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Une nef trop loin

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Keldar


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Keldar
Message Sujet: Une nef trop loin | Mar 6 Mai 2014 - 11:05



Le port…

Keldar était entré dans l’une des tavernes le bordant il y avait presque une semaine, et il y était revenu chaque jour depuis.

Et pour cause, sa quête pouvait bien trouver son aboutissement ici même, au milieu de la crasse de Gil’ead la Sombre. Gil’ead la triste, la poussiéreuse, la pauvre, la morte… autant de qualificatifs qui lui sellaient à ravir. Même Keldar, pourtant coutumier de ces conditions, ne supportait plus qu’à grand peine la pestilence qui semblait ne jamais refluer de ses allées.

Mais peu importait. Si le dixième de ce qu’il avait entendu était vrai, cette attente en valait la peine. Le premier soir dans le quartier, un ivrogne avait lancé que les légendes étaient en ville, prêtes à bouter l’envahisseur hors du royaume. Cela l’avait fait bien rire. En admettant que quelqu’un arrive à s’opposer aux nouveaux rois, il ne commencerait sûrement pas dans ce trou-à-rats, où les Premiers Hommes avaient en plus établi leur bastion. Puis, il avait surpris une conversation au détour d’une rue. Il rentrait chez lui ce même soir quand il était passé près de deux loubards en train de chuchoter. Son oreille avisée avait relevé quelques mots qui l’avaient faite se dresser. « Magicien » et « Empereur » avaient été prononcés et il n’en avait pas fallu plus pour que Keldar approfondisse les recherches.

Il lui avait fallu du temps avant d’en être certain. L’information avait été bien gardée, même pour un habitué comme lui. Mais le fait était à présent avéré : un magicien était en ville, et pas n’importe lequel. Le seigneur Laïaga lui-même rôdait parmi les taudis de la cité. Keldar n’en revenait pas de la capacité de ces gens à passer inaperçus. Jusqu’ici, il n’avait trouvé que les mages qu’il avait cherchés sciemment. Jamais il n’était tombé sur l’un d’eux par hasard. Et pourtant, l’oiseau qu’il convoitait aujourd’hui devait être connu du monde entier !
Enfin, connu… Keldar n’avait jamais vu son visage, à bien y réfléchir. On lui avait montré une fois une effigie estampillée au dos d’une pièce d’un autre âge, mais les choses avaient probablement changé depuis. Il avait retrouvé la piste de l’homme, presque par chance, auprès d’un trafiquant d’arme qu’on lui avait recommandé. L’information avait valu vingt fois le prix du vieux couteau rangé à sa ceinture, mais il disposait en prime d’autres indicateurs à interroger.

Le plus dur était finalement de supporter Trésor, qui piaffait d’impatience. Elle avait été bercée toute son enfance, autrement dit toute sa vie, par les récits fabuleux courant sur le compte de cet étonnant personnage. Si lui-même n’avait que vaguement entendu son nom, elle s’était empressée de l’instruire sur l’ensemble de sa vie. Il s’attendait ainsi plus ou moins à rencontrer un géant monté sur un dragon, sa silhouette nimbée en permanence d’éclairs et de flammes. Toutes exagérées qu’aient étés les prouesses du sorcier, il serait sans doute plus qu’à même de la libérer de son écrin.

Si la petite n’avait pas été prisonnière, elle aurait sans doute été en train de le harceler en sautant et trépignant dans tous les sens. Fort heureusement, il était encore tôt, même pour les commerçants.


- Tu vois l’apothicaire, tu le vois, hein-dis-dis-tu-le-vois-hein ? Alleeeeeer ! Dis-moi, s’il te plait !
- Shhhht ! Je t’ai dit de ne pas parler quand nous ne sommes pas seuls. Les rues vont bientôt grouiller de monde. Tu ne voudrais pas te faire enlever pour être vendue comme un vulgaire bijou, après tout ce temps ? Cette ville compte plus de voleurs que d’habitants ! Et d’ailleurs, on arrive. Maintenant calme toi et laisse-moi faire.

L’enseigne se profilait au bout de la rue. Keldar se félicita d’être arrivé si tôt. La propriétaire venait juste de fermer la porte derrière elle. Il avait à peine passé le seuil qu’une voix grinçante s’éleva depuis le comptoir :

- Vous êtes en retard, jeune homme. A moins que vous ne veniez pour acheter, bien sûr !
- Pas précisément. On vous a averti de ma venue ?
- Et je ne saurai trop vous conseiller de ne pas traîner pour repartir. L’homme que vous cherchez doit déjà être en route à l’heure qu’il est.
- Comment ça ? Où puis-je le rattraper ?

La femme tendit une main noueuse. Keldar y déposa quelques pièces, ainsi qu’un osselet l’identifiant comme étant bien le visiteur attendu. La main resta tendue.
La réponse n'allait pas être donnée...
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Laïaga

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Laïaga
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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Jeu 8 Mai 2014 - 10:33


Je baissai les yeux sous mes pieds. La surface de l'eau était à plus de dix mètres en-dessous de moi, et si jamais je tombais maintenant, je me briserais probablement l'échine sur la superstructure alambiquée de Sombrenef bien avant d'atteindre le lac.
Heureusement que j'étais insensible au vertige depuis longtemps, pensai-je en reportant mon regard sur la paroi de l'immense navire pour chercher une nouvelle prise. Il n'y en avait pas à portée, et je dus sauter pour en attraper une nouvelle un peu plus haut. Je réussi à la crocheter in extremis et me retrouvai suspendu dans le vide, seulement retenu par trois doigts de la main droite.
Le vent se mit à souffler, glacial à cause de mes vêtements trempés suite à ma nage à travers le lac. Je murmurai un juron bien senti.

-T'as intérêt à valoir toute la peine qu'on se donne, mon cher Nils Dalén ...

Et d'une traction, je me hissai, trouvai des prises pour mon autre main et mes pieds. Il ne restait plus que quelques mètres à gravir. Sombrenef, bien qu'étant un immense bateau, n'avait pas une structure très orthodoxe. Cela ressemblait plus à une forteresse flottante complexe et immense, et j'étais entrain de me hisser au milieu des plaques de protection qui l'entouraient.

*Yarrock, rien à signaler ? demandai-je mentalement à mon dragon, quand je fus arrivé en haut.*

J'étais perché en équilibre sur le faîte d'une plaque de métal, recroquevillé, essayant d'être le plus discret possible. Côté extérieur, la vue portait jusqu'à la ville que j'avais quittée un peu plus tôt ce matin, je pouvais pouvoir les patrouilles de Premiers Hommes que j'avais évitées, et un drôle de bonhomme qui semblait s'approcher avec autant de précautions de l'endroit que je l'avais fait moi-même.
Côté intérieur, c'était beaucoup plus difficile à décrire. Des passerelles suspendues couraient entre les mats, formant l'imbroglio improbable qu'était la forteresse des Premiers Hommes. Sous les innombrables passerelles et cordages, on distinguait le pont du vaisseau. Nous avions réussi à glaner quelques informations sur son organisation, et je savais vaguement où chercher mon prisonnier, mais ça restait vague, et j'étais le premier résistant de la Cam à avoir une vue directe sur l'intérieur du bastion de nos ennemis. Pour autant que je sache.

*Rien à signaler, répondit le dragon. Les autres disent qu'ils sont prêts, ils attendent ton signal. *

Non seulement Yarrock croisait haut dans le ciel et observait les alentours de ses yeux perçants, mais aussi il faisait le lien télépathique avec mes alliés en ville. Cette opération était prévue de longue date maintenant, et sa réalisation allait demander leur participation autant que la mienne.

