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Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier]

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Laïaga

Dirigeant du Cam Serarna

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Laïaga
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Mar 3 Jan 2012 - 1:01


-Oh non, on ne va pas simplement attendre ! fit Ellenwen. Aucune chance. Le monsieur qui est là va maintenant retirer tout de suite la malédiction qu'il a jeté sur mon apprenti ! Tout de suite sinon je quitte le royaume des morts dans la seconde ! Quand elle sera retirée, alors on attendra. Et je serais sa seule garantie puisqu'il aura libéré l'autre personne.

Loin de là les félons attendaient. Oh, ils attendaient avec de plus en plus d’impatience, ils s’en seraient frotté les mains s’ils n’avaient pas été purs esprits, sept franc condensés de méchanceté et rien de plus. Mais ils l’étaient, alors ils se contentaient de jubiler en communion, car la reine des elfes entrait complaisamment dans leur jeu.

*Un marché est un marché non ? répondit Danakil. Je vais libérer Akkan.*

Et signer votre perte par la même occasion, je suis vraiment désolé, altesse, pensa sombrement Danakil. Mais il ne dit rien. Il se contenta d’étendre ses bras diaphanes devant lui, de se concentrer, et de commencer. Ellenwen ferma les yeux et s’adressa à Shaka, mais celui-ci mit plusieurs secondes à répondre à la reine des elfes : pour sa part, il ne perdait pas une miette du spectacle.
L’esprit de Danakil marmonnait, et si Shaka n’arrivait pas à comprendre ce qu’il disait, le simple bruissement des mots le faisait métaphoriquement frissonner. C’est ce langage qu’utilisent les Ombres, pensa-t-il pour lui seul. Le même langage que je parlais moi-même alors... J’en suis sûr, je le sens !

-Hein ? fit Shaka finalement. Excuse-moi tu disais ?... Ah oui cette histoire de don...

L’elfe blond haussa les épaules :

-Je ne sais pas qui est Dandelo et je ne sais rien des nouveaux dons de mon vieil ami... lui répondit-il avec un petit sourire.

Puis après un silence :

-... mais il ne m’a pas invoqué trente-six mille fois non plus, alors pour te répondre oui, j’étais bien là cette nuit à Teirm ! Il a réussi à défaire ce démon qui m’avait renvoyé ad patres ?

Ellenwen parlait, mais il n’écoutait que d’une oreille, enregistrant néanmoins ce qu’il disait, et puis il prenait des nouvelles qui l’intéressaient sincèrement : de quel don est-ce qu’elle parlait, qu’avait fait Laïaga récemment ; il était devenu empereur vraiment ?
Mais pendant ce temps Danakil défaisait son sort. Shaka ne comprenait ni les mots que l’elfe prononçait, ni les symboles qu’il dessinait inlassablement, mais son mauvais pressentiment ne cessait de grandir. Ce type n’avait certainement pas appris la langue des Ombres dans un bouquin, de son vivant. Et les Ombres n’étaient pas réputé pour leur propension à l’altruisme, ils ne livraient pas leur savoir gratuitement...

-Mais assez parlé de Laïaga ! fit finalement Shaka. Et Svean qu’est-ce qu’il devient ? Et Taya ? Et toi d’ailleurs ?

« Puise dans ma vie », c’était ça, il en était sûr. Une phrase qui revenait sans cesse dans les marmonnements de Danakil, qu’il avait fini par isoler puis, petit à petit, comprendre. Dans la langue qu’employait l’Ombre, la symbolique tenait une place importante, et « la vie » était tout aussi bien l’énergie vitale qu’employaient les Ombres pour faire leur magie, différente de la grammarie des elfes, plus malsaine.
Pourtant il avait beau tourner la chose de toutes les façons possibles, la suite des marmonnements avait beau varier à chaque fois que la première phrase se répétait, elle ne ressemblait jamais, ni de près ni de loin, à « délivre Akkan de son sort ».
Alors qu’est-ce qu’il pouvait bien raconter ? Rares étaient les morts qui auraient compris ce que faisait Danakil. Si Shaka avait été de ceux-là, il aurait reconnu les runes sans nom qui lentement délivraient Akkan. Pour vraiment saisir ce qu’il se passait, il aurait même fallu qu’il en sache un peu plus sur le Peuple Gris et au passage qu’il soit versé dans l’aspect technique de l’Ancien Langage, il aurait fallu enfin qu’il conçoive qu’on puisse recréer quelque chose d’approchant, avec d’autres symboles, une autre magie mais la même logique.
Mais Shaka ne savait rien de tout ça et ne pouvait donc pas comprendre que le plus gros des incantations de Danakil en langue d’Ombre visait à s’arracher à lui-même l’énergie qui permettait de donner leur pouvoir à ces pauvres palliatifs à l’Ancien Langage qu’étaient les runes sans nom.
Les runes étaient simplistes, la plus complexe était celle qui permettait de trouver un vivant que l’on connaissait, et puis il y avait celle qui permettait d’agir sur lui, et encore celle qui permettait de répéter une autre rune.
Mais même s’il avait connu toutes ces runes, Shaka n’aurait pas reconnu celles que Danakil avait créé par lui-même et qui utilisaient sa magie du temps. Alors il se retrouvait à essayer de comprendre quelques mots dans le marmonnement incessant de l’elfe. « Relie-moi », cela revenait souvent aussi, mais la suite était incompréhensible.
Et...

-Bon sang ! fit-il tout d’un coup.

Il se tourna vers Danakil :

-Espèce de connard... jeta-t-il. Pourquoi est-ce que tu fais ça ?

« Détruire », tel était le mot qu’il avait réussi à glaner dans le laïus de Danakil. Et la force qui essayait de l’évincer, qui allait grandissante, il n’avait plus aucun doute, c’était lui. Shaka avait renoncé à avoir l’air amusé, apparemment...
Oh non ils n’allaient pas simplement attendre, il allait confondre l’enflure qu’il avait en face de lui, Ellenwen décamperait enfin d’ici comme il le lui avait suggéré et l’elfe inconnu aurait perdu, quoi que puissent être ses objectifs.
Tout le monde serait content.
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Ellenwen

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Ellenwen
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Ven 6 Jan 2012 - 22:12


Les chuchotis la perturbaient. Si elle ne voyait aucun des signes tracer dans l'air, elle ne pouvait s'empêcher d'écouter la litanie qui sortait des lèvres fantomatiques du maître d'armes. Et de le retenir, malgré elle. Elle avait été formé pour apprendre et retenir la moindre incantation ou sortilège qui passait à sa portée. Et les vieilles habitudes étaient dures à perdre. Même si ces habitudes là lui faisaient froid dans le dos. Elle était sûre de reconnaitre le langage utilisé. Et sûr de ne pas du tout, du tout, du tout aimer ce que cela signifiait. Elle reconnaissait de l'ombrique même si elle n'en comprenait pas un mot. On l'avait trop souvent utilisé contre elle pour qu'elle en ignore encore les consonances. Quant à ce que cela signifiait... Désormais le doute n'était plus permis, Danakil n'était définitivement pas une personne fréquentable. Ni vivant, ni mort. Mais, dans tous les cas, elle n'avait pas le choix. Il ne lui restait plus qu'à profiter de quelques instants en bonne compagnie.

- Et bien disons que ton ancien ami a maintenant le pouvoir, plus ou moins contrôlé, d'influencer le temps. Mais je n'ai aucune idée de comment ça fonctionne, dit-elle avant que Shaka ne lui pose la question. Elle se sentait heureuse pour Laïaga que son vieil ami soit revenu pour lui cette nuit là. Elle pouvait déjà imaginer sa joie lorsqu'elle lui apprendrait la nouvelle. Mais appréhendait la tristesse qu'il allait devoir affronter. Pour le démon, je ne sais pas. Je n'ai jamais vraiment connu les circonstances de ta mort. Laïaga n'en parle jamais et je ne lui ai jamais posé la question. Mais je pense que oui. Je ne le vois pas laisser ton meurtrier en vie. A mon avis il l'a même torturé un brin histoire de lui faire passer le goût de la plaisanterie. Un des rares côtés de son ami qui lui fichait légèrement la trouille. Tu sais, tu lui manques vraiment. Elle soupira. Je pense qu'il s'en veut plus ou moins mais je ne sais pas trop pourquoi. Et je suis certaine qu'il ne pensait pas vraiment t'avoir invoqué. Il doit considérer qu'il a simplement donner corps au souvenir qu'il gardait de toi. Il est un peu bête parfois. Elle lui fit un sourire un peu triste.

Elle sentait que l'elfe ne l'écoutait pas vraiment. Son attention était tournée vers le sortilège en cours. Lui devait beaucoup mieux comprendre qu'elle ce qui se passait. Et à effleurer son esprit, il était inquiet.

- Je n'ai aucune nouvelle de Svean. Il a totalement disparu. Personne ne sait s'il est mort ou vivant. Quant à Taya... elle frissonna au souvenir de l'épouvantable rousse qui les avait torturé, elle et Laïaga dans les tours noirs, sombres et putrides de l'Empire. Elle se souvenait encore du goût de sang qui avait envahi sa bouche et de la terreur brute qu'elle avait ressenti en voyant le corps mutilé de son ami se tordre sous l'effet de la douleur. A cet instant, rien n'avait compté que la douleur qu'elle ressentait par leur lien mental. Rien que l'envie folle, incommensurable de le sauver. De partir et de fuir avec lui, de le protéger jusqu'au bout. La reine s'ébroua. Ce n'était pas le moment de rêver à ces instants passés. Je crois... je crois qu'elle est devenue folle. Totalement folle. Et effrayante. Quant à moi, je ne peux te dire grand chose. La moindre des mes paroles peut avoir de grandes conséquences dans ce monde. Et je ne suis pas pressée de rejoindre le votre. Je peux juste te dire ce que les esprits savent déjà. Je suis devenue reine des elfes, ce qui ne cesse pas de m'inquiéter et de me faire rire. J'ai récemment survécu à une petite visite des geôles de l'Empire en compagnie de Laïaga. Un moment d'anthologie par excellence. Fais le toi raconter par l'un des nombreux morts de cette petite fête. Et sinon comme tu vois, je visite du pays.

Brusquement, elle sentit l'elfe devenir plus lointain. Prudemment, elle rouvrit un oeil qu'elle darda sur son ancien ami. Il semblait inquiet. Plus qu'inquiet même. Elle secoua doucement la tête. Il s'inquiétait beaucoup trop pour une personne morte. Ce n'était pas bon pour son éternité. Aussi, lorsqu'il tenta de sauter à la gorge du maitre d'arme, elle le retint d'un mouvement du bras - totalement inefficace contre un fantôme, au demeurant.


- Ne t'inquiète pas, va. Je ne sais ce qu'il dit ni ce qu'il fait mais je ne crains rien de sa part. Il m'a parlé en ancien langage et même dans son monde, on ne peut mentir en ancien langage. Surtout dans son monde. Et comme c'est ma langue maternelle depuis plus de 1 500 ans, je sais qu'il n'a pas pu essayer de tricher. De toute manière, tu ne devrais pas tarder à partir. Je pense que l'incantation ne va pas tarder à prendre fin. Elle referma les yeux avant de désigner Danakil du menton. Ca s'entend à sa voix. Et je pense que tu n'aimerais pas être là quand les ennuis vont me tomber dessus. Je ne tiens pas à faire de ton éternité un enfer, même si je suis très touchée que tu sois déjà resté jusque maintenant. Va, si les méchants arrivent, je serais toujours de taille à me défendre. Et sinon, il sera toujours temps de revenir.

Elle lui adressa un sourire légèrement crispé mais sincère. Cela faisait déjà un moment qu'elle soupçonnait le piège. Depuis cette drôle de sensation juste avant que Danakil lui demande de rester. Et lorsqu'il avait demandé au dragon de partir. Et lorsqu'elle s'était souvenue que le maitre d'armes avait dit avoir demander de l'aide auprès de magiciens... sombres. Qui ne donnaient jamais rien sans rien. Mais elle était sûre de ne rien craindre. Rien de vraiment dangereux. Après tout, Danakil avait agi de son plein gré et même si les mages lui avaient demandé un tribut, personne n'avait le moyen de savoir que ce serait elle qui viendrait. Et elle ne voyait personne capable de la battre.
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Laïaga

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Laïaga
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Sam 14 Jan 2012 - 3:23


Qu’il parte hein ? Décidément c’était une idée fixe, personne n’avait envie de le voir ici, pensait Shaka. Danakil, pour ne pas qu’il protège Ellenwen, et Ellenwen, pour le protéger lui. Étrange non ? Il était mort pourtant, il ne craignait au final pas grand chose. Mais Ellenwen avait décidé de le protéger. Il haussa les épaules en détournant les yeux de l’esprit de l’elfe.

-De toute façon je n’arrive plus à rester... répondit-il à Ellenwen. Et je ne peux pas faire grand chose contre ce connard...

Ce n’était pas tout à fait vrai, mais à se battre contre Danakil il aurait épuisé ses forces pour quand les gros morceaux pointeraient le bout de leur nez. Même une fois mort, il pouvait s’épuiser. Or quand la merde se mettait à tomber, comme on dit, Shaka aimait bien être en-dessous.

-Enflure... jeta-t-il à l’elfe.

Et puis il disparut, comme un nuage de fumée se dissipe au vent, ne laissant nulle trace derrière lui. Le visage de Danakil, lui, restait de marbre. Il prononça encore quelques mots, illumina quelques symboles dans l’air du monde des morts, et se tut.
Il n’y eut ni effet de lumière ni grand bruit, simplement les runes disparurent comme avait disparu Shaka, emportées par un vent qui n’existait pas.

-Voilà, c’est fini, fit l’elfe. Ça n’aura pas été facile...

Il s’étira – sans doute un vieux réflexe rendu caduque par sa mort – et fixa sa reine dans les yeux :

-Votre apprenti est maintenant libre, dit-il d’un ton sentencieux, en ancien langage. Puisse ses actions vous libérer...

Danakil n’était pas très fier du sort qu’il réservait à Ellenwen, sa reine, mais il n’avait guère le choix. De toute façon, elle avait choisi son destin, elle ne pourrait s’en prendre qu’à elle-même... non ?

-Cette fois, il n’y a donc effectivement plus qu’à... attendre !
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Laïaga

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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Lun 16 Jan 2012 - 0:26


Shaka regarda Ellenwen en coin. Décidément, tout le monde ici semblait vouloir le voir partir, pour de plus ou moins nobles raisons. Un mince sourire en coin se dessina sur le visage du mort. Il ne pouvait pas lutter contre le monde entier, il avait déjà essayé, et il avait perdu.
Il hocha la tête à l’attention d’Ellenwen :

-Très bien, si tu insistes, je disparais !

Il avait parlé d’un ton enjoué, celui qu’il utilisait depuis le début, nonobstant l’intensité du moment. Pourtant il ne s’amusait pas ; oh que non ! Il n’avait jamais été aussi dramatiquement sérieux...

-De toute façon ce salop aurait fini par m’avoir, fit-il en désignant du pouce Danakil, dont le débit allait ralentissant.

S’il avait été en vie, on imaginait facilement les gouttes de sueur qui auraient perlé sur son visage. L’elfe semblait épuisé, ça se sentait plus que ça ne se voyait, et cela seul suffisait à prouver qu’il n’y avait pas que lui qui s’attaquait à Shaka. Cet elfe était puissant, mais pas assez pour tout à la fois agir sur le monde des vivants et sur celui des morts.
Mieux valait céder du terrain maintenant et sauvegarder ses forces pour quand la merde commencerait vraiment à voler, comme on dit.
Tandis que Shaka se dissipait comme de la fumée emportée par un vent qui n’existait pas, Danakil prononçait les derniers mots de son incantation. Ses bras retombèrent enfin le long de son corps tandis que sa voix s’éteignait. Trois symboles miroitaient, bleu glace, dans le vide. Danakil resta silencieux quelques instants.
Les instructions que représentaient ces symboles avaient déjà fait leur effet, Akkan était libre, le dernier fil de pouvoir si profondément entrelacé à son être venait de disparaître.

*Tu as fait ton œuvre, elfe, laisse-moi m’occuper de la reine.*

La voix dans sa tête était impérieuse. Danakil fit une grimace ; il n’aimait ni cet Ombre – le plus puissant de ces « amis » qu’il avait dû se faire pour intervenir dans le monde des vivants – ni ses six acolytes. Il n’aimait pas lui livrer Ellenwen, même s’il avait promis qu’elle serait libre une fois la mission d’Akkan terminée, il l’avait promis en Ancien Langage parce qu’il était sincère... Maintenant il était pris d’un doute... Ne l’avait-il pas piégée sans le vouloir ?

