle avait suffisamment avancé vers l’est pour leur offrir une piste convenable. Sans attendre un instant elle éperonna sa nouvelle monture vers le nord, espérant sincèrement que toutes ses précautions seraient suffisantes pour que Charlie ne puisse pas la retrouver.

À présent, elle était seule.




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