*Bien. Je mets le masque. A dans deux heures !*

Et j'enfilai le masque. C'était un risque, d'avoir autant attendu. Mais j'avais besoin de cette dernière communication avec Yarrock avant de me lancer dans la suite du plan. Ces masques permettaient de nous rendre indiscernable, du moins, tant qu'on ne faisait rien d'extravagant. Inutile de dire que de voir un alagaësien sur Sombrenef était bien assez extravagant pour que les masques soient entièrement inutiles.
En revanche, ils avaient l'intérêt de fourvoyer un éventuel magicien passé chez l'ennemi qui aurait risqué de ressentir mon esprit. Le problème était que mettre le masque plus tôt n'avait aucun intérêt ma conversation télépathique avec Yarrock aurait suffi à me faire remarquer.
A travers les fentes pratiquées dans l'ivoire, je définis le chemin que j'allais suivre pour descendre, et où je devais atterrir. Nous avions longuement discuté de qui devait se charger de la mission. Ma « célébrité » auprès des Premiers Hommes était un gros désavantage, mais au vu de ce qu'il m'allait falloir accomplir, je doutais fort qu'un de mes soldats y serait arrivé.

-Et c'est là qu'on va s'amuser, murmurai-je pour moi-même.

Je sautai de mon perchoir pour attraper une corde le long de laquelle je me laissai glisser, et les acrobaties reprirent. Non définitivement, personne n'aurait pu me suivre...


Dernière édition par Laïaga le Lun 26 Mai 2014 - 0:24, édité 1 fois
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Keldar


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Keldar
Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Dim 11 Mai 2014 - 15:13



Le bâtiment semblait sans fin. Amarré à quelques encablures de la rive, sa mâture se perdait dans la brume du matin. Que quiconque ait été assez fou et ambitieux à la fois pour l’amener dans le lac depuis l’océan dépassait l’imagination. Au moins autant que de s’infiltrer à bord, mais de l’imagination, Keldar en avait à revendre  en la matière.

Il avait perdu un temps précieux chez la vieille commerçante. L’apothicaire lui avait donné la destination du sorcier pour une somme élevée, quoique raisonnable vu la qualité et l’importance de l’information.


- Le seigneur que vous recherchez est en visite dans les cachots de la ville. Je vous aurais bien conseillé d’attendre son retour, mais je crains que des affaires urgentes ne précipitent son départ.
- Les cachots, vous dites ? Mais il n’y a pas de… Non, c’est une blague ? Quand compte-t-il embarquer ?
- Demain matin, selon toutes les sources fiables que je connaisse. Mais si je me fie à sa réputation, il doit déjà être sur les quais, si ce n’est à bord.
- Combien pour me faire embarquer sur le champ ?

Il s’agissait plus d’un coup de bluff que d’une réelle proposition, ses réserves sérieusement entamées par les précédentes transactions. Mais savoir qu’il existait un moyen de monter clandestinement à bord le rassurerait.  La femme lui jeta un regard ahuri tout en lui expliquant que personne n’avait encore infiltré le bastion. Une telle cible était seule à la mesure de l’orgueil de l’ex-empereur.

S’il se trouvait encore sur les quais, Keldar aurait une chance. D’autant plus qu’à cette heure, beaucoup de soldats cuveraient encore leur soirée de la veille. C’était faisable mais il n’y avait pas une seconde à perdre.

C’est ainsi qu’il était de retour sur les docks. Il avait parcouru le port en long, en large et en travers, mais aucune trace du magicien. Le seul informateur debout à cette heure lui avait annoncé que Lord Laïaga avait quitté la ville. De quoi il avait déduit, à contrecœur, qu’il était déjà en route pour Sombrenef. Il était hors de question de l’attendre dans le coin. D’abord, nul ne pouvait prédire s’il sortirait de la forteresse, et encore moins quand. Ensuite, s’il réussissait son tour de force, la moitié des armées du continent seraient à sa recherche. Il aurait d’autres chats à fouetter qu’un vulgaire voleur  et son amulette magique. Keldar n’avait pas songé qu’à bord aussi, il aurait sans doute d’autres sujets de préoccupation.

Quand il avait vu Sombrenef pour la première fois, quelques jours auparavant, il s’était dit que les navigateurs devaient bien s’amuser, à sauter de cordes en filets, de passerelles en nid-de-pie. L’idée l’avait laissé rêveur. Il semblait que ce fantasme serait bientôt à sa portée.

Les patrouilles étaient peu nombreuses et la relève n’avait pas encore eu lieu. Le petit voleur n’avait aucun mal à se fondre dans le décor face à si peu de vigilance. Les Premiers Hommes ne lui avaient jusqu’ici jamais posé problème, et il n’avait pas fait grand-chose pour se les mettre à dos non plus. Restait qu’atteindre le galion ne se ferait pas sans mal. Le lac était d’huile et y aller en nageant reviendrait à se faire cribler de flèches. Et même en admettant qu’il l’atteigne en vie, il ne pourrait jamais se hisser à l’intérieur tout seul. En grimpant le long d’une des ancres ? Là aussi, ses chances d’aborder discrètement étaient minces.

La pâle clarté du matin laissait doucement place au jour et le port reprenait son activité. La relève n’allait pas tarder et avec elle… la relève ! Voilà, la solution ! Une partie de la garde, sans doute des officiers, transitait jusqu’à la base à bord d’une galère lors de ces changements.

Etait-elle à quai ? Oui ! Aucun guetteur n’était visible. Pas le temps de penser, il fallait agir tout de suite. Sans chercher à être spécialement discret, il marcha jusqu’aux abords du navire. La passerelle était en place, prête au transbordement. Personne n’était visible sur le ponton, et le seul bruit audible provenait du bois craquant de la frégate. Il se redressa, pris sa démarche la plus sûre, et monta à bord…

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Laïaga

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Laïaga
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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Lun 26 Mai 2014 - 1:22


Spoiler:

Je tombai enfin dans un bruit feutré sur le pont le plus élevé de Sombrenef, dissimulé derrière ce qui ressemblait à un hangar. Bon sang mais quelle taille faisait vraiment ce bateau ? Il y avait des foutus bâtiments construits sur le pont ! Pendant ma désescalade, j'avais repéré quantité de détails intéressants sur l'architecture du QG des Premiers Hommes dont la Cam aurait adoré avoir connaissance, et plus je descendais plus j'en apprenais, mais il était trop tard maintenant pour leur transmettre quoi que ce soit. Il allait falloir attendre que je quitte les lieux.
Je regardai alentours pour vérifier que personne ne s'y trouvait, et m'enfonçai dans l'ombre d'un recoin. Là, je défis le sac que je portais attaché très serré à mon dos, attrapai l’étui cylindrique en cuir qu'il contenait (entre autres choses utiles), l'ouvris, en tirai une large feuille de vélin, la déroulai à même le sol, et enfin examinai la carte qui y était inscrite.
C'était Sombrenef, les différents étages représentés au mieux de ce que nos connaissances nous permettaient. Je repérai facilement la face du navire que j'avais escaladée, et le bâtiment derrière lequel je me cachais. Plusieurs des accès aux ponts inférieurs y étaient dessinés, mais aucun assez prêt pour que je puisse m'y rendre facilement.
Oui parce que bien entendu, les cachots où je devais retrouver mon Nils Dalén se trouvaient en fond de calle, séparés de la flotte par la simple épaisseur de la coque.

-Bon, comment je vais là maintenant, murmurai-je.