*Disparais ! fit encore la voix dans sa tête.*

Danakil ne répondit pas. D’un revers de main, il dissipa les sortilèges qu’il avait tracés en l’air, ces petits ersatz de magie, et si faible et, à leur manière, si puissant. Quelqu’un qui aurait goûté à ces runes et serait ensuite retourné parmi les vivants aurait pu découvrir le formidable potentiel qu’elles renfermaient. Mais, naturellement, on ne revenait pas souvent du monde des morts.
L’elfe disparut comme avait disparu Shaka, laissant Ellenwen seule et bien seule.
Il n’y avait plus ni brume miroitante composée d’esprits curieux qui l’observaient, pas plus que de fantômes diaphanes à l’allure humaine comme les deux qui lui avaient tenu compagnie. Ni de dragon miniaturisé, d’ailleurs. Au milieu d’une plaine monochrome où rien ne bougeait, où il n’y avait ni ombre ni vent et où le silence.
Ainsi vinrent les ténèbres : dans le silence. Ils étaient sept, et le nombre était magique. Dans ce monde où la magie, elle-même, n’existait pas, l’imagination et la conviction avaient un pouvoir fabuleux. Et sept, ce n’était pas rien. Si le silence avait été un son alors Ellenwen l’aurait entendu en cet instant.
Les pas des fantômes ne faisaient pas le moindre bruit. Ils formaient un cercle autour de l’elfe et se rapprochaient, en réduisant le diamètre, ils l’enfermaient, prisonnière de leurs desseins malsains. Que le monde est petit, pensait le chef des félons, celui qui se tenait en face de la reine des elfes. Oh oui après tout ce temps, quel drôle de hasard vraiment ! Il avait un sourire en coin sordide sur son visage charmant, ovale et raffiné. Ses yeux étaient plongés dans ceux, gris dans ce monde gris, de la reine.

-Ellenwen Ellanessë Svit-Kona, murmura-t-il en tendant la main vers son visage. Ça me fait si plaisir que tu sois là...

Images de sang, souffrance, sa mort brutale ! Il aurait dû la tuer. Pourquoi ne l’avait-il pas tuée déjà ? Pourquoi l’avait-elle tué ? Que s’était-il passé ; il ne se souvenait plus ; il tiqua. Elle n’avait pas changé, même regard, même visage, éternellement jeune... et vivante, bien entendu. Oh, si ses cheveux avaient viré au gris !
Ah mais non, qu’il était bête, c’était parce qu’ils étaient dans le monde des morts ça... parce qu’elle l’y avait envoyé. Son bras d’ectoplasme, bien entendu, ne rencontra aucune résistance.

-Je pense que tu vas rester un petit moment avec nous ma grande.

Il avait une voix douce et calme, comme s’il ne se rendait pas vraiment compte qu’il était entrain de promettre une éternité de tourments à quelqu’un. On imaginait sans peine la lueur de folie dans son regard, en un autre lieu et mille ans plus tôt.
Ses acolytes avaient déjà commencé leur œuvre, plus subtile que celle des esprits qui avaient tenté de détruire les intrus plus tôt, eux instillaient seulement une aura d’angoisse, une atmosphère de peur. Il suffirait d’une petite faille, d’une petite seconde d’inattention... Tant qu’elle était seule, loin du dragon et de l’esprit qu’ils avaient finalement chassé. Notre Ombre n’aimait pas cet esprit qu’il ne connaissait pas. Il avait l’air bien plus coriace que le paysan lambda, bien plus ennuyeux aussi. Mais il était parti, et Ellenwen ploierait.
Il ré imaginerait pour elle les multitudes de tourments qu’elle avait subi après qu’il l’ait abandonnée avec à la main l’épée qui avait occis ses parents. Il allait lui montrer tout ce qu’il avait appris en mille ans !

-Je n’ai jamais vraiment su, reprit-il, toujours aussi chaleureux : qu’est-ce qu’ils t’ont fait au juste, ces urgals ? Ils ont dû bien s’amuser non ?
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Ellenwen

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Ellenwen
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Mar 17 Jan 2012 - 23:00


Ellenwen rassura Shaka d'un nouveau sourire. Elle le sentait vexée. Sans même beaucoup le connaitre, elle commençait à bien anticiper ses réaction. Mais, après tout elle connaissait bien Laïaga et qu'on savait que ces deux-là s'étaient entendus comme larrons en foire... c'était... prévisible. Penser à son ami lui serra le coeur quelques secondes. Cela faisait des mois qu'ils ne s'étaient plus quittés, veillant l'un sur l'autre fébrilement. Depuis son évasion de la tour. Sa présence lui manquait.

*Le sevrage est difficile,* songea-t-elle dans un petit sourire.

Même, L'absence d'Akkan dans ses pattes en était déstabilisante. Elle pouvait presque entendre les multiples questions que le monde lui aurait fait posé. Quant à Sombral... non, elle avait bien fait de faire partir le dragon. Elle ne tenait pas à perdre le seul dragon avec lequel elle se soit jamais entendu ! Elle se retourna vers Shaka à nouveau, contemplant son visage légèrement crispé par l'effort. Elle aurait bien aimé qu'il reste, lui au moins. Elle se serait sentie moins seule. Elle ne craignait pas grand chose et était plutôt sereine. Mais au moins une présence amie à ses côtés aurait été la bienvenue. Elle soupira, secoua doucement et lui adressa une mimique affectueuse.


- Qu'on soit bien d'accord, je ne te chasse pas... Je ne veux pas t'impliquer dans des problèmes qui ne te concerne pas.

Elle ne savait comment le remercier d'être resté pour elle, au moins un peu. Parler dans ce monde vide et creux lui aurait semblé trop vain et inutile, aussi se contenta-t-elle d'effleurer son esprit, comme une caresse. Lorsqu'elle le vit disparaitre progressivement, elle inspira profondément, se forçant au calme et ferma à nouveau les yeux. Une brusque secousse ramena instantanément ses pensées à Laïaga. Il devait avoir appris. Ou au moins avoir vu Sombral, seul. Et au vu de ce qu'elle parvenait à ressentir, il n'était pas content. Pas content du tout. Elle sentait la peur et la douleur de son ami, comme s'il s'estimait trahi qu'elle ai pu le laisser seul, dans le monde des vivants. Comme s'il lui en voulait de ne pas avoir pu venir. Comme s'il aurait tout donné pour pouvoir la protéger. Je me fais des idées, songea-t-elle, mélancolique.

Le brouhaha de ses pensées envahissait totalement son esprit. Elle ne parvenait plus à distinguer les pensées de son compagnon au milieu de la foule de ses souvenirs, de ses interprétations et de ses espoirs. Elle tenta de se concentrer sur ce fil, sur cette lame de rasoir qui la reliait encore au monde des vivants. Pour le rassurer un peu. Pour se rassurer beaucoup. Sur le bord du fil, danse, danse le funambule...

L'elfe avait fini son invocation. Elle sentait la disparition du sort et de sa puissance. Puis, à son tour, elle le sentit disparaître. Elle était seule.Ses lèvres esquissèrent un sourire ironique. Le jeu allait commencer. Maintenant. Elle était prête. Après tout, elle avait soigneusement calculé chacun de ses risques et savait qu'elle ne risquait rien. Seul un petit chatouillement dans le bout de ses doigts lui rappelait combien elle détestait être seule. Combien elle aurait aimé ne plus jamais à revenir une solitude aussi totale, aussi désespérante, après son bannissement et ses centaines d'années d'errance. Elle s'étira paresseusement, un bras sur ses seins nus. Un calme étrange l'envahit. Elle. N'allait. Pas. Mourir. Elle referma son esprit sur lui-même, ne laissant plus qu'une mélodie courir dans son esprit. Elle se repliait sur elle-même, s'enfermant dans les méandres de pensées millénaires. Elle n'entendait plus que le silence. De loin. Tout était déformé et lointain. Elle veillait, immobile.

Sept fantômes. Sept fantômes qui venaient d'apparaitre, comme dans les contes et légendes d'autrefois. Les sept rois maudits revenus d'entre les morts. Elle n'ouvrit pas les yeux. Elle ne les scruta pas. Leurs esprits lui étaient indifférents. Tous lui étaient étrangers, froids comme la glace et lointains. Lorsqu'un souffle d'air lui effleura le visage, elle ne broncha pas. Quelques mèches de cheveux lui volèrent dans les yeux qu'elle écarta d'un geste de la main. Les paroles lui parvinrent dans un souffle, irréel. Leur sens se perdit un instant dans les brumes de son esprit et se dissipèrent peu à peu. Rester ? Pourquoi serait-elle restée ? Son neveu, son ami, son frère d'arme, son compagnon l'attendait ailleurs. Et Akkan, son presque fils. Et les elfes. Un peuple tout entier. Un peuple qui bientôt se réunirait près de l'arbre Menoa. L'arbre auquel une elfe avait donné sa vie. La vie qu'ils ne parviendraient pas à lui retirer. Le lien de Laïaga palpitait, vivant, et berçait sa transe d'une chaleur réconfortante. Seule la caresse des esprits sur le sien la maintenait encore présente. Mais ils ne l'auraient pas. Elle pouvait attendre. Elle avait l'éternité devant elle. Elle, elle n'était pas morte.

Je n'ai jamais su, au juste. Elle non plus ne savait pas. Les mots se délitaient, délitaient... Jusqu'à ce qu'une explosion de sens et d'images les fassent renaître, cruels et blessants. Urgals. Elle écarquilla les yeux brusquement, sortie de sa transe. Des urgals qui la trouvaient, blottie dans un fourrée. Des Urgals qui la saisissaient. Des Urgals qui l'attachaient. Et du sang, du sang qui coulait et séchait sur sa peau nue. Des entrailles qui la déchiraient, enduites de sel. Et des pattes, des pattes noires et velues qui parcouraient son corps, piquaient ses seins et s'insinuaient partout. Le son des pattes qui emplissaient ses oreilles et couvraient le son de ses propres hurlements. Et son ventre. Son ventre qu'aucun médecin elfe n'avait pu réparer et qui ne pourrait plus jamais concevoir d'enfants. Elle cria, revenue un millénaire plus tôt. Ses ongles s'enfoncèrent dans sa paume, lacérant sa peau. Un mince filet de sang rougeâtre se mêla à la crème argentée et goutta le long de son poignet.

Lorsqu'elle revint au présent, que ses yeux quittèrent le Du Weldenvarden et des visages portant des cornes, elle comprit qu'elle n'avait pas tout prévu. Et qu'au nombre de ses ennemis, elle en avait oublié un. Et de taille. Elle n'avait pas reconnu son esprit, l'ayant trop peu "touché" pour le reconnaitre. Sa voix n'était qu'un fantôme qu'elle ignorait. Mais ces souvenirs ! Et ce visage. Ces traits doucereux et délicats. La suavité de ses mains et de son corps. L'ironie de ses lèvres et la folie de son regard. Dans un geste protecteur, elle serra ses bras autour de sa poitrine et retint un gémissement. Ses ongles s'enfoncèrent plus fort. Elle ne parvenait pas à détourner son regard de son erreur. Le meurtrier de ses parents. Sa voie d'accès vers l'enfer.

Elle... Ne... cèderait... pas.
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Laïaga

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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Mer 18 Jan 2012 - 15:59


Ploc, ploc.
Deux petites gouttes de sang tombèrent des mains de l’elfe, le son sec dans cette immensité de silence sembla résonner, sinistre. L’Ombre ne le rata pas, bien entendu. Il eut un petit rire amusé en se baissant, posant un genou à terre devant sa proie.
Nue fière et fragile.
Il allait la briser. Ils s’étaient tous rapprochés maintenant, ils se tenaient à moins d’un mètre de la reine des elfes, la noyant sous leur aura délétère. Certains étaient si vieux qu’ils n’avaient même plus de nom ; tous étaient pleins de haine et de ressentiment, mais aucun autant que leur chef.
Ploc.

-Allons, tu te fais du mal ma jolie, ça serait tellement plus simple si tu te laissais aller, non ?

Pour les sept, cela le serait assurément ! L’Ombre tournoyait autour de l’esprit d’Ellenwen, mais il n’y décela nulle faille encore. Cela viendrait, cela viendrait bien assez tôt, Ellenwen ne quitterait pas ce monde, il avait le pouvoir de la retenir... Quelle importance alors qu’elle tienne des heures ou des jours ? Cent ans ce serait encore du pareil au même !

-Tu sais, tu te ménages quelques heures de combat avant ton calvaire éternel... Mais qu’est-ce que c’est, quelques heures, devant l’éternité ? Épargne-nous de la peine à tous et commençons tout de suite !

Il partit d’un éclat de rire cristallin. Ellenwen était seule et ils étaient sept. Il ne pouvait instiller d’images affreuses dans son esprit trop bien protégé après tant de siècles d’entraînement. Non en fait, même avec des siècles derrière soit, rien ne justifiait une telle efficacité.
Elle était tellement plus faible la dernière fois qu’ils s’étaient vus !
L’Ombre était contrarié, mais lui n’était pas un amateur non plus, et il n’en laissa absolument rien transparaître. S’il ne pouvait abattre les défenses de son esprit par la force brute, il l’aurait autrement voilà tout. L’éternité, c’est long, comme on dit.

-Alors tu ne veux pas me raconter ce que t’ont fait ces urgals ? reprit-il, toujours sur ce ton décalé de conversation, qui aurait convenu pour parler de la pluie et du beau temps. Quelles choses affreuses, raconte moi ? Ces bêtes ne sont pas très fines, rien de recherché je suppose ?

Il fit mine de réfléchir, ses doigts caressant distraitement les bras de la reine croisés devant sa poitrine, comme s’il avait voulu la réchauffer, la rassurer. Lui dire qu’elle n’était pas seule. Sauf qu’elle était seule et bien seule. Est-ce qu’elle avait conscience que personne ne viendrait la chercher ? L’Ombre eut un petit sourire de contentement qui illumina tout son visage.

-Les connaissant ça m’étonne que tu sois encore en vie, ils ont dû te charcuter, comme un bout de viande ! Leurs lames qui s’enfoncent partout, qui découpent, qui déchirent... Et puis les os brisés ? Est-ce qu’ils avaient de cette huile... comment on appelait ça déjà... de l’huile de sorcière ?

Il laissa passer un silence, savourant son petit effet, car la souffrance des autres avait toujours été son petit plaisir, et celle d’Ellenwen était une obsession depuis bien longtemps, avant d’enchaîner :

-Hé bien sache qu’ici ce sera mille fois pire, car tu es seule, et pour toujours !

Et les esprits des sept semblaient chuchoter des mots tandis que leur chef parlait. Ce n’étaient pas toujours des mots compréhensibles, mais jamais des mots agréables, c’étaient des mots visqueux et rampants, ou des mots velus, avec trop de pattes et d’yeux, des mots répugnants, effrayants ou blessants. Des mots comme des armes.
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Jeu 19 Jan 2012 - 20:31


La douleur irradiait dans son poignet, allant et venant au rythme de ses battements de cœur. Elle la sentait qui remontait, sourdement, jusqu'à envahir son bras, son épaule et toutes ses pensées. Elle inspira profondément et enfonça plus profondément ses ongles dans sa chair. Elle savoura la souffrance, sa vieille compagne. Elle se sentait en vie. Plus vivante que jamais dans ce monde où tout était mort. Elle se raidit et referma les paupières pour évacuer les dernières images persistantes de la torture. Lorsqu'elle les rouvrit, elle décroisa lentement les bras et plongea son regard dans celui de l'ombre. Elle ne le craignait pas. Cela faisait bien longtemps qu'elle ne le craignait plus. Depuis que sa colère et sa rancœur avait pris le dessus. Elle lui sourit, les mâchoires serrées.

- Et si, une nouvelle fois, tu reconnaissais que tu ne peux rien contre moi ? Je t'ai déjà tué une fois, ne m'oblige pas à t'infliger une deuxième défaite.

Elle bougea légèrement, s'installant plus confortablement. Elle décrispa progressivement ses mains, regardant le sang ruisseler le long de ses poignets. L'idée de rompre son serment, de fuir le monde des morts pour échapper à ses ennemis, lui sembla soudainement si absurde qu'elle esquissa un nouveau sourire. Comme si elle avait la moindre chance de perdre contre celui qu'elle avait déjà vaincu.

- Oui, tu connais bien le concept, toi qui es mort en quelques minutes. Quelques minutes de honte et de souffrance avant l'éternité... Mais personnellement, ça me tente moyennement.

Elle lui sourit, mutine. Quitte à passer quelques instants d'éternité au milieu d'ennemis, autant en profiter pour les faire rager une dernière fois. Elle désigna du bout des doigts les six autres esprits.

- Ainsi, tu t'es trouvé des amis... Que leur as-tu promis pour qu'ils te suivent ? Tu comptes leur profiter des tes incroyables pouvoirs ? Ils doivent être bien naïfs de croire que tu leurs laissera des miettes... Enfin, après tout, je ne vois personne de sensée te suivre. C'est le malheur des faibles.

Toutefois, lorsque l'ombre effleura son bras, ses doigts diaphanes non loin de ses doigts, elle ne put se retenir de tressaillir. Un goût amer de bile lui remonta dans la gorge. Trop de mauvais souvenirs restaient liés à sa présence. Des souvenirs de folie, des souvenirs de tentation. La dernière fois qu'elle avait croisé le fer avec lui, elle avait failli céder à ses ténèbres personnelles. Une nouvelle fois, elle avait été tenter de redevenir Serkëlunea, l'elfe de sang, meurtrière et implacable. Celle que la souffrance accompagnait et qui ne connaissait personne d'autre qu'elle-même. Pendant une poignée de minutes, elle avait été tentée par ce beau visage aux yeux rouges, par ces lèvres moqueuses.


- Ne me touche pas !