J'avais repéré l'accès le plus proche. Mais ça impliquait tout de même de traverser une zone à découvert. Je repliai la carte et la fourrai dans son étui que je fourrai sans le sac, avant d'en tirer un petit morceau de métal poli fixé au bout d'une tige, que je tendis hors de ma cachette pour observer les alentours.
La préparation de mon équipement nous avait demandé du temps, mais jusque là, il s'avérait bien utile. Je planifiai minutieusement mes mouvements, décidai des cachettes où j'allais me réfugier le temps de laisser passer un éventuel Premier Homme, des chemins que j'allais emprunter et même de la vitesse de ma course.
Et, une fois tout bien réfléchi, je m'élançai, et rien ne se passa comme prévu. J'avais à peine quitté mon recoin qu'une porte s'ouvrit dans le hangar qui m'avait dissimulé, et un marin en sortit, presque nez-à-nez avec moi. Il marqua un temps d'arrêt, sidéré de voir un alagaësien ici. Moi pas. L'instant d'après je lui bondissais dessus et le repoussais violemment en arrière, le faisant repasser la porte dans l'autre sens, une main fermement plaquée sur sa bouche.

-Mais c'est quoi ce bordel !? fit une voix dans le hangar.

J'attrapai un kunai accroché à ma ceinture, et dans un geste qui tenait du réflexe reptilien, le projetai dans le visage de celui qui avait parlé. Le petit projectile s'enfonça dans son visage et le fit basculer en arrière en poussant un râle. L'autre, que je bâillonnais toujours de la main, se débattit et me donna un coup de genou qui me coupa le souffle, mais je réussis à ne pas le lâcher.
Je lui décochai à mon tour un coup de poing qui le sonna, le fis pivoter face contre terre, lui tordis le bras et tirai une dague que je plaquai contre sa gorge.

-Le point d'accès le plus près pour les ponts inférieurs. Vite. Et tu vivras.
-Ok, ok, grogna-t-il en haletant, dans un alagaësien balbutiant. Ok, laisse moi reprendre de l'air...

Je desserrai un peu mon étreinte sur mon bras mais ne reculai pas ma dague. Soudain, il se mit à crier dans sa langue natale. Et je l'égorgeai, le coupant au milieu de sa phrase. Je ne parlais pas leur langue, mais ça avait tout l'air d'un appel à l'aide, et j'espérais que le bruit permanent qui baignait Sombrenef l'avait couvert. Je m'empressai tout de même d'aller vérifier les abords et de refermer la porte.
Récupérant mon kunai – avant de me préparer à cette mission, je n'en avais plus manié depuis des années, mais les réflexes de l'époque revenaient vite – je traînai les deux cadavres derrière des ballots de cordes et des piles de poutres de toutes les formes et tailles.
Et là, je trouvais une échelle.

-Oh.

Il y avait aussi, traversant la même ouverture dans le sol, un monte-charge actionné par un système de poulies.

-Pratique, dis-je pour moi-même.

Je passai tout d'abord la tête par-delà le rebord, cherchant une trace d'activité, mais je vis personne. Heureusement, car s'il y avait eu quelqu'un à l'intérieur du hangar, il n'aurait pas manqué d'entendre le cri de ma victime. L'échelle se poursuivait encore à travers un second plancher ; le hangar faisait communiquer les trois ponts supérieurs. Cette veine ! Plus que quatre avant d'arriver à l'étage des cellules.
Il me fallut encore crocheter une serrure – j'avais appris à le faire pas plus tard que la semaine précédente – et faire de nouveau usage de mon miroir avant de quitter les lieux. Je continuai ainsi mon chemin, semant derrière moi des cadavres, le moins possible, que je cachais qui dans un baril vide, qui dans un recoin le plus discret possible. Quelques uns passèrent même dans des hublots avant que j'arrive enfin au tout dernie sous-sol..
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Keldar


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Keldar
Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Jeu 5 Juin 2014 - 22:06



Il s’en était fallu de peu qu’un homme du bord ne le surprenne en flagrant délit. Il s’était rencogné dans l’encadrement d’une porte, priant pour ne pas avoir été entendu. Le péril écarté, il fit doucement pivoter le panneau auquel il était adossé. Il trouva vite sa place parmi le fret embarqué dans la cale. L’attente ne fût pas spécialement longue, mais le temps paru se dilater sans vergogne ces quelques minutes. Keldar en vint même à douter que ce navire appareille un jour. Mais au terme de ce supplice, la relève arriva enfin, embarquant son lot d’officiers et de provisions.

Il frémit d’excitation lorsqu’il sentit la galère quitter le quai. Même dans l’obscurité, la traversée passa en un instant. Il avait à peine eu le temps de ressasser une quinzaine de fois son plan d’action que la chute de la passerelle se faisait déjà entendre. Il se plaça immédiatement devant le panneau qui fermait sa cachette. Il l’entrouvrit prudemment pour observer la manœuvre. Tout l’équipage et les passagers se trouvaient sur le pont. Quel idiot il faisait ! Il pouvait rester à peu près aussi longtemps qu’il voulait dans l’embarcation, jamais il ne pourrait traverser la passerelle de ce côté. Il avisa un groupe d’hommes qui s’avançaient dans sa direction.

Il commençait déjà à reculer quand un cri s’éleva de Sombrenef. Tous les équipiers se tournèrent en direction de l’appel et plusieurs hommes s’en allèrent dans le vaisseau. Il n’aurait peut-être pas d’autres occasions. Sans un geste brusque, il ouvrit la porte et se dirigea tranquillement à bâbord. Des voix s’élevaient un peu partout de la forteresse, focalisant l’attention de tous, même des marins du galion. D’un mouvement souple, il fit glisser ses jambes par-dessus bord et, s’accrochant une dernière fois au bastingage, se laissa tomber à l’eau.


Le contact glacé lui engourdit instantanément les membres. Il pataugea quelques instants, se réchauffant à grand peine. Collé à la coque, il fit le tour de la frégate jusqu’à se retrouver entre les deux insubmersibles. Le nez au ras de l’eau, il atteint l’emplacement de la passerelle et traversa le bras qui le séparait de la forteresse flottante.

Rassemblant son attention, il réalisa qu’il n’entendait plus le moindre bruit proche. Il se hissa prudemment à un pare-battage. Un examen rapide lui révéla le chaos régnant sur le pont : des caisses posées au premier endroit venu, des cordages traînant au milieu d’un désordre d’outils et de poutres, planches et autres madriers.

Un cri s’éleva derrière lui. Un équipier resté sur la frégate l’avait repéré et sortait sa corne de brume, prêt à donner l’alarme. Le son n’avait pas traversé les vingt mètres les séparant qu’il sautait déjà à couvert. Il avisa rapidement une trappe s’ouvrant dans le plancher. Un monte-charge attendait un peu plus bas. Il glissa le long des cordes le retenant au plafond.

A peine eu-t-il posé pied à terre qu’il dut se jeter dans le vide, s’accrochant du bout des doigts seulement au plateau qu’il venait de quitter. L’ouverture sur laquelle il venait de déboucher était remplie d’envahisseurs surexcités. Le vacarme qu’ils provoquaient devait s’entendre depuis le pont, mais il n’en avait rien perçu, entièrement focalisé sur sa fuite. Celui-ci avait néanmoins l’avantage de couvrir efficacement l’appel de la trompe. Les voix commencèrent à se disperser, certaines se rapprochant. Il serra ses jambes autour des cordes de levage et lâcha la plateforme. Deux hommes grimpèrent, plongés dans une discussion animée.

Le monte-charge s’éleva tranquillement, Keldar dans son sillage. Arrivé à hauteur du passage, il sauta le plus légèrement possible de son perchoir. Plus personne n’occupait le couloir.

A en juger les marques laissées dans la poussière, on avait déménagé une partie du mobilier. Une trace parfaitement ronde suggérait qu’un tonneau s’était trouvé là un certain temps. Pour quelles raisons l’avait-on subitement déplacé, mystère. L’interrogation n’était en tout cas pas si anodine, compte tenu des autres traces empourprant le parquet. Celles-ci se poursuivaient jusqu’à une porte au bout du couloir. Il s’en approcha sans un bruit. Un chuchotement provenait de la pièce. Plaqué contre le mur au ras du sol, Keldar fit passer sa tête dans l’entrebâillement. Un homme était allongé sur une couchette, tandis que celui qui parlait était penché sur lui, dos à la porte. Un filet vermillon lui barrait la gorge, que son congénère était en train de nettoyer.