Elle avait réagi plus vivement qu'elle ne l'aurait voulu. Elle inspira, tremblant légèrement. Elle devait se reprendre. Elle devait effacer de sa mémoire tous ces souvenirs. Et oublier ce que les urgals lui avaient fait subir. Elle serra la mâchoire, les yeux brillant de haine.

- Tu n'imagines même pas ce qu'ils ont pu me faire subir. Toutes tes petites suppositions sont tellement minables !

Elle approcha son visage du sien jusqu'à effleurer ses lèvres. Aurait-il été vivant, il aurait pu sentir le souffle de la jeune femme.

- Tu n'égaleras jamais ce que j'ai pu subir ce soir-là. Jamais, tu m'entends. Tu ne pourras jamais plonger tes mains dans mes entrailles ou me violer pendant des heures. N'oublie pas que tu n'es plus qu'un esprit. Un fantôme venu du passé qui n'a plus aucun pouvoir. Tes mains ne peuvent me toucher, ta dague ne pourra jamais me pénétrer. Tu n'es plus rien.

Sentant sa colère monter, elle expira lentement, sans desserrer les dents. Elle se concentra sur son esprit quelques instants, repoussant les insinuations visqueuses et gluantes qui émanaient des six esprits. Un tiraillement détourna quelques instants son attention. Pendant quelques secondes, elle demeura surprise, sans arriver à déterminer ce qui la dérangeait. Laïaga ! Elle avait oublié Laïaga ! Pendant quelques secondes, elle resta indécise. Elle ne pouvait se résoudre à repousser son ami. Il était là-bas, chez les vivants. Il lui semblait que, si elle coupait le lien, elle ne pourrait jamais le rétablir et que jamais elle ne pourrait le revoir. Elle se tordit les mains, nerveuse. Elle ne voulait pas le quitter.

Une voix la fit sursauter. L'ombre l'observait, conscient de sa faiblesse. Elle n'avait pas le choix. Avec une nouvelle mimique de haine pure, elle coupa doucement le lien qui l'unissait avec son ami, avec une tendresse et un regret infini. Le seul lien qui la rattachait encore à la vie. Le seul lien qui pourrait la mener à la mort. Maintenant, elle était vraiment seule. Une vague de terreur et de colère la révolta. Elle dévisagea un à un les esprits qui l'entouraient et murmura :


- Alors, vous voulez jouer ?

Elle était peut-être seule, mais son esprit était un diamant sur lequel les ombres se briseraient inéluctablement. Une nouvelle bouffée de colère lui rougit les joues. Elle avait dû abandonner Laïaga. Son compagnon. Ses lèvres se retroussèrent, dévoilant ses dents en une grimace animale. Et, à son tour, elle attaqua, son esprit assaillant celui de ses assaillants.
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Ven 20 Jan 2012 - 0:55


L’Ombre n’avait pas imaginé qu’elle réagirait comme ça. Il avait tellement appris, depuis leur dernière confrontation, et ils étaient sept bon sang, il était sûr qu’ils l’anéantiraient en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire.
Il fallait croire qu’Ellenwen n’était pas de cet avis.
Mais l’Ombre avait appris la patience, pendant tout ce temps, et aux remarques acerbes de l’elfe il répondait d’un sourire et d’un ton calme, toujours mesuré et sûr de lui.
Elle pensait donc le faire sortir de ses gonds ? Quelle drôle d’idée ! Pourtant ses mots la touchaient, il devait bien se l’avouer, même s’il n’en montrait rien et cachait tout cela derrière une façade d’arrogance. Elle l’avait tué, en effet, et physiquement, il ne pouvait rien lui faire ; il était impuissant. Physiquement . Elle l’avait vaincu, elle l’avait bien eu, mais contrairement à ce qu’elle semblait croire il ne s’en cachait pas : il voulait juste lui rendre la monnaie de sa pièce et il avait une conscience aiguë de sa capacité à le faire.

-Ne me touche pas !

Elle n’avait pas crié, mais n’en était pas loin non plus. Elle tremblait. Pendant un instant le sourire de l’Ombre n’eut plus rien de raffiné et d’amical. Ce fut un sourire de monstre, de ceux qui dévoilent les canines et qui font peur. Et puis tout redevint normal.
Il venait de marquer un point. Je viens de marquer un point, pas vrai, ma belle reine des elfes ? Quoi que tu puisses en dire, le premier sang est pour moi...
Comme toujours.

-Tu n’imagines même pas tout ce qu’ils m’ont fait subir, reprit Ellenwen, tes petites suppositions sont tellement minables ! Tu n'égaleras jamais ce que j'ai pu subir ce soir-là. Jamais, tu m'entends. Tu ne pourras jamais plonger tes mains dans mes entrailles ou me violer pendant des heures. N'oublie pas que tu n'es plus qu'un esprit. Un fantôme venu du passé qui n'a plus aucun pouvoir. Tes mains ne peuvent me toucher, ta dague ne pourra jamais me pénétrer. Tu n'es plus rien.

L’Ombre se releva brusquement, une main posée sur la poitrine, l’air sincèrement blessé bien que, encore une fois, ce ne soit qu’un jeu d’acteur. Les Ombres étaient plutôt doués pour ce genre de petits jeux.

-Moi, minable ?

Il eut un de ses petits rires, qui devaient être, ou en tout cas il l’espérait, particulièrement exaspérant pour la reine des elfes.

-C’est si facile à dire, quand on n’a plus que ça pour se défendre : les mots.

Il tournait doucement autour d’elle, ses doigts glissaient, de ses bras sur son épaule, son omoplate, sa nuque, toujours avec une étonnante douceur. L’Ombre s’arrêta derrière Ellenwen. L’Ombre s’accroupit. Ellenwen tremblait toujours :

-Pourtant, je n’ai pas l’impression de te laisser si insensible, pour quelqu’un d’impuissant...

Il avait murmura ses mots au creux de son oreille. Et tout en parlant, lui et ses silencieux acolytes continuaient de traquer la faille, de sonder et d’essayer de saper ses défenses. Ils avaient peut-être bien détecté un tout petit rien, une minuscule imperfection, une faiblesse que sa carapace présentait et ils allaient...

-Alors, vous voulez jouer ?

L’Ombre tituba en arrière, manquant perdre l’équilibre sous la violence de l’attaque. Il prit enfin conscience d’à qui il s’attaquait. Imperceptiblement, dans une douceur étonnante, la faille avait disparu, l’esprit de l’elfe s’était refermé comme une carapace, et elle avait frappé.
Elle les avait frappés tous en même temps, repoussant les miasmes parasites qu’ils essayaient d’étendre à son esprit avec une brutalité insoupçonnée. Les sept compères reculèrent, titubèrent, certains posèrent un genoux à terre dans un geste réflexe vestige de leur vivant.

-Anéantissons-la, fit l’un d’entre eux entre ses dents serrées.

Le sourire qui déforma le visage de l’assassin des parents d’Ellenwen était le reflet du rictus bestial qu’arborait la jeune femme.

-Oh que oui, fit-il d’un ton sardonique, bon dieux oui ALLEZ VAS-Y DECHAINE TOI ! lui hurla-t-il en étendant les bras.

La conscience, létale et adamantine, de l’elfe, virevoltait et fonçait insaisissable telle qu’elle avait appris à l’être pendant cette longue, longue vie. L’Ombre prit le choc de plein fouet et son image fantomatique sembla se troubler. Et il rit encore. Il riait et criait, l’accaparant bon gré mal gré, de son mieux, tentant d’occuper sa conscience et de la forcer à l’attaquer pendant que ses compères faisaient pression, encore et encore, avec une constance qui confinait au sadisme.
Les chocs étaient une litanie, celles qu’ils avaient récité toute leur vie, une litanie de souffrance et de malheur et ils ne s’en lassaient pas, ils étaient déterminés à anéantir cet esprit trop rebelle, et l’Ombre lui criait, menaçait, fourrageait dans les vieilles blessures qu’Ellenwen traînait en elle, il lui reracontait les lames dans son corps, le dégoût la douleur l’envie de mourir que ça finisse enfin, la honte l’exil aussi, la solitude. La torture qu’est la solitude.
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Sam 21 Jan 2012 - 15:50


Elle le voyait. Elle voyait sur le visage de l'ombre sa satisfaction, son intime conviction qu'il allait gagné, qu'il avait déjà gagné. Comme si un éclat de voix, un instant de colère et de folie pouvait la faire céder. Comme si elle n'avait jamais connu pire tout au long de sa vie. En 1 500 ans, elle avait eu bien plus peur, bien plus mal. Et elle n'avait cédé qu'une seule fois, perdant à la fois conscience et raison. Et là elle était bien loin du compte, bien loin de céder à ses minables insunations. La colère l'avait toujours sauvé, fouettant son esprit et sa magie, la rendant plus forte et plus dure. Elle le sentit se glisser derrière son dos, sentant son corps frôler le sien. Elle retint un nouveau frisson et esquissa un sourire.

- Des mots ? Qui se saoule de paroles et de bruit depuis qu'il est arrivé ? Qui vante sa supériorité sans arriver à me faire céder ? Tu es trop amusant, l'ombre, et bien naïf si tu crois que je n'ai que les mots pour me défendre.

Elle se retourna lentement, laissant l'ombre caresser ses bras et son corps, comme si le fantôme qu'il était devenu pouvait encore exercer sur elle la moindre attirance. Comme si ces lignes insaisissables et fluctuantes et translucides pouvaient rendre l'ancienne souplesse de son corps et sa sensualité. A tout prendre, elle préférait encore imaginer coucher avec Pierrot - idée qui la laissait aussi perplexe que dégoutée. Il pouvait toujours s'amuser pour la faire fléchir.

- Pardon, je me souvenais de ton ancienne beauté. Un petit frisson d'horreur à la vue de ce que tu es devenu. C'est terrible ce que la mort peut faire des corps les plus beaux. Dire qu'autrefois, tu m'as semblé attirant... Laisse moi rire !

Comment couper l'herbe sous le pied à un nuisible, lui retirer les miettes de repas qu'il voulait dérober. Ne pas se laisser devancer. Attaquer, reculer, se protéger. Et ne jamais céder. Lorsqu'elle les vit tressaillir, lorsque la surprise déforma le visage douceureux de l'ombre, elle s'autorisa un rire narquois et moqueur. Elle sentait forte et puissante. Elle était forte et puissante. Elle se rapprocha de son ancien ennemi, posant deux doigts sous son menton et le fixa dans les yeux.

- Alors, tu veux jouer à ton jeu ? Tu es prêt à t'amuser avec moi ? Tu as peur, n'est-ce pas ? Tu te souviens enfin que tu ne peux me battre. Vous êtes sept, je suis seule. Et pourtant aucun de vous ne réussit à me blesser. Tous vos murmures de haine et de colère, je les connais déjà. J'ai vécu l'enfer et j'en suis revenue. Que croyez-vous pouvoir me faire ?

Elle se redressa et étira ses membres las, provocatrice. Puis, lorsque l'ombre éclata de rire, entrant dans son jeu, entrant dans la ronde, elle se rassit lentement et se retira une nouvelle fois, cloisonnant son esprit. Elle était elle-même. Elle était en elle. Et chaque mots de douleur que lui envoyait les ombres venaient se dissoudre dans son passé, son présent et son futur. Tout cela elle l'avait déjà vécu, l'avait déjà accepté et ne l'avait jamais oublié. Que croyaient-ils pouvoir faire ? Croyaient-ils vraiment ranimer des anciennes déchirures là où il ne restait que des cicatrices, déjà fermées et vieillies. Elle n'attaquait pas. Pourquoi l'aurait-elle fait ? Pour se débarasser d'eux ? On ne se débarasse pas des cafards. On les chasse un instant, avant de les voir grouiller à nouveau. Et se fatiguer à les tuer, c'était les laisser gagner. Elle pouvait attendre. Bientôt Akkan tuerait la bête, bientôt elle serait libre. Elle n'allait pas gaspiller ses forces.



(mon texte est justifié là Razz )
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Laïaga

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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Dim 22 Jan 2012 - 15:01


-Que croyez-vous pouvoir me faire ?

Elle s’était calmée, une première attaque hargneuse et puis plus rien, comme si elle s’était rendu compte qu’elle ne faisait qu’accélérer sa perte en agissant ainsi.
Et voilà qu’elle posait une bien vaste question... Tout ce qu’il pouvait lui faire... Ah, si elle savait ! Il se délectait déjà de l’expression qu’elle aurait, de son regard, peut-être même de ses cris ? Il en doutait, bien que cela lui aurait fait énormément plaisir.

-Je pourrais... je pourrais...

Encore une fois il fit mine de réfléchir. Les sept acolytes avaient cessé leurs attaques : si Ellenwen ne faisait pas le premier pas, ils y gagneraient plus à maintenir une pression constante et subtile qu’à lancer des assauts brutaux et erratiques.
Ils l’auraient, pour eux cela ne faisait pas le moindre doute, tôt ou tard. Par télépathie ils discutaient de ce qu’ils lui feraient quand ils auraient réussi, de commencer ils se vengeraient de tous les efforts qu’elle leur imposait, de commencer elle réagirait, ils en riaient comme de vieux amis qui s’en racontent une bien bonne.

-Je pourrais te saouler de peur et de colère, tant et si bien que tu ne serais plus que ça, peur et colère, une créature plus même humaine, ni morte ni tout à fait vivante, cela serait déjà bien.

Il était maintenant debout, évanescent, il faisait les cent pas en levant les doigts pour accompagner son énumération.

-Ou bien je pourrais fouiller et ravager ton esprit, quand tes fantastiques protections auront fini par céder, je pourrais retrouver tout ce que tu détestes, te faire vivre ou revivre tes pires souvenirs et tes pires cauchemars, encore et encore et encore... Ça aussi ça serait pas mal du tout ! Ou encore...

Il dressa cette fois-ci le majeur pour accompagner ses mots. Ses mots étaient actuellement sa seule arme, tant que les défenses d’Ellenwen n’auraient pas été abattues, et il était décidé à lui montrer qu’il savait jouer d’eux comme d’une lame.

-...je pourrais retrouver tes amis, et leur faire du mal.

Son sourire s’était élargi tandis qu’il fixait la reine des yeux, intensément.

-Comme j’ai fait du mal à tes parents, ma petite Ellenwen ; c’était le bon temps ! Il y aurait bien le vieux Pierrot, tu sais, celui avec qui tu venais les fois précédentes. Je serais curieux de savoir pourquoi il n’est pas là celui-là... Tu crois que je peux attendre qu’il nous rejoigne de lui-même ? Qu’il tombe dans une sorte de petit piège dont tu serais l’appât ?

Il recommença de faire les cent pas, et il traçait maintenant des symboles dans l’air immobile du monde des morts. Les symboles ne voulaient rien dire, mais il aurait été bien étonné qu’Ellenwen soit capable de s’en rendre compte : tant dans leurs formes que dans la façon dont ils subsistaient quelques instants en flottant, ils semblaient identiques à eux qu’avait utilisé Danakil.

-Mais j’y pense, il y a aussi Laïaga... Ah Laïaga Sin’Saïan, le sorcier, il pioche si volontiers dans les esprits de ce monde pour mener ses petits combats, ce serait tellement facile de l’attraper au vol ; c’est qu’il s’est fait quelques ennemis puissants, lui aussi. Quel effet ça te ferait de les voir souffrir à cause de toi, hum ?

L’Ombre cessa brusquement de marcher, et se tourna à nouveau vers Ellenwen. Entre elle et lui plusieurs symboles dénués de sens finissaient de se déliter.

-A moins que je ne leur lance le même de sort de mort que ce qu’a fait Danakil a ton apprenti ? Quel genre de fin serait la plus atroce pour ces deux-là dis-moi ?
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Ellenwen

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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Dim 22 Jan 2012 - 18:23


L'ombre déambulait devant elle, fièrement. Il ressemblait un renard entré dans un poulailler après avoir déjoué la vigilance des chiens de garde. Ellenwen le regardait, placide. Il lui rappelait trop les quelques stratèges elfes qu'elle avait croisé à Ellesméra pour vraiment s'inquiéter. Surtout en se sachant parfaitement en sécurité. C'en était presque risible de prétention et de stupidité. Un instant, elle hésita à lui répondre. Il ne demandait que cela et elle ne tenait aucunement à lui faire ce plaisir. Mais le jeu l'amusait. Et puis, s'il lui restait à attendre quelques heures avant qu'Akkan n'accomplisse son devoir, elle allait devoir meubler le temps qu'il lui restait.

- Tu ne serais pas un peu ambitieux ? Une éternité de colère et de souffrance... grandiose ! On dirait presque que tu y crois. Sérieusement, combien de temps crois-tu que mon apprenti mettra pour tuer son monstre ? Un an, deux ans ? Non ! Dans quelques heures tout au plus, tous se seront mobilisés pour le tuer et rien ne me retiendra plus ici. Et adieu la compagnie.

Elle bailla tranquillement, ne prêtant qu'une oreille distraite à ses paroles. Elle promena son regard sur les six autres complices, cherchant parmi eux quelqu'un qu'elle aurait pu connaitre. C'était rassurant de constater qu'elle ne semblait guère compter d'ennemis parmi les morts à l'exception de l'enfoiré aux yeux rouges. Ils avaient arrêté leurs lamentables provocations et semblaient attendre quelque chose. Comme si les mots pourraient la provoquer.

- Hé oui mon grand, le maitre mot de tout ça, c'est quand... Quand tu auras réussi et pour le moment, tu es loin du compte tu sais. Quant à mes pires souvenirs, mes pires peurs... Ils appartiennent au passé. Tu ne pourrais les réveiller.

Elle ferma à nouveau les yeux, cherchant dans son esprit la moindre des peurs qui pourraient ressurgir à l'improviste. Mais toutes étaient domestiquées, calmées et ne pourraient leur servir d'armes. Elle ne voyait rien qui puisse l'inquiéter, dans ce monde perdu. Aussi, lorsque l'ombre parla de ses amis, elle éclata de rire, malgré la contrariété provoquée par le souvenir de ses parents.

- Mes amis ?! Comme si tu pouvais les toucher d'ici. Tu as déjà eu beaucoup de chance de pouvoir atteindre mon apprenti et qu'il n'ai pas eu les compétences de pouvoir se défendre. Tout le reste... Ils te renverraient dans ce monde d'une simple pensée.

Elle gloussa en imaginant Pierrot, une marque d'horloge sur son épaule. Quant à imaginer Pierrot tomber dans un piège, juste pour le plaisir de venir à son secours... Pierrot était au Surda, ses espions lui avaient appris. Des espions ? Moi ? Jamais ! Et le temps qu'il apprenne ce qu'elle risquait, elle serait déjà sortie de là, comme elle s'était sortie elle-même de la guilde des ombres. Cela faisait déjà quelques temps qu'elle ne comptait plus sur lui pour la tirer d'un mauvais pas. Quelques temps qu'il était trop pris par le pouvoir et par son trône pour s'occuper de sa vieille amie. Quelques temps qu'en réalité elle avait commencé à se détacher de lui. Penser à lui, coincée dans le monde des morts, lui fit soudainement prendre conscience, non sans un pincement au cœur, qu'il n'était plus l'homme qui l'avait recueilli, à sa sortie de la forêt, et qu'elle avait aimé. Ce n'était plus qu'un vieil ami... et un allié.

- Tu es mal renseigné, l'ombre. Pierrot ne tomberait pas dans un piège aussi grossier. Et quand bien même le ferait-il que tu n'aurais plus aucune chance, plus aucune, de pouvoir me réduire au silence.

Elle rouvrit les yeux, un instant, regarda les signes qui flottaient dans l'air et esquissa une moue sceptique. Elle ne ressentait aucun pouvoir émaner d'eux, rien que des vestiges de volonté pour les maintenir visible. Si l'ombre avait voulu l'effrayer, il avait une nouvelle fois raté son objectif. Elle se sentait, et se savait invulnérable. Briser l'esprit d'une elfe plus que millénaire n'était pas à la portée de n'importe qui.

Alors qu'elle commençait de nouveau à se détendre et à se replonger dans sa transe quand un nom la fit tressaillir. Des replis de son esprit rejaillit soudainement l'ancienne peur qui l'étreignait depuis qu'elle avait failli perdre Laïaga dans un cachot sombre, torturé et ensanglanté par sa propre faute. Elle manqua une inspiration et émit une petite toux. Laïaga Sin’Saïan. Elle qui n'avait probablement jamais su le nom de famille de son neveu... Son neveu... Elle frissonna. Elle, elle avait peur pour lui. Oh, il n'était pas beaucoup plus vulnérable que Pierrot, lui non plus n'était pas n'importe qu'elle magicien venu. Mais lui, lui était sorcier. Lui était un de ces fous qui l'effrayaient tant et qui jouait avec la vie et la mort. Dans ses yeux à lui elle avait vu briller une tendresse fascinée pour le monde des morts. Elle rit, mais son rire sonna faux.


- Laïaga Sin'Saïan. Voilà longtemps que je n'avais entendu ce nom... Enfin, si cela te fait plaisir de gaspiller tes forces pour tuer un magicien d'élite qui m'indiffère...

Laïaga... son neveu qu'elle protégeait depuis si longtemps. Et qui viellait sur elle. Pour la première fois, elle se sentit vraiment seule. Son neveu... Brusquement, une pensée malveillante la fit tressaillir. Relevant les yeux, elle surprit un sourire de victoire naitre sur les lèvres de l'un des cafards. Il n'avait pu pousser l'avantage mais cela avait suffit. Le choc l'avait déstabilisé et une brusque remontée de peur la saisit. Son neveu. Ils pourraient peut-être lui faire du mal... Son neveu. Mais de qui se moquait-elle à l'appeler son neveu ? Comme si un lien quelconque les unissait. Il n'avait été que l'amant de sa nièce. Des années auparavant. Des siècles peut-être. Avant que celle-ci ne disparaisse. Mais elle n'avait plus de famille. Elle avait été entièrement détruite par l'ombre qui lui faisait face ou disparue quelque part au gré des vents.


*Ellen ! Arrête ça !*

La brève intervention de Nelthor lui fit brusquement reprendre ses esprits. Pendant quelques secondes une nouvelle amertume auquel elle n'avait jamais pensé avait pris le dessus. Elle oscillait entre la colère et la peur. Mais elle ne cèderait pas. Ce serait trop facile. Elle serra les dents et dévisagea les ombres qui lui faisait face, fière.

- Bien essayé, je dois le reconnaitre. Mais vous oubliez que moi aussi, je dispose d'alliés dans ce monde.
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Dim 22 Jan 2012 - 23:39


*Elle ment ! fit un des six acolytes de l’Ombre. J’ai pu la sentir vaciller.*

L’Ombre tiqua. Il commençait à croire qu’elle n’avait décidément pas de point faible, qu’il faudrait user de force brute. Ce n’est pas comme si ça changeait grand chose (dans une heure ou deux, adieu la compagnie ! avait dit l’elfe... oh comme il allait bien rire !), mais c’était beaucoup moins élégant.

*Quand j’ai parlé de Sin’Saïan ?
-Tout juste, elle a flanché une demi-seconde, et puis j’ai senti quelqu’un lui parler... un mort... et elle m’a éjecté.
-Un magicien qui l’indiffère, tu parles. Toi t’as gagné une sucette.*

Son acolyte ne rit pas à la plaisanterie de l’Ombre. Il y avait eu plus d’un milliers de meurtres signés Sin’Saïan en l’espace d’une heure, peu de temps auparavant (environ quatre mois en fait, mais il était dur de garder la notion du temps dans le monde des morts). La reine des elfes était déjà un gros morceau, il n’était pas sûr que rajouter l’autre psychopathe (naturellement, tous les sept se considéraient comme parfaitement sains d’esprit) dans la balance ne fût une idée géniale.

-Tu ne tiens donc absolument pas à lui hum? fit l’Ombre d’un ton pensif. Tu mens donc aussi mal que moi, ma jolie ? Je dois te dire, je suis un peu déçu...

Ils n’avaient rien pu tirer de la brève brèche qu’ils avaient ouverte dans son esprit. Nulle peur ancienne qu’ils auraient pu exploiter, soit qu’elle n’en ait effectivement pas, soit qu’elle le dissimule en profondeur, ni rien de précis qui aurait permis de la faire céder complètement. Simplement la possibilité de l’effrayer un peu, de lui faire goûter aux miasmes malsains qu’ils semblaient répandre autour d’elle, et la conviction qu’elle tenait à cet homme.
L’Ombre était très content.

-Je me demande ce que tes « alliés » pourraient faire pour toi... et pour ce Laïaga ! fit l’Ombre en ricanant.

Toute forme de magie en ces lieux était très fatigante, quand seulement elle était possible, et il n’avait pas voulu dilapider ses forces en futilités. Mais il était maintenant convaincu d’avoir trouvé le chemin de la victoire. Alors cette fois-ci, des symboles sibyllins qui se dessinèrent au bout de son indexe émanait une vraie puissance, ténue mais indéniable, et les symboles faisaient sens pour qui savait les lire.
Il fallait peut-être réinventer la roue à chaque fois mais après mille ans à s’y entraîner, l’Ombre savait le faire très vite, et très bien.

-Bientôt il va te rejoindre, ne t’inquiète pas, fit l’Ombre d’un ton conciliant : il voulait la rassurer. Tu ne seras plus jamais seule ! Enfin...

Il hésita une seconde, il semblait prendre conscience de quelque chose.

-Je me demande quand même s’il ne va pas t’en vouloir un peu. Je veux dire, d’être mort et tout ça, à cause de toi.

Tracer les symboles de base, y associer un peu d’énergie pour la minuscule opération qu’ils représentaient, puis des plus complexes qui combinaient les premiers, associer tout cela pour créer du sens à partir du néant, notre homme, mine de rien, avait du génie et ses doigts voltigeaient.
Même si le sorcier s’avérait aussi fort que le prétendait Ellenwen, ils n’auraient qu’à demander à Danakil ; le vieil elfe avait l’indépendance d’esprit d’un mouton, et aussi doué que soit Laïaga il ne pourrait rien faire contre sa magie du temps.

-Tout ce qu’on pourra lui faire subir quand il sera là, mort et bien mort, rien de plus que nous... L’imagination est un outil puissant, il pourrait être brûlé vif... assailli par d’innombrables araignées velues... ou même écorché, il suffit qu’il y croie.

Les symboles se dessinaient et s’effaçaient, à une allure folle, bien plus vite que ce qu’avait pu faire Danakil qui avait eu besoin de plusieurs heures pour réaliser le sortilège sur Akkan. Et pendant que l’Ombre parlait, ses compères continuaient de surveiller Ellenwen, guettant la faille, le moindre tressaillement, insinuant leurs messages de peur et de colère dans l’esprit de l’elfe.
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Ellenwen

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Ellenwen
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Lun 23 Jan 2012 - 21:59


Ils se frottaient les mains, un sourire goguenard sur leurs faces de carême, longues et blanches. Ellenwen réprima un frisson de pure haine, des envies de meurtres traversant son esprit. Elle aurait voulu pouvoir se métamorphoser et se jeter sur eux, déchirant de ses crocs leurs cous tendres et fragiles. Elle aurait vouloir envoyer son poing dans leur nez, entendre le cartilage craquer sinistrement. Elle n'en pouvait plus de leur mesquinerie, de leur bassesse et de leur pitoyable attaque. Elle n'en pouvait plus de voir l'ombre en face d'elle se comporter comme son grand frère, ou pire, son amant. Un amant jaloux et narquois qui tenterait de briser son ancien amour. Comme si elle n'appartenait qu'à lui.

- Oh, tu es déçu mon chou ? Mais par quoi ? Je ne vais tout de même pas tomber pas dans ses pièges aussi éculé... Vous ne pourrez jamais toucher Laïaga Sin'Saïan... Même tes complices en doutent. Regarde l'inquiète au fond de leurs petites prunelles vides... Ah ! Je me moque totalement de ce que vous pourriez faire à ce sorcier. Vous n'y survivriez pas.

Elle savait qu'ils n'avaient pas pénétré son esprit. Et qu'ils ne pourraient jamais le faire. Elle se força à se calmer, respirant profondément. Elle ferma les yeux pour ne plus voir les visages ricanants en face d'elle. Pour ne plus penser à ce qui pourrait arriver à Laïaga s'il posait ne serait-ce qu'un orteil dans ce monde. Lorsqu'elle reprit la parole, sa voix était ennuyée, distante.

- Tu oublies, mon très cher ami, qu'avant qu'il ne me rejoigne il faudrait déjà le faire mourir.

*Si cet idiot ne vient pas me rejoindre sous l'effet de la panique.*

- Et s'il meure, il ne pourra s'en prendre qu'à lui-même.

*Sauf s'il vient pour moi.*

Ses pensées ne parvenaient pas à quitter son esprit, exacerbées par l'absence de lien qui la faisait souffrir. Il lui semblait soudainement être privée d'une force vitale, d'une part d'elle même. Cela faisait si longtemps qu'elle vivait avec cette présence.


- Je me serais attendue à mieux de ta part, l'ombre.

Les dessins qu'ils traçaient brillaient devant ses yeux, maintenant chargés d'une faible puissance. Une puissance qui allait croissant. L'elfe ragea quelques instants de ne savoir les lire, de ne pouvoir comprendre ce que son ennemi préparait. Mais du moins venait-elle d'apprendre que dans ce monde où elle se sentait si nue, la magie était possible. Doucement, sans heurt, elle chercha à renouer avec sa propre force, accumulant son énergie. Elle n'écoutait plus les marmonnements stériles qui lui parvenait. Elle trouvait sa voie...

Elle touchait presque au but lorsqu'un mot la percuta, comme une onde d'énergie dans l'estomac. Elle hoqueta. Delyawel. Laïaga la croyait vraiment morte pour l'appeler ainsi. Delyawel... Elle haleta, déstabilisée par le mot de pouvoir. Aussitôt, les mots de l'ombre reprirent de leur force. Redevinrent des lames acérées qui la percèrent et la transpercèrent. Les araignées. Leurs pattes velues qui courraient sur son corps, fouillait ses plaies, s'insinuaient dans sa bouche au rythme de ses cris. Elle voyait son ami. Son visage déjà défiguré par les brûlures et les cicatrices, ses plaies rouvertes. Et des pattes, toujours des pattes. Elle poussa un long gémissement, de frustration, de colère et de peur.

En face d'elle, l'ombre s'arrêta, dévisageant la proie qui lui faisait face. Elle avait enfin réagi. La reine des elfes, la magicienne la plus puissante de l'Alagaësia selon les rumeurs de ses dernières victimes, venait de gémir comme un enfant. Il frotta ses sales pattes métaphorique et émit un glapissement de victoire. Le jeu commençait vraiment.


- Oh, tu as peur pour lui ? Comme c'est touchant !


Il ne savait d'où venait ce revirement inattendu mais il allait l'exploiter. Des idées folles tournoyaient déjà dans son esprit déformé par la rage et la haine. C'était tellement bon de la voir aussi vulnérable. De la voir en son pouvoir.

- Mais c'est que tu tiens à lui finalement ? Tu finis par douter de sa force ? Ne t'inquiète pas, va, si tu cèdes, il ne souffrira pas, je te le promet.

Il s'agenouilla près de la femme nue, détaillant son corps si fragile, si petit, si faible. Il effleura son épaule du bout des doigt et embrassa doucement sa joue, caressa ses cheveux tendrement. Un parfait consolateur. Elle frémit, essoufflée et s'écarta d'un geste dégoutée. Avant qu'elle n'ai eu le temps de répondre, l'ombre se releva, déambulant devant elle.

- Laisse moi deviner. C'est ton ami d'enfance. Non... Nelthor est mort, par ta faute d'ailleurs. Grand coeur mais grand con, essayer ainsi de t'innocenter !

- Ca suffit !

La rage lui était revenue, puissante, mais envahie par la peur et la tristesse. Elle avait déjà perdu trop de proches. Le gloussement de l'ombre lui donna la chaire de poule.


- C'est qu'on meure beaucoup à ton contact, non ? Enfin, revenons à Laïaga... ce très cher Laïaga. Tu sais, beaucoup lui en veulent ici. Un millier de morts lors de votre évasion de la guilde ! C'est qu'il est doué !

La reine tressaillit, touchée une nouvelle fois. Elle avait oublié que dans ce monde tout se savait, tout s'écoutait. Son ennemi ne devait rien ignorer de ses derniers faits et gestes. Et, pour une fois, elle se retrouvait à court de répartie.


- Mais s'il n'est pas ton ami, serait-il ton amant ?

Le meurtrier la dévisagea, malicieux. La réaction de l'elfe fut au-delà de ses espérances. La rougeur qui gagna son cou et ses joues étaient visibles, même dans un monde de gris. Cette fois il éclata de rire, sautillant dans l'air comme un enfant. Il était tombé juste. Il lui suffisait de voir les yeux légèrement écarquillés... non, elle semblait gênée. Non, il n'était pas son amant. Mais alors ?

- Non ! Tu plaisantes, ma toute belle ! Tu ne serais tout de même pas... amoureuse... Amoureuse, comme la première petite paysanne venue ?

Ellenwen ramena ses jambes contre son buste, soudainement trop consciente de sa nudité. Amants... Non ! Ils n'avaient jamais été amants. Ils étaient l'époux de sa nièce. Elle ne l'avait jamais considéré comme un amant. Mais l'image persistante du beau visage de son neveu s'imposa à elle. Pour elle, il avait retrouvé ses sentiments. Il avait quitté la guilde. Et pour lui...

- Oh, je suis sur que tu t'es refusé à le voir, à l'admettre...


L'ombre gloussait joyeusement, harcelant plus que jamais l'esprit de l'elfe. Il se rapprocha d'elle et posa deux doigts sous son menton, la forçant à le regarder dans les yeux. Elle était entré dans la danse ! Elle jouait enfin à son jeu. Maintenant, tout commençait !