Nul besoin d’en chercher la cause. Le guerrier était tombé sous le coup d’une lame, et l’identité de son porteur ne laissait planer que peu de doutes à présent. Ceci expliquait aussi le remue-ménage de tout à l’heure. Les soldats savaient un intrus à bord et ils avaient sonné la chasse.

A en juger par ce dont il venait d’être témoin, il était sur la bonne piste. Ne restait plus qu’à devancer le régiment lancé à sa poursuite.  


- Tu vas courir, là ? chuchota Trésor.

Ses perceptions s’accroissaient sans cesse. Son cœur avait à peine commencé à accélérer en prévision de l’effort et elle l’avait senti.

- Accroche-moi bien, que je ne tombe pas, s’empressa-t-elle d’ajouter.

Il s’élança dans les coursives.




Plusieurs minutes s’étaient écoulées. Il parcourait les étages sans relâche, se cachant au moindre bruit. Il avait été déçu de voir que les patrouilles ne semblaient pas plus savoir où chercher que lui. Il se trouvait maintenant au milieu de galeries désertes. Le silence qui y régnait contrastait avec l’activité fébrile du reste du navire. Sans doute avait-il définitivement perdu sa trace. Peut-être même le magicien était-il déjà reparti, pour ce qu’il en savait. Il n’avait absolument aucune idée des capacités du gaillard, mais les récits qui en faisaient état étaient dithyrambiques.

C’est alors qu’il la vit. La lumière étrange et bleutée passa dans son champ de vision et il n’en détacha plus le regard. Sa source était passée devant l’échelle du pont inférieur, et se déplaçait à vive allure. Il passa la tête à l’intérieur de la trappe. La lueur provenait de symboles brillants gravés dans ce qui semblait être une armure de bois. Son porteur, une femme bien bâtie escortée de deux soldats, s’enfonçait dans les entrailles du navire.

Le trio parlait assez peu, mais il saisit quelques rares mots qu’il avait appris dans leur langue. Il s’agissait de chasseurs de mage, leur uniforme ne faisait aucun doute. Ils avançaient d’un pas sûr, sans trace d’hésitation.
Il les prit en chasse.

Le parcours qu’ils suivirent fut ponctué d’impasses, de revirements. L’excitation des poursuivants se faisait chaque fois plus évidente, sans pour autant les faire manquer de vigilance. Ils n’étaient pas discrets, certes, mais rien de ce qui se trouvait devant eux n’échappait à leur examen. Keldar avait de plus en plus de mal à les suivre. Les quartiers qu’ils fréquentaient à présent étaient bien plus peuplés et les cachettes moins sûres. Il les perdait de plus en plus souvent de vue, et leur escorte avait grossi au fil des rencontres.

La dernière fut cependant décisive. Un échange vif les arrêta face à une colonne de gardes. Keldar ne put rien entendre de la conversation, mais les deux groupes joignirent leurs forces et s’ébranlèrent au pas de course.  Il fût dès lors plus aisé de les suivre. Leur route ne croisait désormais plus que des cadavres, et le contingent se voyait d’un bout de couloir à l’autre. Ils arrivèrent devant une porte en fer béante. Un poste de garde désert la flanquait de chaque côté. La troupe s’y engouffra à toute allure.

Le voleur les suivit plus tranquillement. Plus attentif aussi. Il savait désormais où il se trouvait.

Les geôles de Sombrenef…
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Laïaga

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Laïaga
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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Lun 16 Juin 2014 - 18:55


-J'peux savoir qui vous êtes ?

L'homme parlait à voix basse mais d'un ton pressant. Je relevai les yeux de mes outils – je manquais encore un peu d'expérience en crochetage de serrure, il me fallait tout passer en revue pour me souvenir du bon crochet à utiliser au bon moment – et lui fis un petit sourire en coin.

-Laïaga Sin'Saïan, l'ami.
-Ah.

Il ne dit rien pendant quelques secondes.

-Moi c'est Nils Dalén.
-Sans rire ? demandai-je d'un ton ironique. Je suis venu vous récupérer parce que la Cam a besoin de vos talents. Et aussi pour faire chier les Premiers Hommes, mais c'est accessoire.

Je lui intimai de se taire pendant que je m'attaquais à la serrure de sa cellule. Elle était plus complexe que les quelques auxquelles je m'étais frotté plus tôt, mais nous nous y étions attendus, avec les autres, quand j'avais préparé ma mission.
En revanche, les renforts arrivèrent bien plus vite que ce à quoi je m'étais attendu. Je poussai un soupir en entendant les bruits de pas qui se rapprochaient. Pas très discret, c'était au moins ça.

-Qu'est-ce qu'il y a ? fit Dalén en me voyant abandonner la serrure. Un problème ?

Il y avait dans son regard une pointe de désespoir. Il devait se dire que tout était perdu et qu'il avait eu tort d'y croire. Que j'allais surtout me faire attraper et venir lui tenir compagnie dans sa cellule. On pourrait toujours jouer aux cartes.
Je posai mon indexe en travers de mes lèvres, « chut ».
Et sans un bruit je disparus. Je n'avais jamais été un grand adepte de la discrétion. Mais il n'était jamais trop tard pour commencer. Ils ne savaient pas que j'étais là, et n'étaient sans doute qu'un petit groupe venu inspecter les lieux. Le but du jeu était de tous les mettre hors d'état de nuire avant que l'un d'entre eux puisse alerter ses petits camarades, puis retourner évader Nils, et...
Je déchantai rapidement en voyant le petit contingent qui pénétrait dans les geôles, mené par une drôle de femme bardée de bois et de runes luisant doucement. Heureusement, eux ne me virent pas, j'étais accroché au plafond, paumes et pieds à plat contre les murs en bois de l'étroit couloir. Je les laissai passer, les membres tremblant, espérant qu'une goutte de sueur n'allait pas tomber de mon visage et me trahir. Je les entendis parler entre eux dans leur langue, et finalement quatre soldats se détachèrent du groupe et revinrent vers la porte d'entrée des geôles, au-dessus de laquelle j'attendais de plus en plus facilement. Mes bras cessèrent de trembler. Les quatre types se postèrent en-dessous, regardant nerveusement autour d'eux... Quand je me décidai à me laisser tomber, tout ne dura pas plus d'une seconde. J'atterris près d'un premier que j'égorgeai à l'aide d'une dague, tout en tirant un kunai dans le visage du deuxième, puis ma dague s'enfonça dans le sternum du troisième et remonta brusquement jusqu'à son menton. Le troisième ouvrit la bouche pour crier, mais un coup de poing l'envoya rebondir contre le mur derrière lui. Je terminai le travail en l'égorgeant à son tour.
Quatre de moins. Maintenant, restait à comprendre pourquoi mes forces m'avaient abandonné, tandis que j'attendais de refermer mon piège, accroché au plafond. Je tirai, aussi discrètement que je le pus, les quatre cadavres encore chauds dans la cellule la plus proche. Malgré la brièveté et le silence relatif de l'exécution, il était probable que les autres aient entendu quelque chose.

-Ça doit être cette femme... murmurai-je pour moi-même. Et ses runes.