- Et tu ne lui as pas avoué, pauvre cruche. Tu es trop drôle, toi et ta stupide morale. Tu as le bonheur à portée des doigt et tu ne cesses de l'esquiver. Et après tu diras que tu n'as pas cherché ce qui t'arrive ! Tu es vraiment trop drôle !
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Mar 24 Jan 2012 - 2:37


Spoiler:

Maintenant, tout commençait. L’Ombre se demandait volontiers ce qui avait fait céder sa vieille ennemie ; cela avait semblé tellement artificiel qu’il n’y avait d’abord pas cru. Une feinte de sa part ? Bon sang elle ne pouvait pas se mettre à jouer avec lui, c’était le monde à l’envers !
Mais non, elle avait réellement flanché, et maintenant les sept jouaient avec son esprit, lisant et décortiquant... Oh, elle restait une maîtresse de magie, et rien n’était offert, mais ils découvraient petit à petit... les araignées... le vertige...
L’ombre riait et faisait la conversation, il parlait et parlait encore, décochant des phrases acerbes.

-Mais tu peux me remercier, « ma très chère », de le remmener pour toi.

<><><><><>

Je traversai en trombe le bouclier protégeant la caverne. Le cœur lourd, l’estomac dans les talons, mais sans ralentir. Rien que pour pouvoir me dire que j’aurais tout essayé... Ce serait déjà bien, non ? J’aurais sans doute du mal à m’en convaincre ; qu’est-ce que je pourrais raconter ? « Je l’ai laissée aller dans le royaume des morts toute seule, mais une fois qu’elle était effectivement morte j’ai fait de mon mieux pour la remmener ! »
Mais bien sûr c’était puéril de penser ainsi. Ce n’était pas ma faute ce qu’il lui arrivait. Les habits d’Ellen’, captés du coin de l’œil, entassés dans un coin de la caverne, me tirèrent un sourire amer.
Sans m’arrêter de courir je fonçai vers la marre verticale d’ambre fluctuante. Sans réfléchir je m’apprêtai à y plonger la tête la première. Les habits d’Ellen’ ! Au dernier instant je me repoussai brutalement en arrière d’une décharge d’énergie qui fit vibrer la roche. Je tombai sur les fesses pas loin du coffret contenant l’humeur argentée que je l’avais vue utiliser. Le vif-argent devait recouvrir chaque parcelle du corps sous peine de mort. Est-ce que ça impliquait les yeux et les narines, d’ailleurs ?

<><><><><>

L’Ombre se pencha vers Ellenwen, il avait son visage à quelques centimètres du sien seulement, et ses doigts effleuraient légèrement le bras de l’elfe.

-Allons, tu n’as pas l’air contente du tout... fais risette Ellenwen !

Son contact avait l’aspect désagréable de petites pattes velues qui piquaient sa peau, ils étaient dans sa tête maintenant, et il ne pouvait le lui faire sentir, la douleur était plus vive et plus vraie que nature.

-Je m’amuse tellement pourtant, moi !

L’Ombre passa derrière Ellenwen une fois encore, la caresse douloureuse de ses doigts suivant l’épaule puis disparaissant au niveau du cou de la jeune femme. De temps à autre il traçait un nouveau de ses symboles au sens obscur dans l’air : détruire Laïaga serait la goutte qui ferait déborder le vase, qui achèverait la reine des elfes. Ah, ce que les gens amoureux étaient fragiles !

<><><><><>

J’aurais mieux aimé plonger sans me poser de questions, y aller, constater mon échec et revenir. Et voilà que je me retrouvais à me déshabiller, jetant mes habits en tas informe non loin de ceux d’Ellen’. J’avais le temps de tergiverser ; aller dans le monde des morts, bon sang. Maintenant au pied du mur, je n’en avais fichtrement pas envie.
Tout cela pour quoi ? Qu’est-ce que j’y récolterais à part encore plus de peine ?
Une fois nu comme au premier jour, j’attrapai une pleine poignée du liquide à la consistante aérienne, en étalant sur mes pieds, mes mollets, mes jambes, remontant petit à petit et déposant une mince couche de vif-argent. La matière recouvrait mes cicatrices, j’étais tel que j’avais été avant. A la couleur de peau près. Un type normal, ni défiguré, ni à moitié chauve, on ne voyait rien de tout ça sous le vif-argent. Un type qui n’aurait pas enfermé sa tante – haha – dans un cachot obscur. Un type qui aurait pu se rendre compte qu’il l’aimait ?
Qui sait... Est-ce que c’était pour ça que j’y allais ? Aveuglé par des sentiments dont je n’étais même pas sûr ? Je regardai le portail aux reflets ambrés. J’allais risquer ma vie pour rien. Ellen’ elle-même n’aurait pas voulu que je fasse ça. Je levai le bras droit pour enlever le vif-argent qui recouvrait mon visage. Arrêtai mon geste en pleine course. Ellenwen pouvait bien dire ce qu’elle voulait, j’imaginais très bien si la situation avait été inversée. « Fais ce que je fais et pas ce je dis ! », comme on dit. Ah non ce n’est pas ça... Rien à fiche, je fermai mon esprit, mes yeux et ma bouche, retins mon souffle, posai les mains à plat sur le chambranle de la porte entre les mondes, et hurlai mentalement, comme une bouteille à la mer, ou comme une sorte d’épitaphe :

<><><><><>

-Allons, lève tes bras de là, tu es si jolie comme ça !

L’Ombre attrapa avec une tendresse feinte une main d’Ellenwen pour écarter ses bras de sa poitrine. Est-ce qu’il pouvait la contraindre par la pensée ? Est-ce qu’elle était assez affaiblie pour cela ? En tout cas il essaya avec une brutalité qui détonait avec ses gestes doux.

-Alors comme ça, ces urgals, ils t’ont violée aussi ? Ils n’ont pas dû y aller de main morte, si tu ne peux plus faire d’enfant !

Ni la douleur ni la peine ni l’humiliation : il ne lui épargnerait rien. Tout ce qu’il pourrait utiliser contre elle, il l’utiliserait. Il mélangeait ce qu’elle lui avait dit et ce qu’il découvrait. Les vieilles blessures étaient cicatrisées ? Il les rouvrait l’une après l’autre et tisonnait la plaie au fer rouge. Les images qu’il voyait en esprit... qu’il lui imposait... étaient odieuses et sordides, et pourtant il y trouvait une forme d’élégance. Peut-être même d’érotisme.

<><><><><>

*Je m’appelle Laïaga Sin’Saïan ! J’ai plus de huit cent ans et j’ai fait bien des choses ! Mais si l’on doit ne se souvenir que d’une seule, alors que ce soit qu’aujourd’hui, JE VAIS DANS LE MONDE DES MORTS !*

<><><><><>

On raconte que la vengeance est un plat qui se mange froid. S’il avait pu consommer la sienne aussitôt qu’elle avait trouvé un objet, l’Ombre n’aurait pourtant pas hésité à le faire.
Mais il ne s’était pas montré impatient. Rien n’aurait été pire que de rater sa vengeance chérie. Il s’était préparé, et avait attendu le moment propice.
Il avait saisi au vol l’occasion que représentaient Akkan et Danakil au vol, avec une présence d’esprit confondante. Il lui avait appris ce qu’il fallait, il avait manipulé et manipulé.
Et maintenant Ellenwen était là. Elle avait poussé un premier cri quelques instants plus tôt. Bien d’autres suivraient. Il ne faisait pas que réinvestir des images des tortures que lui avaient infligé les urgals, il imaginait aussi pour elle de tous nouveaux délices. Elle goûtait à tout sans avoir son mot à dire.

-Si ça t’intéresse, j’ai terminé mon sort...

L’Ombre traça encore quelques symboles ; il avait imaginé et intégré à son sort cinq manières de faire mourir le sorcier. Du diable si aucune ne fonctionnait ! Il fit un petit clin d’œil à Ellenwen :

-Ton petit ami va pouvoir nous rejoindre dans d’atroces souffrances !

<><><><><>

Et je plongeai en apnée. Je ne ressentis rien de spécial. Un instant je faillis ouvrir les yeux pour vérifier que tout avait bien fonctionné, mais je me retins in extremis. Bien sûr que ça avait marché, sinon je me serais tout bêtement pris un mur de roche dans la face.
Alors voilà, j’étais dans le monde des morts. Jusqu’à une quelques dizaines de minutes plus tôt, je pensais que c’était mon pire cauchemar.
Je sentais de l’herbe sous mes pieds nus, mais elle était rêche et cassante, comme si elle avait été brûlée par le soleil du Hadarac. Je ne sentais aucun souffle d’air en revanche, ni aucune odeur, rien qu’un vide lancinant. Et puis soudain survint une attaque mentale, mais j’étais aussi refermé sur moi-même qu’on pouvait l’être, ma conscience entièrement repliée en position fœtale. Quoi que ce soit qui m’attaque, cela glissa sur mon absence totale d’émotion et je n’y prêtait guère attention : c’était puissant, mais pas assez.
Je me rendis rapidement compte d’une chose : on ne survivait pas mieux sans respirer ici que chez nous, parmi les vivants. Alors je pris une inspiration, timidement, et je me rendis compte qu’il y avait bien de l’air, et que je ne mourrais pas instantanément. Ensuite j’ouvris les yeux pour découvrir le royaume des morts. Je vis un monde triste et immobile en camaïeu de gris. Je vis le lit d’une rivière asséchée. Je vis quelques rochers non loin de là où je me trouvais, et près de ceux-ci plusieurs formes diaphanes qui me regardaient, sans doute les créatures qui venaient de m’assaillir. Et à terre encerclée par les fantômes... mes yeux s’agrandirent.

-Ellen’... soufflai-je, et maintenant c’était un torrent impétueux de sentiments que j’éprouvais.

<><><><><>

L’arrivée de l’intrus avait eu l’effet d’une bombe. Aucun des sept n’avait prévu que quelqu’un pourrait venir aider l’elfe, c’était tellement impensable ! Il y avait une différence entre abattre Laïaga d’un sort et le voir arriver en pleine possession de ses moyens, mais les sept n’étaient pas des lâches, et ils l’avaient attaqué. Après tout, s’ils avaient su briser Ellenwen, celui-là ne pouvait pas être plus résistant.
Pourtant ils n’obtinrent ni résultat, ni réaction autre que le fait que Sin’Saïan ouvre les yeux. Il les regarda, ses lèvres remuèrent mais ses mots ne portèrent pas jusqu’à eux. Et soudain comme ça avait été le cas pour Ellenwen, ses défenses mentales volèrent en éclat devant un torrent d’émotions.
L’Ombre ne comprenait pas, mais il n’en avait cure : il saisit sa chance au vol comme il avait appris à le faire et attaqua de toutes ses forces... pour se heurter à un torrent de haine. L’Ombre battit en retraite.

-Laïaga Sin’Saïan je présume ? demanda-t-il alors, même s’il n’avait aucun doute sur l’identité de l’homme. Et si vous me disiez ce qui vous emmène ? Vous avez vu de la lumière et vous êtes entrés ?

<><><><><>

La force de l’attaque mentale me fit vaciller intérieurement. Mais je l’avais vue venir et m’étais préparé, je l’avais repoussé. Ça ne pourrait pas durer indéfiniment, mais pour l’instant il doutait.

-Laïaga Sin’Saïan je présume ?

Devine, connard. J’avançai résolument vers le petit groupe.

-Et si vous me disiez ce qui vous emmène ?

Son ton était obséquieux, condescendant. Et il pouvait effectivement se le permettre : il se pensait dangereux, et il n’avait pas l’air d’avoir tort. Alors j’affichai un petit sourire tranquille, comme je savais si bien le faire : à ce jeu de dupes, je n’étais pas le plus mauvais.

-Ellen’, fis-je en ignorant délibérément l’Ombre, tu...

J'avais même du mal à croire que je ne sois pas venu pour rien. J'avais pensé que je ne la verrais plus jamais, et maintenant que je me rendais compte que c'était faux, j'étais un peu perdu et tout cela avait l'aspect surréaliste d'un rêve. Et pas forcément un bon.
Je traversai la barrière que formaient les fantômes - de toute façon, ils auraient été bien en peine de m'en empêcher - et posai un genou à terre devant Ellen'. Ma main se posa sur la sienne qu'elle serra doucement.

-...ça va ?

Il ne s’était pas passé une minute depuis que j’étais arrivé dans le monde des morts.
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Ellenwen

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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Mar 24 Jan 2012 - 11:45


Un goût amer de sang et de bile remonta dans la gorge de l'elfe lorsque l'ombre effleura sa peau. Ils avaient réussi à percer ses premières défenses, la sensation de milliers de pattes sur son corps ne le lui apprenait que trop. Elle ne parvenait pas à s'empêcher de penser à cette nuit, à cette sensation qu'elle ne pourrait jamais oublié. L'elfe commença de haleter, sous l'effet cumulé de la peur et du stress. Son souffle lui manquait, erratique et fou. Dieu qu'elle haissait cette sensation, ces sentiments. Elle parvint toutefois à ricaner.

- Et c'est tout ce que tu sais faire ? Les araignées ? Mais le premier elfe venu sait combien je n'aime pas ça. Comme si cela allait suffir pour me briser. Tu espères quoi ? Que je m'effondre en sanglotant et en te suppliant d'arrêter ?

Oui, c'était ce qu'il voulait, elle le savait. Et elle savait aussi que jamais elle ne s'abaisserait à ce point.

*Tu peux toujours courir mon grand*


- Tu m'insultes, je trouve.

Elle laissa l'ombre découvrir son corps. Comme si cela avait la moindre importance. Elle n'avait jamais été très pudique et ce n'était pas maintenant, coincée dans un monde où personne ne se préoccupait de sa nudité, qu'elle allait le devenir. Et si cela pouvait lui laisser croire qu'il avait la moindre influence sur elle...

- Monsieur a bon goût... Je ne pensais pas qu'un corps d'elfe pourrait t'intéresser. Toi qui aime tant les choses velues à huit pattes...

Elle replongea ses ongles dans sa main, déchirant sa peau fine. Le goût du sang était métallisé, légèrement salé. C'était réconfortant. Si dans ce monde gris les choses n'avaient ni odeur ni couleur, elle avait encore du goût. L'elfe tremblait doucement, au rythme de sa respiration.


- Alors comme ça, ces urgals, ils t’ont violée aussi ? Ils n’ont pas dû y aller de main morte, si tu ne peux plus faire d’enfant !

Le coup avait porté. Ellenwen loupa une respiration. Ca, elle n'avait pas prévu qu'ils le découvrent. Personne ne le savait. Et personne, personne ! ne le saurait jamais. Pas même eux. Surtout pas eux. Elle allait leur faire oublier ce détail, ce qu'elle-même voulait oublier. L'ombre n'aurait jamais du évoquer cette souffrance. Il était allé trop loin. Elle se redressa et siffla, avec rage et mépris :

- Au moins, ça t'évitera de les avoir sur le dos pour me venger. Et ça m'évite d'avoir à mourir pour leur céder la place.

Elle fixa l'ombre, s'imprégnant de ses traits et attisant sa colère. Son esprit était un diamant dont ils n'avaient percé qu'une seule facette. Delyawel. Celle-là, ils ne l'auraient jamais. Elle gémit à nouveau lorsqu'elle vit le sortilège prendre place doucement. Mais cette fois, elle entrait dans la ronde. Et elle allait les battre à leur propre jeu, toute couverte de sang, d'humeur argentée et assommée par la douleur morale qu'elle était. Jamais ils ne tueraient Laïaga. Ce crétin de sorcier était immortel.

- Non, ne le lance pas, je t'en supplie !

Comme si elle allait s'abaisser à supplier un ombre. Elle tremblait toujours, toujours ébranlée par le tranchants des mots. Mais cette fois, la colère dépassait la peur. Un colère qu'elle chérissait et cultivait, bien cachée dans les replis de son esprit, là où nul ne pourrait venir la souffler et l'éteindre. Là où elle finirait par les détruire. En attendant... elle se mit à pleurer, tordant ses mains devant elle.

Pleurs qui s'éteignirent aussitôt qu'un brusque déséquilibre l'avertit qu'elle n'était plus la seule vivante dans ce monde. Avant même de lever la tête, elle avait deviné. Laïaga. Cet imbécile de Laïaga. Cette fois, elle avait de vraies raisons de paniquer. Elle lui avait pourtant dit de ne pas venir !

*Comme si tu croyais vraiment que ça allait changer quelque chose !*

Elle se mordit les lèvres, les yeux écarquillés, s'attendant à tout moment de le voir chanceler sous les attaques des ombres. Elle ne pouvait se permettre de bouger où de lui envoyer la moindre pensée sans risquer d'être aussitôt détruite par les fantômes. Elle sentit des larmes de frustration lui monter aux yeux. Pourquoi venait-il donc tout gacher ? Elle avait maintenant un autre problème à régler en plus du sien.

Mais, preuve qu'elle avait eu tord de douter de son intelligence, Laïaga avança paisiblement, traversant les fantômes comme des nuages qu'il dissipait au gré du vent.


- Ellen ? Ca va ?

La reine regarda son ami, désespérée. Elle hésitait encore entre l'envie sauter au cou, heureuse de le revoir, de ressentir sa présence auprès d'elle, et le désir de lui en coller une, juste pour lui apprendre à respecter ses promesses. Enfin quoi ! Elle lui avait bien dit qu'elle ne craignait rien !

*Devine, idiot !*

Une pensée venue de loin effleura son esprit. Ellen esquissa un sourire avant d'éclater en sanglot et de se jeter au cou de son ami. Entre amis, c'était possible non ?