Les runes des Premiers Hommes inhibaient notre magie d'alagaësiens. Ici sur leur bateau, j'étais incapable de lancer le moindre sort, mais il semblait qu'aux alentours de cette femme, mes sens, ma force, mon endurance, tout ce que la magie et ma nature de dragonnier avaient amélioré au fil des ans, disparaissait aussi.
Il semblait que je redevenais un homme, pensai-je avec amertume.
Je me dissimulai dans un recoin d'ombre d'une cellule vide et déverrouillée, pas celle où j'avais laissé mes cadavres, mais suffisamment proche de l'entrée des geôles tout de même. Les geôles en question étaient plutôt grandes, assez pour qu'ils ressentent le besoin de les ratisser en petits groupes, et ce serait la situation la plus avantageuse pour moi. Et surtout, il fallait que je trouve l'étrange femme seule, que je la tue par surprise.
Mais plus que tout, il ne fallait pas que j'en laisse un constater la disparition des sentinelles et quitter les lieux. Alors, j'attendis, dans mon recoin d'ombres, la suite des événements... Qu'ils viennent donc se jeter dan mes mains... Et que je les étripe tous...
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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Jeu 19 Juin 2014 - 21:15




La troupe n’avait pas traîné.

Ils s’étaient précipités à l’intérieur, négligeant la surveillance de l’entrée. Keldar avait ainsi eu tout loisir de se lancer à leurs trousses. Il n’avait pas franchi l’encadrement que des ordres étaient donnés pour poster quatre hommes. Il n’eut que le temps de se plaquer de côté avant qu’ils ne se retournent.

Il cherchait encore désespérément un abri, les voix se rapprochant dramatiquement. Et puis… le bruit d’une chute, un sifflement, des grognements. Et le frottement des corps qu’on traîne à couvert.

Première réflexion : il avait trouvé son homme à n’en plus douter.

Deuxième réflexion : le gus ne devait pas s’attendre à trouver un allié ici. Keldar serait sans doute mort avant d’avoir compris ce qui lui arrivait.

C’en était risible. Il avait un allié et peut-être la réponse à tous ses problèmes de l’autre côté du mur, mais ses chances de l’atteindre en vie avaient chuté au moment où tout aurait dû s’achever. Pire : s’il attendait, il se ferait saigner soit par les soldats du bord, soit par le fugitif dans son élan. Une seule solution s’imposa à lui, aussi risquée et déplaisante que se jeter à l’eau du haut d’un mât. Il devait se laisser capturer, et encore en ayant l’optimisme d’espérer un sauvetage d’envergure. Une gageure à tout point de vue.


- T’as qu’à dire que t’es lui, il sera forcément pas indifférent, murmura la gamine.
- Lui ? Et en admettant que les troufions y croient, comment il le saura, lui ?
- Tu veux voir ? souffla-t-elle dans un gloussement.

Ce n’était pas la première fois que son imagination se manifestait dans une situation apparemment désespérée. Les genoux du voleur tremblèrent, mais pour une fois, il avait vraiment envie de lui faire entièrement confiance. Il acquiesça.
Il faillit éclater de rire en entendant la voix de fausset qui sortit du médaillon. Elle avait beau faire tous les efforts qu’elle pouvait pour se donner des airs d’hommes, elle était bien une petite fille.


- HOLA ! JE ME RENDS ! ENTENDEZ-VOUS ? MOI, SEIGNEUR LAIAGA, JE ME RENDS A LA GARDE DES PREMIERS HOMMES !

Il réussit à paraître assez grave quand la foulée rapide du régiment se fit entendre.
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Laïaga

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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Jeu 3 Juil 2014 - 15:20


-HOLA ! JE ME RENDS ! ENTENDEZ-VOUS ? MOI, SEIGNEUR LAIAGA...

Hein quoi ? Pardon ? Ma bouche aurait-elle oublié de mettre mon cerveau au courant d'un détail important ?

-JE ME RENDS A LA GARDE DES PREMIERS HOMMES !

Non, définitivement, il ne me semblait pas être à l'origine de cette reddition subite et inattendue. Alors qui est-ce que ça pouvait être ? pensai-je. Qui est-ce qui se faisait passer pour moi au milieu du quartier général du Premier Empire... avec une voix d'adolescent, voire d'enfant prépubère... ça n'avait aucun sens.
En tout cas, les Premiers Hommes semblaient y avoir cru, car je vis le contingent qui était passé dans un sens repasser dans l'autre jusqu'à l'origine du cri. Je sentis la même faiblesse croître puis disparaître tandis que la chasseuse de mages me dépassait.
Il y eut de l'agitation... des cris... accroupi, je sortis de ma cachette et longeai les couloirs dans l'autre direction, jusqu'à la cellule où j'avais abandonné Nils Dalén. L'espoir illumina à nouveau le regard du prisonnier. Je lui fis signe de se taire, repris mon ouvrage sur sa serrure, et quand enfin elle consentit à s'ouvrir, l'emmenai avec moi sans un mot.

Arriver jusque ici n'était pas le plus dur. Le plus dur, c'était d'en sortir avec mon colis. Je sortis un deuxième masque de mon sac, que je tendis à Nils en lui faisant signe de le porter. Il hésita un peu, puis finit par accepter. J'imagine que dans sa situation de toute façon, il n'avait pas grand chose à perdre à faire confiance à un inconnu bizarre.
Je partis, toujours silencieusement, vers la cellule que j'avais occupée un peu plus tôt, Nils toujours derrière moi. De là je pus jeter un coup d’œil discret à l'entrée des prisons. Je vis le groupe de soldats disparaître à un tournant sans pouvoir discerner leur prisonnier. Mais nul doute que, qu'ils se rendent de la supercherie ou non, il serait mort dans l'heure. Nous n'avions qu'à attendre qu'ils s'éloignent un peu, que l'alerte retombe, et filer ni vus ni connus. Ce n'était qu'un homme comme des millions d'autres, c'était dommage pour lui, mais bon... mais bon...

-Bordel... je jurai à voix basse. Bordel de merde.
-Qu'est-ce qu'il se passa ? demanda l'autre, sur le même ton.
-Il se passe qu'un connard s'est fait passer pour moi et va se faire tuer.
-Ah... Alors vous êtes vraiment...
-Ouais, tu peux me tutoyer, après que je sois venu te chercher dans le coin le mieux gardé du monde on doit être assez intimes pour ça.
-Qu'est-ce qu'on fait ?

Je ne répondis pas de suite. Cas de conscience. Je ne connaissais pas cet imbécile suicidaire, mais il m'avait aidé. Sauf que si je devais l'aider en retour, la situation se retrouvait encore plus compliquée qu'au départ. La belle affaire. Je poussai un soupir.

-Aujourd'hui j'arrête de laisser mourir des gens.
-Hein ?
-On va le sauver ! Je vais partir devant, tu restes quinze mètres derrière. Je vais les occuper, et pendant que je serai avec eux, tu essaies de rejoindre le pont et tu te tailles.
-Tu parles d'un plan...
-Fais-moi confiance, ils auront l'esprit ailleurs. Vole une barque, pars à la nage, je ne sais pas. Prend ça.

Je farfouillai une nouvelle et dernière fois dans mon sac et en tirai une boîte en plomb. Je la lui donnai.

-Il y a une bague dedans. N'ouvre pas la boîte avant d'être sorti de Sombrenef, ok ? Tu mets la bague, tu penses très fort « à l'aide », et un dragon viendra te chercher. Et surtout, surtout, pas de magie ! C'est compris ?
-Je crois oui...

Il n'avait pas l'air très sûr de lui, ce que je pouvais comprendre, ce n'était pas le plan le mieux construit de toute l'histoire des plans. D'aucuns auraient même dit que ça sentait fort le sapin. Je lui fis un petit sourire et lui mis une tape sur l'épaule :

-Courage. Ça va bien se passer, crois-en ma longue expérience. Allez on est partis !