- Crétin, lui souffla-t-elle à l'oreille.


*Ah le héros qui vient sauver sa belle dame, dans son armure dorée ornée d'une rose ! Ses cheveux volent au vent et son regard brille de cet amour qu'on ne trouve que dans les contes !*

Ellen rougit.

*Et ces deux corps nus qui se pressent langoureusement l'un contre l'autre dans un élan de passion !*

Ellen devint écarlate et se détacha vivement du cou du sorcier, affreusement gênée, prenant conscience de sa nudité. Dieu merci, il ne pouvait pas entendre les pensées de Nelthor ! Sous le coup de la panique et de l'angoisse, elle se retourna vers le seul au courant de ses sentiments et qui pourrait la trahir.

*L'ombre va morfler !*

Projetant toute la colère qu'elle avait accumulé, Ellenwen resserra son étreinte sur l'esprit de l'ombre à côté d'elle. Elle le serra à le briser, l'étouffant dans lui-même. Elle le fixa.

*Si tu dis quoique ce soit, je te tue pour la deuxième fois. Si tes acolytes essayent ne seraient-ce que flotter un peu trop vivement, tu meures. Je me suis bien faite comprendre ?*

C'était bien connu, chez les elfes, l'important reste toujours caché.


*Parce que tu ne comptes rien lui dire ! Je vais finir par croire que l'ombre avait raison... Regarde ses yeux et dis moi que tu ne sais pas qu'il est aussi amoureux de toi que tu l'es de lui.* L'esprit se fit soudain presque triste. *J'en serais même presque jaloux.*

Cette fois, c'était sur. Les hommes n'apportaient que des emmerdes.
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Laïaga

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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Mer 25 Jan 2012 - 0:29


Spoiler:

-Crétin.

Je la serrai contre moi, un petit sourire sur les lèvres. Peu de choses m’avaient déjà fait tant plaisir, que de retrouver Ellen’, saine et sauve. Enfin, surtout sauve.

-Toi-même, tu m’as fait peur...

Ça avait beau n’être ni l’endroit ni le moment, j’aurais voulu lui dire combien je l’aimais. Et puis brusquement elle s’écarta et se releva. L’instant était passé, je me redressai à mon tour, elle fixait l’Ombre et l’Ombre la fixait. Je ne savais pas ce qui l’avait faite réagir si vivement, mais j’imaginais sans problème qu’il n’y était pas étranger.

<><><><><>

-Tiens Laïaga, qu’est-ce que cela vous inspirerait si je... argh...

Le fantôme grimaça.

*Je me suis bien faite comprendre ?*

L’Ombre ne put s’empêcher de rire à gorge déployée ; oh non vraiment, c’était trop fort !

-Oh oui ma belle, ça pour avoir compris, j’ai compris !

Et d’une brusque impulsion il repoussa Ellenwen, sans douceur, en cherchant à la blesser, à la lacérer au passage. Seul il n’aurait pas été de taille, cela il le savait, mais il avait soigneusement préparé le terrain.

-Mais... Je n’ai pas très envie d’accéder à ta requête !

Il lui fit un clin d’œil malicieux. Si Laïaga était venu jusque ici, l’Ombre doutait que ses petits jeux puissent entamer la confiance du dragonnier. Quand on suivait quelqu’un jusque parmi les morts, il ne devait pas y avoir grand chose pour vous faire douter de cette personne. Mais simplement mettre Ellenwen mal à l’aise était un plaisir pour l’Ombre et il ne se privait pas d’essayer.
Sans prévenir, les sept lancèrent la contre-attaque. Laïaga avait montré qu’il n’était pas aussi protégé que l’était Ellenwen, il s’était réfugié derrière sa fureur plutôt que derrière la carapace adamantine du calme parfait. Pourtant ils frappèrent d’abord l’elfe – après tout, si jamais elle avait abaissé ses défenses sans s’en rendre compte quand l’humain était arrivé, autant en profiter ! – avant de se rabattre sur Laïaga.

<><><><><>

Sa requête ? De quoi est-ce qu’il parlait ? J’aurais bien voulu le demander à Ellen’, et bien d’autres choses avec, comme par exemple « qu’est-ce qu’on faisait maintenant ? », mais son esprit était totalement hermétique, elle était refermée sur elle-même comme une huître, ce qui expliquait la rupture de notre lien qui m’avait fait croire à son décès.
L’attaque arriva sans que je m’y attende, les sept esprits néfastes réunis pour me briser comme ils avaient dû essayer de briser Ellen’ et ils me percutèrent avec une violence brute, animale. Je ne m’y attendais pas. Je compris alors, son repli et son silence, tandis que je grinçai des dents. Ils m’avaient eu avec une telle facilité ! La douleur me vrilla le crâne, j’entendais leurs mots, leurs insinuations, ils parlaient tous les sept dans mon esprit, ils fouillaient, cherchaient ce qu’ils pouvaient utiliser, « tu l’aimes ? Mais enfin si elle avait tenu à toi, elle n’aurait jamais brisé le lien. » Mensonges ! « Tu as tué Shaka, tu as assassiné un ami, parce que c’était tellement plus simple que de chercher à le sauver. » Mensonges ! « Et est-ce qu’elle serait venue dans le monde des morts, elle, pour toi ? » Les mots tourbillonnaient et s’enracinaient et je n’arrivais plus à discerner ce que je croyais et ce qu’on m’imposait, je sentais la brûlure de mes innombrable cicatrices, comme si je gravais des sorts à même ma peau pour la seconde fois, la souffrance qui irradiait dans tout mon corps, je l’avais étalée sur des mois et elle revenait en l’espace de quelques secondes plutôt mourir que de supporter ça je tombai à genoux j’avais déjà vécu ça, air de déjà vu, du sang, des cadavres et des cris, mes doigts s’enfoncèrent dans la terre sèche, j’étais revenu dans le camp du Nomins quelques mois plus tôt, j’étais terrassé, ils étaient forts plus forts que moi, oh non certainement, pas cette fois.
Leurs cris odieux raisonnaient dans mon esprit torturé.
Et soudain ils ne furent plus que murmures. Perdus dans la brume d’un monde intérieur, un charnier de géants. Dans cette projection de l’esprit le brouillard opaque gommait les formes. On distinguait la silhouette d’os immenses, ceux d’une créature qui avait dû être grande comme une montagne en son temps, et entre ses côtes se tissait un réseau labyrinthique de ponts et d’échelles de corde. Dans ce monde qui n’existait pas, dont j’étais le maître, je perdis mes assaillants...

<><><><><>

Il fallut à l’Ombre peut-être une seconde pour assimiler la nouvelle donne. Il avait instantanément compris qu’il n’était plus dans le royaume des morts... Plus tout à fait en tout cas.

*Dégagez...*

Il avait parlé à ses acolytes. Laïaga... il avait cerné le personnage, agressif, sûr de lui, il allait user et abuser de l’effet de surprise pour le vaincre, et essayer de l’emprisonner dans ce monde étrange, noyé dans le brouillard.
Mais cet endroit n’était qu’une métaphore, l’Ombre l’avait compris : quelque part ici il trouverait l’esprit de Laïaga qu’il avait déjà violé avec tant de facilité. Et Laïaga continuait de le sous-estimer.
Alors ses acolytes dégagèrent.
Et l’Ombre fit ce qu’il faisait de mieux : il analysa le problème.

<><><><><>

Je sentis comme une brise fraîche glisser sur ma peau. J’avais repris le contrôle. Dans ce monde que je construisais, j’étais le maître, j’avais le pouvoir et je m’en servais. Le monde gagnait en précision, et doucement, le monde des morts disparaissait, il ne restait plus que l’immense carcasse dans la brume.
Et maintenant c’était à mon tour de verser le sang.
J’avais cerné l’esprit qui dirigeait les sept, sa manière d’être et de combattre. Le genre de type calculateur et réfléchi, qui prévoit toujours ses coups à l’avance. Quand il avait essayé de dévaster mon esprit, il l’avait fait brutalement mais méthodiquement, avec un entêtement qui confinait au sadisme.
Mais personne au monde ou presque ne savait faire ce que je venais de réaliser, et je les détruirais tous avant qu’ils ne comprennent comment se dépêtrer de ce monde que je créais.
Je pouvais voir l’esprit que je combattais dans la brume. Il était seul à être resté, il me sous-estimait. Ma conscience s’approcha de la sienne. J’étais totalement absorbé par ce combat mental, délaissant le monde réel.
Je frappai.

<><><><><>

*Il faut l’achever maintenant.
-Terminer de ruiner ses défenses.
-La faire souffrir.
-Oh que oui...*

Les six esprits parlaient entre eux. Ils faisaient cercle autour des deux vivants, emplissant l’air de leur haine, abreuvant l’esprit d’Ellenwen de leurs pensées de mort.
Ils avaient déjà balayé son ami une fois. Ils n’en feraient qu’une bouchée, l’humain ne serait bientôt plus qu’une loque hurlante. Elle allait voir ! Et tous ces esprits qu’elle connaissait, ces gens à qui elle avait survécu, est-ce qu’elle imaginait tout ce qu’ils pouvaient leur faire ?
Les voix dans l’esprit de l’elfe tantôt chuchotaient et tantôt hurlaient, la menaçaient et l’humiliaient, nombres de leurs menaces étaient pures mensonges – ils n’imaginaient pas pouvoir faire grand chose aux esprits qui lui avaient été cher de leur vivant – et parfois elles étaient sincères.
Mais Ellenwen était ici dans leur monde, et ils pouvaient la harceler impunément, ils évitaient maintenant l’affrontement direct, ils cherchaient à doucement la saper. Mais surtout, se décidèrent à employer leur forme de magie si propre à ce monde.
Ils se concertèrent brièvement, et puis leurs doigts s’agitèrent en l’air.

<><><><><>

Il frappa.
Mais l’Ombre avait venu venir l’attaque, et il se décala. Laïaga brassa de l’air. Il attaqua encore, disparut, revint selon un autre angle, sous l’esprit qu’il affrontait les ponts de corde s’effondraient, les barreaux des échelles se brisaient entre ses mains, mais il survivait, et il découvrait la logique de ce monde.
L’Ombre avait toujours été bon pour ça. Trouver la logique sous-jacente ; il y en avait toujours une. Ce monde incroyable était un pur produit de l’imagination de Laïaga, c’était une métaphore de l’esprit de l’humain, et tout y faisait sens.
C’était une métaphore de son esprit et s’il était dans son esprit, il pourrait lui faire du mal, il le savait. Alors il se contentait d’avancer, il suivait des ponts qui convergeaient, l’air de rien, vers là où avait dû se trouver le cœur antan dans cette immense cage thoracique.
Plusieurs fois il faillit chuter, perdre le combat, Laïaga était bien plus vif et imprévisible qu’il ne l’avait cru, mais il tenait bon. Il avançait petit à petit mais il avançait, inarrêtable, porté par une volonté de fer. Il avait ravalé ses petites piques acerbes. Il n’était plus qu’une volonté en marche.

<><><><><>

Insaisissable, l’esprit était insaisissable, il ne réagissait pourtant pas plus vite que moi, et n’était pas plus imaginatif non plus, mais il semblait toujours avoir prévu une porte de sortie, il avait systématiquement un coup d’avance, quoi que j’essayasse pour le piéger.
Sa jubilation, soudaine, me percuta comme s’il m’avait frappé en plein visage. Je ne compris pas de suite. La brusque souffrance qui me plia en deux m’apprit la vérité : il avait passé le labyrinthe mental que j’avais dressé pour le piéger. Il avait atteint mon esprit. Je me sentis vaciller. Une vérité plutôt désagréable naquit dans mon esprit : j’apportais plus de mal que de bien. J’étais venu en passant Ellenwen morte... et maintenant elle allait peut-être y rester à cause de moi.
Le monde que j’avais bâti s’effondra rapidement, les os pharaoniques se desséchant et tombant en poussière dans la brume, les cordes des ponts et des échelles se déchirant, et bientôt je fus à nouveau dans un monde des morts en noir et blanc, la tête emplie de voix qui n’étaient pas les miennes et qui me susurraient des choses affreuses, et bordel ça faisait mal, tout cela faisait horriblement mal ! Si mal que je n’arrivais pas à me concentrer sur ses symboles que les esprits traçaient en l’air, je sentais que j’aurais dû remarquer quelque chose, mais – un nouveau trait de douleur me vrilla le crâne – impossible de me focaliser dessus. Je poussai un cri étouffé en vacillant sur mes jambes.

-Je crois que...

Ma voix était sifflante entre mes dents. Mon regard se posa sur Ellen’.

-...que j’ai bien merdé aujourd’hui, non ?

Mon cœur battait plus vite. J’étais perdu, tout simplement, seul je ne m’en sortirais pas, et Ellenwen ne pouvait pas m’aider ou elle y resterait aussi. Au moins emmenais-je avec moi une agréable dernière vision. M’étais-je jamais rendu compte d’à quel point elle était belle ? Finalement je ne lui aurais rien dit, je je me sentais céder rapidement, j’allais sombrer sans lui avoir avoué, quelle tristesse.
L’Ombre jubilait jusqu’en mon for intérieur.

<><><><><>

Laïaga s’éteignait et l’Ombre riait. « Qu’est-ce que tu en penses Ellenwen ? » demandait-il, goguenard. « Tu aimes ce que tu vois ? » Il dansait presque, il avait vaincu cet imbécile de Sin’Saïan, et à travers lui il allait vaincre Ellenwen, « tu n’as toujours rien à lui dire ? », demandait-il encore, et d’éclater de rire de plus belle.
Ah, qu’elle était douce, sa victoire, il imaginait ce qu’Ellenwen devait ressentir, il l’imaginait abandonner, se sentir impuissante, et il s’en délectait.
Ses six compères terminèrent leur sortilège, un sort d’une basicité extrême dans la veine de ce que permettait de faire ces étranges symboles, qui ne faisait que souffrir, et rien d’autre, mais qui le faisait bien. Fixant Ellenwen, l’un d’entre eux dessina en l’air la dernière rune qui activait le mauvais sort sur la reine des elfes.
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Jeu 26 Jan 2012 - 0:12


La rebuffade de l'ombre fut dure à encaisser. Il y avait mis de la force et le retour dans son corps était douloureux. Il lui semblait qu'elle s'était écorchée l'esprit, comme on s'écorche les genoux en tombant d'une branche trop haute. Ce n'était pas douloureux à proprement parler mais la sensation était irritante. Désagréable. Ellenwen grinça des dents, prête à affronter une nouvelle vague de douleur et de souffrance. Les mots franchissaient déjà ses lèvres :

- Alors... on a peur...

La suite se perdit dans un cri d'angoisse. Contrairement à ce qu'elle croyait, contrairement à ce qu'ils avaient toujours fait, les ombres se détournèrent de son esprit et se lancèrent sur Laïaga. Pendant quelques secondes, elle resta sur le qui-vive, à demi soulagée par l'absence de réaction de son compagnon. Il avait déjà repoussé une première attaque. Il repousserait la deuxième aisément. Non ? Non ! Elle le vit blanchir et s'agenouiller, les traits tordus par la douleur. Tombant à genoux, l'elfe saisit l'épaule de son compagnon.


- Laïaga ! Laïaga !

Elle se mordilla le bout des doigts, désespérée. Elle ne pouvait l'aider. Si elle tentait le moindre lien mental avec lui, elle serait aussitôt repoussée et torturée. Un sanglot de frustration lui échappa, résonnant lugubrement dans le silence de la mort. Il n'aurait jamais du venir. Elle l'entoura de ses bras, comme pour le protéger d'un danger qu'elle ne pouvait maitriser. Dans un sursaut de désespoir, elle tenta de riposter, son esprit distrayant un instant celui de l'ombre. Une fraction de seconde, un infime morceau d'un temps qui n'existait plus.

Elle hurla de douleur. Les six autres esprits s'étaient retirés, envahissant son esprit avec une sauvagerie qu'ils n'avaient encore jamais atteins. Elle ferma les yeux, pour ne plus voir sa perte arriver, pour ne plus contempler la souffrance qu'elle imposait à son compagnon. Les esprits avaient raison, elle n'apportait que de la souffrance à ceux qu'elle côtoyait. Elle n'était qu'un catalyseur à emmerde. Une pépite pour tous les cafards de toutes les contrées. Elle attirait les ennuis comme un pot de miel attire un ourson affamé.

Elle sentit alors Laïaga se relever. Pour rechuter à nouveau. Elle gémit lorsque les vagues de sa souffrance atteignirent son esprit. Elle aurait voulu le prendre dans ses bras. Elle aurait voulu pouvoir le jeter hors du royaume des morts, le forcer à quitter ces terres noires. Mais il n'était déjà plus en état. Lorsqu'elle rouvrit les yeux, des signes sans sens flottaient devant elle. Elle y lisait du pouvoir. Faible mais efficace. Elle inspira profondément.