Je posai mon sac par terre, attrapai trois kunais de la main gauche et tirai la dague gravée d'une rose que Shankaï m'avait offerte voilà longtemps de la droite, et m'élançai au trop.

-Laïaga ! chuchota Nils.

Je me retournai.

-Hum ?
-Merci pour tout. Même si on y reste... merci d'avoir essayé.

Je lui fis un petit signe de la main et partis pour de bon. La troupe de Premiers Hommes avait disparu. Au premier tournant, je m'arrêtai, vérifiai du coup de l’œil – je n'avais pas pensé à mon petit miroir – et repris mon avancée. Nils me suivait, comme prévu, une quinzaine de mètres en arrière. Il me fallut plus de temps que je ne le pensais pour rattraper mon double et ses petits camarades, mais il était encore en vie quand je les vis enfin, ce qui n'était pas si mal.

-Hep, les gars.

Je n'avais pas parlé très fort, mais je vis la petite colonne s'arrêter. Ils me regardèrent.

-Je dois parler au chef, c'est important, dis-je dans leur langue. Chef ! Chasseur insatiable !

Umettelig jeger. Chasseurs insatiables. J'avais réussi à prononcer les mots sans que la haine ne transparaisse de trop dans ma voix.

-Je suis un espion. Je sais pour Laïaga. Il ment !

J'essayais de mon mieux d'adopter un air agité malgré mon masque. Les Premiers Hommes avaient des espions alagaësiens à leur solde, c'était de notoriété presque publique. Mon petit doigt me disait qu'ils ne devaient pas souvent se balader masqués et en toute liberté dans Sombrenef mais je n'avais besoin de maintenir l'illusion que quelques secondes.

-Il ment il n'est pas Laïaga, dis-je en pointant le prisonnier du doigt.

Comment est-ce qu'ils avaient pu le croire ? Il n'était même pas humain bon sang ! Et surtout, comment est-ce que ce type pouvait avoir une voix de fausset pareille ?!

-Venez, chasseuse, à une carte, venez !

Je la pris par le bras en faisant mine de l'emmener avec moi, et sans attendre une seconde de plus, révélai la dague que je cachai au creux de mon poignet et tentai de la lui enfoncer dans le ventre.
Mais naturellement, ça ne pouvait pas être aussi simple. La femme avait eu un mouvement de recul instinctif quand je m'étais approché trop près d'elle et essayé de me repousser quand j'avais pris son bras.
Elle n'eut pas une grande difficulté à dévier mon coup, d'autant que je me sentais lent et maladroit. 
D'un revers de main gantée elle me gifla et je me sentis partir en arrière et venir m'affaler contre un mur. J'avais la tête qui tournait et la joue qui m'élançait sourdement. Du sang coulait sur mon menton. Je crachai par terre.

-Je suis Laïaga Sin'Saïan, dis en alagaësien cette fois, un sourire carnassier sur les lèvres qu'ils ne pouvait voir.

Et pendant l'instant de flottement qui suivit, je plongeai. Je feintai, faisant mine de sauter vers la chasseuse, avant de me projeter vers la droite. Je tombai sur l'imposteur, roulai avec lui, puis tranchait les liens de ses poignets et chevilles avec ma dague. Un coup de pied me cueillit dans les côtes et me fit voler une seconde fois, en me coupant le souffle, mais j'avais eu le temps de lui glisser l'arme dans les mains.

-JE SUIS...

Je jetai mon masque par terre d'un geste brusque.

-LAÏAGA SIN'SAÏAN ! hurlai-je à pleins poumons.

Voilà, en matière de diversion, ça devrait le faire, à toi d'en profiter mon petit Nils.
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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Ven 11 Juil 2014 - 21:06




La cohorte était arrivée au galop. Ni une, ni deux, il s’était fait entraver. A peine cette opération effectuée, on l’avait dressé devant la femme aux étranges lueurs. Toutes les armes qui pouvaient être pointées vers lui l’étaient à présent. Nul doute que les contes  étaient arrivés jusqu’à leurs oreilles. S’il n’avait pas eu son rôle à tenir, nul doute qu’il se serait débattu, mis à pleurer même. Mais il tint bon. Il fallait gagner du temps, c’était tout. Et prier. Beaucoup. Très fort.

Et il était arrivé…

Quand le personnage masqué avait fait son apparition, Keldar avait craint quelque bourreau venu le questionner sur place. Puis quand il avait dit être un espion, le doute l’avait assailli. Quel espion avouait en être un ? Et puis il avait repéré la manœuvre. Il exulta lorsque la femme arriva à portée du bras du guerrier, voyant déjà son corps glisser au sol. Mais tout ne s’était pas aussi bien passé.

Elle l’avait évité et il avait dû battre en retraite. Et il avait crié son nom. Pas de doute, ça l’avait interpellé, et même foutu en rogne. Laiaga ne laissa pas ses adversaires se ressaisir. En deux battements de cils, il fût à ses côtés. Ses liens tranchés, il lui mit un couteau dans les mains avant de repartir à l’assaut.

Keldar n’eut que le temps de plonger pour éviter un coup de taille. Ce qui lui permit de faucher les quelques chevilles à portée. Son coup fût récompensé par la chute d’un adversaire, mais il n’avait pas touché terre qu’il repartait déjà en avant. Laiaga les avait tous surpris et l’attention du reste des gardes était focalisée sur lui.

La femme s’était écartée avec ses deux gorilles pour le contourner. Sans réfléchir, Keldar courut en sens inverse, espérant la surprendre. Il tourna la tête pour essayer de la repérer derrière la cohue…

… et heurta quelqu’un de plein fouet! Il se releva prestement, dévisageant l’individu au sol. Sa tenue miteuse et sa frêle stature l’identifiaient davantage comme un taulard que comme un soldat. Ce qu’il était manifestement car à peine remis debout,  il s’enfuit en hurlant… entraînant une palanquée de combattants à sa suite !

Le chaos était total. La moitié des officiers se disputaient le commandement, sauf ceux pris dans les combats et l’étrange femme. Cette dernière rejoignait d’ailleurs les premiers, ralentissant un peu plus les gestes de Laiaga à chaque enjambée.
Keldar ne voyait pas d’échappatoire, il fallait s’enfuir. Prenant de vitesse les soldats restés en arrière, il sprinta dans le dos des assaillants.

Réaffirmer sa prise sur la dague. Lever. Planter. Relever. Replanter. Quatre hommes tombèrent ainsi sous ses coups, libérant un peu d’espace. La femme les avait presque rejoins. Pourvu qu’il ait assez de forces pour s’échapper…
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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Sam 6 Sep 2014 - 15:42


[pas très fan de mon post... j'espère qu'il te plaira x) je manquais d'idées^^']

C’était le bordel, il n’y avait pas d’autre mot pour désigner la situation. Une partie des Premiers Hommes étaient partis à la recherche de Nils, mais les renforts n’allaient pas tarder à arriver. J’avais perdu le type que j’étais venu sauver de vue, j’avais le visage en sang, mes côtes me lançaient douloureusement. Ce n’était pas la première fois que j’étais blessé, mais cela faisait longtemps que je ne m’étais plus senti si faible.
Je plongeai à nouveau de côté pour éviter un coup d’épée, mais trop lentement, et la lame s’enfonça dans mon bras et déchira mes muscles et ma peau. Je retins un cri avec un succès mitigé, les traits contractés à m’en faire mal, quand une dague se planta à l’arrière du crâne de mon agresseur, révélant l’étrange type qui n’avait pas l’air tout à fait humain, mon arme à la main.

-Ferme les yeux et respire plus, grinçai-je entre mes dents serrées.

Un battement, une seconde, le temps que les Premiers Hommes comblent la brèche qu’avait créée mon allié de fortune, c’était tout ce dont j’avais besoin. J’attrapai la sphère en métal encore accrochées à ma ceinture à côté d’un grappin et d’une poignée de kunais, battis nerveusement les morceaux de silex qui y étaient accrochés, et la laissai tomber tandis qu’elle se mettait à émettre une épaisse fumée blanche et opaque.

-Allez, viens !

J’attrapai l’intrus de mon bras valide et me mis à courir. Nous percutâmes plusieurs des gardes, mais le temps qu’ils comprennent que c’étaient leurs proies qui venaient de leur rentrer dedans, nous étions déjà trop loin, et plus nous nous éloignions, plus je sentais mes forces me revenir malgré ma blessure et le sang que je perdais.

-Je vais vous buter, magiciens ! rugit une voix féminine et furieuse dans la fumée, mais elle s’éloignait, signe que la chasseuse de mage allait dans la mauvaise direction.
-Là ! fit une autre, celle d’un soldat qui venait de jaillir du nuage opaque juste derrière nous.

<><><><><>

-Bon alors t’es qui en fait ?

Je chuchotais, recroquevillé une fois encore dans un des innombrables entrepôts de Sombrenef, caché derrière des barils plus gros que moi. Nous avions semé nos poursuivants pour le moment, mais l’ambiance sur le bateau était au branle-bas-de-combat. J’espérais que Nils s’en sortait, c’était quand même pour le sauver que j’étais là au départ, et même si mon compagnon et moi devions concentrer la plus grande partie de l’attention des Premiers Hommes, sortir de ce trou à rats ne serait pas une mince affaire pour lui.

-Et puis surtout… une idée de comment sortir d’ici ?

Il nous restait trois ponts à gravir pour arriver à l’air libre, et les couloirs grouillaient d’hommes en armes.
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Keldar


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Keldar
Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Ven 12 Sep 2014 - 13:24




Keldar avait perdu tout repère pendant la fuite. Et ce n’était pas faute de se défendre question orientation.

Laïaga était en sang, mais arrivait quand même à le traîner dans le dédale des coursives à un rythme effréné. Après plusieurs tours et détours et une poignée de fumigènes perdus, ils purent enfin se reposer dans un nouvel entrepôt.


- Bon, alors t’es qui en fait ?

La question semblait légitime. Le temps qu’il cherche par où commencer, une autre avait fusé, bien plus urgente.

- Et puis surtout… une idée de comment sortir d’ici ?
- Si je savais où on est, peut-être. Mais là, je suis complètement largué. Pour tout dire, je pensais plus à vous croiser en sortant, on ne peut pas dire que j’ai été très prévoyant là-dessus…


Il hésita à enchaîner tout de suite avec Trésor, mais préféra remettre le sujet à plus tard. Ils étaient partis des geôles, pas très loin du cœur de Sombrenef. Il leur restait au moins deux ou trois niveaux à gravir avant d’atteindre le pont et ils seraient vite contraints de bouger s’ils ne voulaient pas se faire coincer ici. Keldar avait suffisamment  parcouru les niveaux supérieurs pour pouvoir s’en sortir, du moins une fois que la panique serait retombée. On pouvait éviter des tours de garde assez facilement, mais se balader dans cette foire n’allait pas être une mince affaire.

- J’ai peut-être une idée mais on aura besoin de quelques accessoires…

L’entrepôt était plein de caisses et de barils les surplombant d’au moins deux mètres. Il ne savait même pas s’il serait capable de les ouvrir au grand jour, alors en toute discrétion…

- … ou alors …

Un éclat bleuté apparut soudain sur les murs. La chasseuse de mage était dans la salle. Tous deux se figèrent, respirant avec précaution. Le reflet s’intensifia au-dessus de leurs têtes, puis, après une pause s’amenuisa lentement. Au silence qui avait régné à son entrée, on pouvait déduire qu’elle avait abandonné son escorte, mais celle-ci ne devait pas être très loin. Keldar approcha son visage de Laiaga et chuchota :

- Elle doit être seule ou presque, non ? On en profite?
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Laïaga

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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Mer 24 Sep 2014 - 20:14


-On en profite ?

Je restai silencieux quelques secondes. Il fallait se décider vite. Mon étrange allié de fortune avait beau avoir une idée, on aurait du mal à s'en tirer tant que cette salope serait dans les parages... sauf que si je m'approchais d'elle mes forces allaient sensiblement diminuer. Ce n'était pas que perdre les capacités hors du commun que me donnait mon statut de d dragonnier : j'étais blessé. Les chaires avaient commencé doucement à se refermer, mais privé de la magie qui me gardait debout, je me retrouvais à nouveau handicapé d'un bras.

-Tu vas avoir droit au plus gros du travail, soufflai-je en retour. Je pourrai pas me battre. Tu fais le tour et je la distrais ?

Et je me mis à marcher, accroupi mais le plus rapidement possible, dans la direction supposée de la chasseuse de mages. L'entrepôt était grand et encombré, et je sentis sa proximité avant même que nous le la voyions, mon bras se mit à me lancer, et bientôt je le tenais plaqué contre moi sans pouvoir le bouger, les dents serrées, du sang gouttant en petit plocs discrets sur le plancher.
Je vis mon acolyte se séparer de moi, essayer de contourner la chasseuse. Le tout était maintenant d'attirer son attention sans que notre petite ruse vieille comme le monde ne soit trop évidente.
Je m'approchai donc aussi prêt que je le pouvais en étant sûr de ne pas commettre d'impair, et quand je fus suffisamment proche, je plaçai ma main sous mon bras blessé et ankylosé pour récupérer le sang, avant de le laisser tomber en plus grosses gouttes.
Plusieurs.
Ploc.
Ploc.
Ploc.
Une tension , un frisson, la chasseuse de mages m'avait entendu, j'en étais presque sûr. Je me cachai sagement, sans bouger, pendant quelques secondes, avant de risquer un nouveau regard. Elle avait repris sa recherche comme si de rien n'était, mais elle me guettait, alors je me rapprochai encore, et recommençai : ploc. Ploc.
Elle ne faisait mine de rien et moi je faisais mine de penser qu'elle ne m'avait pas remarqué. Je cessai mon petit jeu avec mon sang pour ne pas qu'il soit trop évident.
Et quand je fus assez près, elle se retourna, brusquement, sans prévenir, et son épée fendit l'air. C'était une épée de Premier Homme, longue et lourde, et le coup déchira comme du papier le bois du baril devant lequel je me trouvais. J'avais plongé de côté, mais des échardes me frôlèrent et m’égratignèrent. Le tonneau éventré déversa une marée d'olives vertes baignant dans de l'huile. Je fis mine d'essayer de me relever et de trébucher, de glisser au sol en essayant de m'éloigner, et de me retrouver acculé contre un autre fût.
Allez, viens me chercher, pensai-je, en levant un regard vaincu vers la femme.
Elle me fixait de ses yeux froids.
Ne te demande pas pourquoi je n'ai pas d'arme, pourquoi je suis seul, ne réfléchis pas trop...
Je la vis hésiter une demi seconde.
Je suis Laïaga et je suis faible, l'occasion ne se représentera pas ! Allez !
Et elle vint, répondant à mes prières muettes. L'instant de flottement n'avait pas duré une seconde, et la femme leva son épée de ses deux bras puissants en faisant un pas vers moi.
Allez l'ami, c'est le moment... maintenant... suppliai-je intérieurement.
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Keldar


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Keldar
Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Mer 1 Oct 2014 - 16:41



Aussitôt la consigne donnée, Keldar avait entamé la manœuvre de contournement. Il était ainsi passé derrière deux caisses et avait perdu de vue le guerrier. Il n’avait aucun mal à se déplacer en silence, les allées de ce côté étant dégagées. Le plancher craquait légèrement, mais rien qui excédait les couinements ordinaires de l’appareil.