La douleur la frappa de plein fouet. Elle hoqueta, ses poumons en feu, l'estomac au bord des lèvres. Elle hurla à s'en déchirer la gorge, les doigts crispés comme des serres. La douleur envahit tout, débordant son corps et saignant à blanc son esprit. Elle chassa sa tristesse et sa colère, sa peur et ses doutes. Elle lava le cerveau de l'elfe, ne laissant qu'un noyau de calme et d'orgueil. Pendant que ses ongles lacéraient ses bras, cherchant à se débarrasser d'une douleur insupportable, Ellen accueillit la douleur avec soulagement. Son corps exprimait sa souffrance, des larmes roulant sur ses joues, mais son esprit était passé au fer rouge, cicatrisé. Souffrir... C'était une vieille compagne, une amie de longue date. Elle se souvenait de ses joues griffées, des ses poignets lacerés. Des douleurs de chaque blessure, de chaque combat. La douleur lui avait toujours apporté un renouveau.


- Vous n'auriez pas dû...

Sa voix siffla pendant qu'elle reprenait son souffle, les yeux toujours clos. Elle se redressa lentement, sans prêter attention à ce qui l'entourait et s'étira, les bras en arrière, paume contre paume, s'étirant vers le ciel absent jusqu'à ce que son corps se tende comme un arc. Puis, comme si elle tenait une épée dans sa paume, elle esquissa lentement les premiers mouvements de tout combat entre elfes. Elle rouvrit les yeux et ricana.

- Aurais-tu oublier qui je suis, l'ombre ? Aurais-tu oublier qui m'a formé et pourquoi je l'ai été ?

Ses jambes tremblaient sous l'effort, son corps se rebellaient contre ses mouvements qui réveillaient ses blessures. Mais, sans s'attarder, l'elfe millénaire attaqua. Son esprit se projeta en avant, brisant le mur de souffrance de son compagnon et touchant l'ombre qui s'y promenait, fier et victorieux. Elle perça son esprit d'une pensée, comme on brise une goutte de verre, par mégarde, en la laissant tomber. Il était trop sûr de lui. Trop sûr de son pouvoir, trop sûr d'être en sécurité dans un esprit qui n'était pas le sien. Hurlant et pleurant de douleur face aux chuchotis des conjurés, le noyau de calme de son esprit perça les sombres peurs de l'ombre. Elle le revit, adolescent boutonneux, terrifié par son pouvoir. Elle huma le goût de sa vengeance et de sa terreur lorsque l'esprit avait surgi, presque malgré lui. Et chacune de ses pensées étaient un bouclier sur lequel venaient ricocher les mots de pouvoirs des fantômes. A bout de souffle, elle se retira, quelques instants.


- Je suis née pour être une guerrière. Ni une mage, ni une reine. Un général d'une armée. Et à la guerre, ni la pitié ni la souffrance ne compte.

Elle s'accroupit contre Laïaga, posant son front contre son front, effleurant son esprit du sien. Elle manqua de s'étouffer lorsque son désespoir l'atteignit de plein fouet. Elle l'évacua doucement, comme on se décharge d'un fardeau. Les mots lui vinrent en ancien langage, lentement, pour qu'ils imprègnent leurs esprits.

*Elderi elda. Ecoute moi. Calme toi. Ils ne peuvent rien contre le calme. Ils ne peuvent rien si tu les ignores.*

Elle lui adressa un pale sourire épuisée mais triomphant.


- Tu n'as rien merdé. Tu n'as juste pas reçu une formation de guerrier d'élite parmi les elfes.

Elle le serra contre elle, résistant de peu à l'envie de l'embrasser.

- Ne t'inquiète pas... N'oublie pas qui je suis, toi non plus.

Elle se redressa, haletante.

- Nelthor, skölir !

Une brume évanescente se propagea lentement, comme par timidité. L'image d'un elfe apparut, progressivement jusqu'à se matérialiser tout à fait. Ellen le salua d'un hochement de tête, portant deux doigts à ses lèvres.

*Astra esterni ono thelduin. Merci mon ami, mon vieil ami. On dirait que tu vas me sauver la vie, encore une fois.*

*Mor'ran lifa unin hjarta onr. Pas la tienne, Ellen. La sienne. Toi... tu as l'air de t'en sortir très bien. Tu te concentres sur tes adversaires et non plus sur ce qui t'entoure. Notre maitre est fier de toi.*

L'esprit de l'ancien dragonnier se plaça devant les deux vivants, les protégeant de son corps fantômatique. Son esprit s'enroula autour de celui de l'humain, jonglant avec la douleur pour tenter de l'évacuer.

*Tu dois vraiment tenir à elle, Laïaga Sin'Saïan, pour venir la chercher jusqu'ici. Bien peu en auraient eu le courage. Mais tu devrais regarder, ce n'est pas un spectacle que tu verras tous les jours...*

Ellenwen se retourna vers les esprits, les oreilles couchées en arrière comme celles d'un chat, une mimique dédaigneuse aux lèvres. Si son corps menaçait de céder d'un instant à l'autre, elle était bien décidé à ne pas céder d'un pouce. A ne pas reculer.


- Auriez-vous oublier à qui vous aviez à faire, fantômes sans vie ? Cela n'a-t-il aucun sens pour vous ? Si une reine mourait sans aucune hésitation pour sauver son peuple, son peuple mourait sans hésitation pour la sauver. Vous êtes sept ? Nous sommes des milliers !

Elle reprit son souffle, et ricana. Son mot ne fut qu'un murmure. Mais il se répercuta, passant d'esprit en esprit, de loin en loin.

- Skölir, Varden. Défendez votre reine !

Une brume monta.
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Laïaga

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Laïaga
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Ven 27 Jan 2012 - 0:47


-Aurais-tu oublié... L’Ombre...

Les mots traversaient difficilement la gangue de douleur qui m’emprisonnait, dans laquelle je m’enfonçais sans espoir de salut. Je plongeais dans un abîme de silence. Seul. On meurt toujours seul.

-... qui m’a formé...

Mais qu’est-ce qu’elle racontait ? Quelle importance au demeurant ? La douleur était intenable. Un genre de douleur que je n’avais plus éprouvée depuis plus de huit siècles, quand j’étais devenu un Ombre. A l’époque on m’avait aidé, je ne m’en étais rendu compte que tellement plus tard.... Mais aujourd’hui Ellenwen ne pourrait rien faire... Si proche... mais elle ne pourrait rien faire.
Et puis brusquement je sentis le mur de douleur voler en éclats. Une dernière pique de souffrance et puis plus rien. Je battis des paupières sans comprendre, j’étais genoux à terre, haletant, les yeux exorbités, mais en vie alors que je n’aurais pas dû l’être.

-Je suis née pour être une guerrière. Ni une mage, ni une reine. Un général d'une armée.

Ellen’ qui m’avait sauvé ? Probablement, qui d’autre ? Comment est-ce qu’elle avait fait ça ? Alors que je m’étais fait balayer comme un fétu de paille. Je n’avais emmené que des soucis, j’avais fait empirer une situation qui n’était déjà pas très reluisante. J’avais agi d’abord et réfléchi après, d’habitude je faisais les bons choix, mais pas cette fois-ci, fallait-il croire. Je...

*Elderi elda, écoute-moi, fit sa voix dans mon esprit. Calme toi.*

Un frisson violent me parcourut tout le corps. Le nom des choses avait un grand pouvoir, peut-être même plus encore dans ce monde-ci que dans le nôtre. Ellenwen était la seule personne à connaître le mien, et ça aussi, ce n’était pas rien. Alors quand elle le prononça, trois syllabes qui seules n’auraient pas eu le moindre sens, dans la bouche de la personne qui comptait le plus pour moi, le pouvoir du mot me remmena des ténèbres où j’avais failli m’enfoncer, et m’ancra dans l’instant présent.
Le calme et le dédain hein ? Un mince sourire se dessina sur mon visage, en réponse à celui d’Ellen’. Je devais être bien pâle, même dans ce monde sans couleurs. Enfin, de toute façon, avec la couche de vif-argent, ça ne devait pas faire une grande différence.

-On entraîne les guerrières elfes aux ballades dans le monde des morts ? tentai-je d’ironiser, mais ma voix était un peu cassée, et ça ne sonnait même pas très drôle à mes oreilles.

Elle me serra contre elle, je lui rendis son étreinte, le front toujours collé contre le sien, mon sourire s’élargit un peu quand je me rendis compte qu’ici, au milieu du monde des morts, entouré d’esprits assassins, juste après avoir failli y rester, je me sentais sensiblement mieux que depuis qu’Ellen’ avait plongé dans le royaume des morts. Et bien plus encore que depuis que notre lien avait été rompu.
Ellenwen se releva, je l’entendis prononcer un mot en ancien langage que je ne connaissais pas, et moi je restais pensif, les yeux baissés, « n’oublie pas qui je suis », avait dit Ellen’, qui l’avait formé... Les Ombres m’avaient formé... Il y avait un truc, un truc très important, et je devrais mettre le doigt dessus, mais impossible.
Soudain je sentis une présence, étrangère et nouvelle, comme envelopper mon esprit. Je m’apprêtai à la repousser, calmement et froidement, quand ses mots raisonnèrent en moi :

*Tu dois beaucoup tenir à elle, Laïaga Sin, commença l’esprit, et je m’arrêtai.*

Sa voix n’était pas agressive, et il semblait connaître Ellenwen. En grognant, je me redressai, lentement, sentant la fatigue dans tout mon corps. Le corps diaphane de l’esprit qui me parlait se trouvait entre nous deux et le chef des sept esprits. Oh, bien sûr, ils nous encerclaient, mais sa position était sans équivoque. Qui était-il ?

*Bien peu en auraient eu le courage, reprit-il. Mais tu devrais regarder, ce n'est pas un spectacle que tu verras tous les jours...*

Ce fut le déclic. Les symboles que dessinaient les sept salopards dans les airs, dont certains brillaient encore, à leur manière étrange, grisâtre, ce n’était qu’une adaptation du parler des Ombres. Quelque chose que je voyais tous les jours, non, mais que j’avais déjà rencontré, bien longtemps auparavant, quand j’étais un Ombre et sous une forme un peu différente, mais quand même reconnaissable. Moi aussi j’avais oublié qui j’étais... et même si je m’y efforçais le plus souvent, pour une fois, cela allait peut-être m’être utile.

*Tu viens peut-être bien de me faire penser à un moyen de retourner leurs armes contre eux, l’ami... répondis-je à l’esprit que je ne connaissais pas.*

Ils allaient avoir une belle surprise, si j’y arrivais aussi bien que je l’espérais, une bien belle surprise, je...

-Skölir, Varden. Défendez votre reine !

Les mots en ancien langage coupèrent le fil de mes pensées. Je vis la brume se lever et compris instantanément ce qu’il se passait...

<><><><><>

...au même titre que l’Ombre et ses séides. Ils regardèrent la brume s’élever avec appréhension. Les sept étaient puissants, mais le nombre l’emporte toujours, et ils ne pouvaient lutter contre tout un peuple... combien d’elfes répondaient à l’appel de la reine ? Est-ce qu’ils y étaient obligés ? Ou se battaient de leur propre chef ? S’ils y étaient obligés... Le chiffre était trop gigantesque pour qu’un des sept puisse seulement l’imaginer.

*Chef, je crois qu’on s’est fait baiser...
-Qu’est-ce qui te fait dire ça à toi ?
-Une intuition...
-Deux choix s’offrent à nous les gars, reprit l’Ombre*

Et il les leur exposa. Naturellement ils furent tous pour la première option. L’Ombre décida que ce serait la seconde. Il avait attendu sa vengeance pendant mille ans. Et elle allait lui passer sous le nez. Il en aurait fulminé s’il n’était pas assez terre à terre pour chercher avant tout ce qu’il pouvait encore gagner.
La brume qui les entourait n’avait pas de visage, c’était un amalgame de consciences tendue vers eux, vers leur reine, vers le petit îlot qu’ils formaient.

*Chef, je pense vraiment qu’on devrait se tirer.
-Oh que non...*

L’Ombre fixait Ellenwen dans les yeux, attendant qu’elle fasse le premier mouvement. C’était cela la deuxième option : rester, et faire le plus de mal possible. Briser Ellenwen, ce serait bien assez pour supporter une éternité de souffrance. Et s’ils arrivaient à emporter l’humain dans la foulée, ce ridicule humain qui aurait dû être déjà mort, qui l’aurait été à une minute près, alors il aurait passé une bonne journée, en fin de compte, notre Ombre !

<><><><><>

Les elfes par légion nous entourèrent, doucement, comme une brume qui monte du sol, se fait de plus en plus épaisse, jusqu’à être un brouillard impénétrable : voilà ce qu’il s’était passé. Entièrement refermé sur moi-même, je n’entendais pas les innombrables pensées qui devaient bruisser comme autant de conversation.
Ellenwen les avait tous appelés... Toute une armée de morts... Ça en faisait froid dans le dos. Les oreilles rabattues en arrière, un rictus sardonique sur le visage, elle faisait elle-même froid dans le dos. A ne pas donner envie de la mettre en colère. Elle semblait frêle, et essoufflée, entourée par les sept qui voulaient notre peau et a fortiori par la multitude des elfes morts, pourtant elle dégageait une impression de force sauvage, inamovible, inarrêtable.
Il y eut un instant de battement, où Ellenwen fixait l’Ombre et l’Ombre la fixait ; j’espérais qu’il disparaisse, qu’il décide que le jeu n’en valait pas la chandelle et nous laisse en paix. Il n’en fit rien, alors j’espérai que les elfes passent à l’attaque. Mais ils n’en firent rien non plus.
Cela sembla durer une éternité, une éternité de quelques secondes, jusqu’à ce qu’Ellenwen s’effondre. Elle avait vacillé, sur ses jambes, comme si la fatigue, la douleur, tout ce qu’elle avait enduré ces dernières longues minutes la rattrapait sans crier gare,et puis elle était tombée en avant.
Je bougeai avant qu’elle n’atteigne le sol : mes doigts dansèrent en l’air, tandis qu’au fin fond de mes souvenirs j’allais chercher les mots d’ombrique. Ils étaient sept, ils allaient discuter, réfléchir, peut-être une seconde, avant d’attaquer tous ensemble. Mes doigts volaient, presque trop vite pour l’œil, tandis que je débitais des mots et que je sentais mes forces diminuer. Je traçai un dernier symbole. Les sept attaquèrent. Le sortilège se déclencha. L’Ombre poussa un grognement grave en se sentant repoussé. Il me regardait.

<><><><><>

Comment est-ce qu’il fait ça, merde mais comment il a pu ? se demandait l’Ombre. Tout allait de mal en pis. Ellenwen capable de lever une armée, puis l’humain qui utilisait leur propre magie contre eux ; comment avait-il bien pu réussir ? Il avait simplement réemployé des symboles qu’ils avaient déjà créés, mais il avait aussi appréhendé leur sens et utilisé l’ombrique... deux compétences que seuls les Ombres possédaient, normalement.

<><><><><>

Je m’approchai d’Ellenwen, posant un genoux à terre, la retournant doucement sur le dos, je pris son pouls, tentai de sentir son souffle ou sa poitrine se soulever... Mais rien, pas le moindre signe de vie. Pourtant la situation paraissait par trop improbable. Pour commencer, pourquoi les sept l’auraient-ils attaquée si elle avait été morte ?

*Elle est encore vivante ? demandai-je, sans trop savoir s’il saurait me répondre, à l’esprit qui me protégeait. *

<><><><><>

L’Ombre était crispé. Bientôt les elfes allaient attaquer, ils allaient l’anéantir, faire de celui ce qu’il avait voulu faire d’Ellenwen : un débris, sans conscience, une âme en peine, un spectre, encore plus mort qu’il ne l’était avant. Mais rien ne vint. L’Ombre ne comprenait pas.

<><><><><>

-Attaquez-les bon sang, murmurai-je.

Je regardai les elfes, assemblés, par milliers, par millions, ils ne bronchaient pas.

-Mais qu’est-ce que vous attendez ? soufflai-je encore pour moi-même. Vous pourriez les vaincre. Allez !
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Ven 27 Jan 2012 - 16:23


Ellenwen était à bout de souffle, à bout de forces, mais triomphante. Laïaga s'était relevé. Il avait quitté le monde d'horreur et de supplices imaginé par l'ombre. Nelthor veillait à ses côtés et, sous ses ordres, une armée d'elfes se levait. Un petit pas pour une reine, un grand pas pour deux vivants coincés dans le monde des morts. Elle rit à nouveau, contemplant la panique sur le visage de ses ennemis. Ils allaient partir, ils allaient fuir comme des rats désertant un navire. Ou ils allaient souffrir. Jusqu'à perdre le souvenir de leur vengeance. Jusqu'à oublier le nom même d'Ellenwen.

- Enfin.

Ce n'était qu'un murmure, un chuchotis de soulagement, calme et retenu. Elle avait réussi. Elle avait trouvé sa véritable force, s'était souvenu de son rang. Elle qui n'avait jamais voulu être reine, qui n'avait jamais voulu commander d'armée, se retrouvait dans son rôle, plus à l'aise qu'elle ne l'avait jamais été. Devant elle la brume prenait forme. Des visages se dessinaient, reliquat d'apparence disparue. Elle n'en reconnaissait aucun. C'était mieux ainsi.

- Alors, l'ombre, tu ne fuis pas ?