Le problème quand on était dans l’action, c’était que le temps avait une fâcheuse tendance à se dilater. Ainsi, il ne s’était sans doute pas écoulé une minute avant que Keldar ne s’inquiète du silence qui persistait dans la salle. Laiaga aurait déjà dû intervenir. Se repérant aux reflets des runes, il amorça l’approche de sa cible. Celle-ci semblait enfin avoir fait demi-tour ! Mais comment s’y était-il pris pour le faire aussi discrètement ?

Enfin, les bruits du combat lui parvinrent, tous comptes faits trop forts à son goût. Il découvrit la scène à l’angle suivant : Laiaga gisait étendu au milieu d’une flaque de débris, son assaillante prête à le pourfendre. Keldar était bien trop loin pour l’arrêter à temps. Il se résigna donc à lancer son arme sur la runiste, quitte à s’en mordre les doigts plus tard. La dague traversa le pont pour rebondir sur son armure. Cela suffît à la faire hésiter.

Keldar s’était mis à courir dans sa direction avant même de connaître le résultat du tir. Il était presque sur elle quand son pied droit dérapa sur l’huile épandue au sol. Son pied gauche vint buter dessus dans la demi-seconde qui suivit. L’enchaînement se conclut avec le basculement de Keldar tête la première, ce qui permit deux choses : d’abord, d’esquiver le coup de taille qui lui était destiné, ensuite, de donner son coup de boule le plus mémorable dans les tibias de leur adversaire.

Pas que c’eût été d’un quelconque intérêt dans toute autre situation : les protections avaient encaissées la majorité de l’impact et Keldar se retrouvait au bord de l’inconscience. Mais le léger déséquilibre causé par le choc suffît, la graisse aidant, à provoquer la chute de la demoiselle. Dans un même mouvement, Laiaga et lui se précipitèrent pour l’empêcher de hurler. Ce que son regard vide révéla inutile.


- Euh… elle est morte de quoi ? Ah… euh… oui, allons-nous-en.
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Laïaga

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Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Jeu 6 Nov 2014 - 23:46


-Euh... elle est morte de quoi ?
-Ben...
-Ah euh oui, allons-nous-en.
-Riche idée, acquiesçai-je.

Je grimaçai en me relevant, après un dernier coup d’œil au cadavre. Au final elle était morte d'un tacle dans les chevilles.

-La dague ? demandai-je en tendant ma main valide vers mon compagnon d'infortune.

Je me penchai péniblement. La tête commençait à me tourner, je fermai les yeux quelques instants, la suite allait me demander pas mal de concentration et je n'avais pas intérêt à me louper. Je restai quelques secondes à observer les runes vaguement luminescentes, retins mon souffle, puis, en quelques gestes secs et précis j'en mutilai quelques unes, brisant les lignes soigneusement tracées, coupant les flux de pouvoir.
Et rien n'explosa. Je relâchai ma respiration et m'épongeai le front. Je sentis mes forces revenir assez rapidement et pus me relever sans avoir le vertige ; les runes de la chasseuse de mages, du moins celles qui annulaient ma magie, n'étaient plus.
Une main posée sur les barils encore entier au milieu du carnage, je me dirigeai doucement vers la sortie de l’entrepôt, la même que celle que la Jeger, et nous avant, avions empruntée.

-Euh... je soufflai. Personne, mais l'échelle la plus proche pour passer au pont supérieure est encore loin...

Je me renfonçai dans l'ombre de l'entrepôt, le regard dans le vague, dérivant sur les innombrables caisses de denrées alimentaires, matières premières.... des tonnes de caisses...

-Mais j'ai peut-être une idée. Une idée un peu débile mais au point où on en est... Aide moi à vider deux caisses, des grosses, peu importe ce qu'elles contenaient.

<><><><><>

-Et donc maintenant on se glisse sous les caisses... si si, me regarde pas comme ça. Allez, on a peut-être pas beaucoup de temps !

Je venais de vérifier une fois de plus le couloir, qui était toujours vide, mais tôt ou tard quelqu'un allait se demander où était passée notre Jeger assassinée et venir la trouver. Alors je rabattis ma caisse sur moi, et avançai à tous petit pas dans le couloir.
Nous avions fait deux petits trou, devant et derrière, pour observer les alentours. Et bon sang ça puait le hareng là-dedans ! Finalement, ce fut plus le bruit des pas qui nous alerta que nos trous d'observation.

-Quelqu'un vient, chuchotai-je en arrêtant de bouger.

Plusieurs minutes passèrent, le temps que la patrouille de gardes nous dépasse puis soit assez loin pour qu'on ne les entende plus. Heureusement ils n'avaient pas prêté attention à deux caisses isolées qui les observaient. Et c'est ainsi que nous arrivâmes au pied de notre échelle. Un dernier coup d’œil, et je me dépliai avec un soupir d'aise, repoussant la caisse en arrière.

-Celle-la monte jusqu'au pont ! m’exclamai-je à voix basse. Plus qu'à traverser une dernière zone ouverte, escalader les palissades qui entourent le navire, et nager cinq cent mètres jusqu'à la côte. On est sauvés !
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Keldar


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Une nef trop loin Vide

Keldar
Message Sujet: Re: Une nef trop loin | Mer 12 Nov 2014 - 22:48



Plus qu’à traverser une zone ouverte remplie de gardes, escalader les palissades avec l’armée à ses talons, et nager cinq cent mètres sous une pluie de flèche ! Le tout en espérant que nul autre jeger ne traîne dans les parages, bien sûr. Mais ce n’était pas si mal, ils étaient sauvés !

Keldar était d’ordinaire plutôt optimiste, et l’enthousiasme de son compère était contagieux. Sans compter que la balade en caisse l’avait rendu passablement hilare. Une escapade digne d’un conte d’enfant ! Mais ça ne suffisait pas à réprimer la crainte qui s’emparait de lui. C’était toujours quand l’objectif était à portée de main qu’il vous filait entre les doigts.

Ils n’avaient malheureusement pas le loisir de la réflexion, la coursive ne resterait pas vide éternellement. Ceci posé, une précaution ne ferait pas de mal.


- Très bien, je pense qu’à partir d’ici, il faut que je te confie quelque chose. Prends mon médaillon, c’est à cause de lui que j’étais à ta recherche. Je t’expliquerai plus tard pourquoi, mais tu as plus de chances de t’en sortir que moi, alors attrape !

Il l’ôta de son cou et s’apprêta à le lancer, puis se retint. Il l’approcha de ses lèvres et murmura :

- Je vais te prêter à Laiaga, d’accord ? Il va essayer de t’aider mais ne parle que s’il te le demande, d’accord ?

- C’est d’accord,
répondit-elle dans un souffle où perçait malgré tout l’impatience.

Il se retourna vers le guerrier.


- Pas de question pour le moment, c’est un peu… compliqué. T’as une adresse préférée pour se retrouver ?

Il lui tendit le précieux objet.  

- Bon, je passe en premier,  si ça ne te dérange pas. Je vais essayer de filer en douce. Je ne suis pas sûr que ce soit aussi aisé après ton passage. La taverne du port comme point de rendez-vous, ça te semble raisonnable ?

Keldar aurait aimé un coin plus sûr, comme l’apothicaire qui lui avait révélé sa destination, mais il ne savait pas encore si ce serait compromettre sa source. Même si Laiaga était réputé pour sa clémence, il préférait ne pas trop s’y fier en ces temps troublés. Quoi qu’il en fût, l’homme hésiterait sans doute à s’en aller avec Trésor une fois qu’il aurait découvert le pot-aux-roses. En espérant qu’ils s’en sortent tous les deux, cela allait de soi.  Pas de garantie, mais un peu d’espoir. Il avait déjà connu pire.  
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Une nef trop loin

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