Elle n'était pas surprise. Par certains aspects l'ombre lui ressemblait. Et comme elle, il n'aurait jamais cédé. Elle connaissait le goût amer de la vengeance, du sang versé et de la haine étouffée. Et elle savait que ce sentiment ne mourrait jamais. Il ne partirait pas. Et elle ne le laisserait pas partir. Ses bras ruisselant de sang, sa poitrine meurtrie, ses jambes flageolantes. Elle ne pouvait le laisser partir. Pas s'il risquait de recommencer.

*N'attaquez pas.*

Elle voulait savoir. Elle voulait avoir le temps de connaitre tous les plans du nuisible qui lui faisait face. Elle voulait lui faire crier la vérité, lui arracher les mots de pouvoir qui la mettrait, elle et les siens, hors de portée de toutes ses actions futures. Une protection durement gagnée. Elle ouvrit la bouche, des mots d'ordre sur les lèvres. Et quelque chose se brisa. Elle sentit son corps se déchirer, de l'intérieur. Le poids de la fatigue et de la douleur la submergèrent. Le sort murmuré par les ombres quelques minutes plus tôt ne résonnait plus dans son corps qu'infiniment lentement, faiblement, mais il venait de saper ses dernières forces. Elle s'effondra comme une poupée de chiffons, sans force.

Tout son corps ralentit, son coeur, son souffle. Un minimum vital pour économiser toutes ses forces, pendant que le reste de son corps travaillait à se rétablir. Sans esprit se replia sur lui-même, à peine conscient du monde qui l'entourait. Elle ne sentit pas le pouvoir s'accumuler. Elle ne sentit pas les mains de son ami la retenir, avant qu'elle ne heurte le sol. Et elle ne sut pas à quel point elle était passée près de la mort.

Nelthor jura, les mots les plus orduriers de l'ancien langage se déversant sans fin dans son esprit. Il n'avait pas senti les restes de pouvoir qui imprégnait son amie. Il l'avait laissé user ses dernières forces à défier un ombre qui n'en valait pas la peine ! Et Laïaga se retrouvait maintenant seul. A deux doigts de paniquer. Et qui venait, tout naturellement de lancer un sort en ombrique. L'ancien dragonnier jura à nouveau. Ellen choisissait toujours si bien ses amis ! Et elle en tombait même amoureuse ! Honteux.

Mais l'humain lui avait sauvé la vie. Il était venu dans le royaume des morts la sauver et, il le sentait, il était dragonnier. Et elle avait en lui une confiance absolue.


* Non ! Elle n'est pas morte ! Elle est...*

Il chercha ses mots dans le langage des hommes.

*C'est une transe elfique. Son corps est en... hibernation, elle a ralenti toutes ses fonctions vitales pour préserver ses forces. Le sort de l'ombre a du réussir à fragiliser quelque chose. Son esprit s'est replié sur lui-même et elle n'est plus qu'à peine consciente du monde qui l'entoure. Elle n'est pas en danger, je ne connais pas précisément son état mais dans un jour ou deux, elle devrait se réveiller.*

S'ils parvenaient à la sortir de là... Ce qui risquait d'être un brin plus compliqué que ce que l'humain n'imaginait. Les elfes ne bougeaient pas. Ils protégeaient la reine de leur conscience, faisant un bouclier de leurs esprits. Un grondement sourd de colère et de rage la faisait trembler mais...


*Ils ne peuvent attaquer. Ils ne peuvent désobéir à un ordre direct en ancien langage et Ellen leur a dit de ne pas attaquer.*


Il grimaça de rage à son tour. Il était inutile ! Pas foutu de venir en aide à son amie et reine. Pas foutu de lancer son esprit pour démolir ceux des ombres.

*Nous vous protégerons jusqu'à la mort. Ils ne vous toucheront pas. Mais nous ne pouvons pas mieux faire. C'est à toi de la sortir de là, Sin'Saïan.*


Et de justifier l'amour qu'elle te porte.

*Mais fais vite. Il n'est pas bon pour un vivant de rester parmi les morts. Et Ellen y est depuis déjà trop longtemps. Si elle ne sort pas d'ici, sa transe ne servira à rien.*


A part à observer ta propre mort, une fois devenue habitante de ce royaume.
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Sam 28 Jan 2012 - 1:41


Ils ne peuvent attaquer... Je dus faire un effort pour ne pas éclater. Le calme, le calme était ma meilleure arme, il ne fallait pas perdre mon calme... Au moins les elfes nous protégeaient-ils. Mais l’esprit gardien avait raison : nous ne pouvions rester ici indéfiniment.
Personne ne bougeait. Personne ne semblait même savoir quoi faire. On pouvait presque parler de guerre, au vu du nombre d’âmes qui s’étaient jointes au conflit ; est-ce qu’une telle situation s’était déjà produite dans le monde des morts ? Est-ce qu’il y avait des esprits immémoriaux qui avaient déjà vécu ça ?

*Il est enfin temps de partir alors, fis-je d’un ton las.*

Accroupi près d'Ellenwen, je passai un bras sous ses épaules et l’autre sous ses genoux. Quelle bonne blague si je réapparaissais dans le monde des vivants seul... Je la tins fermement, je ne pouvais pas lier son esprit au mien comme j’aurais voulu le faire, mais c’était toujours mieux que rien.

*Adieu l’ami, merci pour le coup de main.*

Je fermai les yeux. Le monde des morts disparut à mon regard. A la place je voyais la caverne, les deux couchettes, les habits dans un coin et le coffret contenant le vif-argent resté ouvert. Je voyais les aspérités de la roche, les feuilles mortes et les épines que le vent avait charrié, la neige aussi à l’entrée de la grotte.
J’étais arrivé par là et j’allais y retourner. Je tendis toute ma volonté, toutes les forces qu’il me restait vers ce but, si bien que je pouvais presque sentir les odeurs de mon monde, de délicieuses odeurs vivantes ; il n’y avait pas d’odeur ici. Pas plus qu’il n’y avait de souffle de vent, je pouvais presque entendre le vent souffler en tempête. Mais tout cela restait dans ma tête, aussi fort que je le désire, rien ne changea. Je rouvris les yeux sur un camaïeu de gris.

*Ça risque d’être un brin plus compliqué que ce que j’imaginais, fis-je à l’elfe. Tu sais comment quitter ce monde ?
-Il te faut un point d’ancrage... une raison de rentrer, me répondit-il.
-Une raison de rentrer ?
-Pense à quelqu’un, ou quelque chose, à qui ou à quoi tu tiens. D’assez important à tes yeux pour... Hé bien, pour qu’il soit impensable de l’abandonner..
-Ellenwen, par exemple ? proposai-je, ironique.*

L’esprit ne répondit pas. De toute façon au fond je n’avais pas envie de rire. Étrangement. Je ne laissais pas grand chose dans mon monde. L’Empire m’avait rejeté avant même que je ne le rejette moi-même...

*Dis-moi, vous allez vous regarder en chiens de faïence pendant longtemps, avec les sept pas beaux là ? *

De toute façon Myad s’en sortait très bien sans moi. Et mes amis, ils étaient presque tous morts ou disparus depuis longtemps. Il y avait Max, que j’avais retrouvé quelques minutes plus tôt à peine, il y avait Dandelo, et quelques autres... mais je n’étais pas suffisamment attaché à eux.

*Quand Ellenwen partira nous partirons aussi, répondit l’esprit.*

J’avais bien une maison mais personne n’y vivait, j’étais apatride, rien qu’une sorte de vagabond. J’étais triste et seul. Ellenwen avait été une lueur d’espoir, un phare dans la nuit, et bien plus.

*Donc l’Ombre et ses petits copains vont tranquillement retourner d’où ils venaient, se livrer à leurs petites exactions ?*

Ils ne bougeaient pas, pas plus que les elfes, ils devaient avoir compris qu’ils ne craignaient rien mais qu’ils étaient impuissants, guetter l’ouverture, l’erreur. Et moi, le sorcier, que devais-je faire ? Est-ce qu’ils pouvaient agir contre moi quand j’invoquais des esprits ? Est-ce que je devais avoir peur chaque fois que je traçais un pentacle ? Qu’est-ce que ça changeait si nous ne pouvions pas nous en aller ?

*Il faut croire que oui...*

Je hochai la tête. « C’est à toi de la sortir de là », avait dit l’esprit. Facile à dire, justement... Je n’avais pas vraiment réfléchi avant de venir, et puis, je pensais que cette histoire de lien était une sécurité. Un filet, en cas de chute inopinée. En fait je n’avais pas anticipé mon retour. Mon regard glissa sur le corps nu, le presque-cadavre d’Ellenwen. J’aurais bien eu besoin d’une lueur d’espoir, là, maintenant.
Une lueur d’espoir... Un petit espoir de sauver Ellenwen, de ne pas mourir ici comme un con. Qu’est-ce qu’il restait au monde qui pouvait valoir la peine ? Je levai les yeux vers l’Ombre. Il me regardait en souriant.

-On ne retrouve pas le chemin de la maison ? fit-il, taquin.

Je n’étais même plus dragonnier. Le lien avec mon dragon était rompu depuis longtemps. Je fixai l’Ombre, sans expression, il souriait et je restais calme, j’abaissai toutes les protections dont j’avais entouré mon esprit et je restais calme, mon regard vert émeraude plongea dans le sien qu’on imaginait rouge sang et je restais calme.

*Yarrock... appelai-je doucement.*

L’esprit qui m’avait protégé me parla, mais je ne compris pas. J’avais beau chercher je ne sentais nul lien, mais j’avais décidé il y avait très longtemps de ne jamais laisser tomber. Qu’il y avait toujours de l’espoir. Je ne m’étais pas toujours tenu à cette ligne de conduite.

*Yarrock, fis-je encore, avec plus de force, sans me soucier de ce que l’Ombre pourrait m’attaquer, calme parfait.*

Cette fois il n’y avait pas que ma vie en jeu. Abandonner c’était condamner Ellenwen. Le lien était brisé. Mais j’essayais quand même.

*YARROCK !*

Il y avait Ellenwen... Si tu ne fais rien pour moi, vieux frère, fais quelque chose pour elle... J’avais hurlé, cette fois-ci, et, d’une manière si infime que je faillis ne rien remarquer, je sentis une réaction. Un tiraillement que je n’avais pas ressenti depuis des mois... des années... le vieux lien existait toujours. J’en aurais pleuré de joie. Je me retins.
Pas de mot, juste un sentiment : la curiosité.

-C’est inutile l’humain, tu vas mourir ici, tout comme ton amie la reine des elfes... fit l’Ombre.

Ma détresse de ne pouvoir quitter cet endroit, mon amour pour Ellenwen, j’essayai de faire passer tout cela par le lien que je pensais disparu. Yarrock aurait aussi bien pu décider de nous laisser tomber. Qu’un traître et un Parjure ne se rachetait pas.
Le lien forcit. Le lien immémorial du dragon et son dragonnier. Je le sentis qui me tirait à lui.

-Allons, tu ne pensais quand même pas qu’un simple lien mental suffirait à remmener mes proies dans leur monde !

Je me concentrais sur Yarrock et lui se concentrait sur moi. L’Ombre souriait de toutes ses dents, apercevant une chance de gagner la partie. Le lien entre dragon et dragonnier... Est-ce que cet Ombre imaginait ce que ça représentait ? Petit à petit je le sentais se tisser, comme avant, comme il l’avait été du temps où j’étais un dragonnier. Gagner en force et en solidité.
Et soudain je sentis cette présence, familière et amicale, en bordure de ma conscience, me soutenir, m’aider, j’imaginais un petit sourire en coin sur ses lèvres. Je sentis sa force s’ajouter à la mienne et celle de mon dragon.

-Tu vas mourir à petit feu Sin’Saïan, et l’elfe avec toi, tu vas sombrer dans l’oubli, l’humain.
-Jamais !

Et l’Ombre s’effaça, comme un mauvais rêve,il disparut, le monde des morts se floua, vira au blanc, puis à l’ambre, et enfin je fis quelques pas hésitants de l’autre côté du portail, dans la caverne de la Crête. Je voyais les feuilles mortes et les épines, et la neige qui s’accumulait à l’entrée sur une épaisseur déjà impressionnante, j’entendais le vent souffler en tempête.
On était de retour. Je manquai tomber à genoux, tant j’étais épuisé. Je me retins, je déposai doucement Ellenwen sur une des couches de la caverne.

*Merci, Yarrock, merci infiniment...
-Je pourrais faire n’importe quoi, pour sauver mon dragonnier, répondit sa voix rauque dans mon esprit.
-Tu me considères à nouveau comme ton dragonnier ?
-Il se pourrait bien que tu le sois redevenu, petit homme, fit-il. C'est très possible...*

Je souris malgré le froid qui me faisait frissonner. Le vif-argent ne protégeait absolument pas contre la morsure du vent. J’aurais voulu m’effondrer au sol et dormir des jours, j’étais vanné, j’avais encore mal de l’intrusion de l’Ombre dans mon esprit. Mais réchapper de ça pour mourir de froid était d’un profond ridicule, et je réussis, d’un pas hésitant, à attraper la couverture du second lit. Ni la force de m’habiller, ni celle de vêtir Ellenwen ; je m’allongeai à côté de son corps inanimé, sa peau était gelée sous le vif-argent.
Je l’enlaçai, enroulai la couverture miteuse autour de nous, et je pus enfin me laisser aller à tenter de renouer le lien avec elle, de toucher son esprit replié sur lui-même : on était en sécurité maintenant, on était rentrés, ensemble. Je dormais presque avant de fermer les yeux.
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Ellenwen

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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Sam 28 Jan 2012 - 13:22


L'humain semblait perplexe. Se sauver, et sauver avec lui la reine des elfes, celle à qui il tenait tant, semblait être trop dur pour lui. Il se décourageait si facilement. Depuis sa première tentative, et son premier échec, il restait à regarder les ombres, serrant vainement le corps d'Ellenwen dans ses bras. Nelthor retint un soupir. C'était à se demander ce qu'Ellen lui trouvait à cet ahuri... Il parlait beaucoup. Posait d'innombrables questions, et ne songeait même pas à l'évident. Nelthor tendit son esprit vers celui des autres elfes. Leur conversation fut brève mais instructive. Si l'homme ne réussissait pas, il mourrait. Eux se chargeraient de sauver la reine.

*Ellen ne va pas aimer.*
*Ce qu'elle ne saura pas ne pourra pas lui causer de tord.*
*Il est quand même venu la chercher...*
*En mettant sa vie en danger.*

Nelthor attendit. Ils attendaient tous, pendus aux lèvres et à l'esprit d'un humain, qui maitrisait l'ombrique sans être un ombre, et qui n'était plus que l'ombre du dragonnier qu'il avait été. Qui ne songeait même plus au lien puissant qui le liait avec un dragon. Qui... Qui venait de s'en souvenir ! Nelthor poussa un soupir de contentement. Il était temps ! Il n'aurait pas aimé tuer le seul homme qu'eût vraiment aimé Ellen depuis lui. Surtout quand il promettait d'être intéressant et d'apporter un certain... piquant chez les elfes. Et s'il pouvait un peu emmerder sa vieille amie... Juste avant que le dragonnier ne disparaisse il lui lança :

*N'oublie, Sin'Saïan, chez les elfes, l'important est toujours caché !*

Ellen allait bien rigoler !

_____________

De loin, de très loin, Ellen sentit un changement dans l'esprit de son compagnon. Un lien qu'elle n'avait pas senti depuis longtemps. Une sécurité et une joie qui lui semblèrent déplacées dans un monde où ils risquaient à chaque instant de disparaitre. Mais elle s'apaisa. Elle se sentait plus calme, plus en sécurité. Elle sentit l'esprit de Nelthor l'effleurer. Si aucun mot ne l'atteignit, le message était très clair :

*Si tu ne lui dis rien, tu es vraiment trop conne !*

Trop conne ? Pourquoi était-elle trop conne ? Comme si elle avait le choix. Elle était reine des elfes, il était ancien empereur léonien. Elle était elfe, il était humain. Elle ne pourrait pas ou peu quitter la forêt, il avait l'habitude de vivre dans les grandes cités humaines. Elle ne pourrait jamais lui imposer tant de contraintes. Elle n'allait pas... elle ne pouvait pas...

*Idiote !*

Mais elle allait devoir s'éloigner de son ami. Il allait être dur de rester à ses côtés sans rien dire, sans rien laisser transparaitre. Elle avait beau être devenue experte pour cacher ses sentiments, elle ne voulait prendre aucun risque.

Brusquement, elle sentit la chape de plombs qui pesait sur ses épaules disparaitre. Elle respira profondément, agitée d'un sursaut de vie. Puis elle se détendit lentement. Lorsque l'esprit de Laïaga l'effleura elle lui adressa une vague de paix et de contentement. Elle était heureuse. Son corps se réparait doucement, sa propre magie fermant ses plaies, restaurant sa peau et ses veines. Au milieu de la nuit, sa respiration et son coeur retrouvèrent un rythme normal. Son esprit s'ouvrit, touchant à peine ce qui l'entourait. Elle ouvrit les yeux, quelques secondes, à peine consciente. Sentant une chaleur incongrue contre elle, le poids insolite d'un bras sur ses hanches, elle se retourna lentement. Et se retrouva nez à nez avec Laïaga. Elle cilla, étonnée puis sourit. Elle se recroquevilla légèrement et se blottit dans les bras de son ami, sa tête contre son épaule. Elle ne craignait plus rien.

Bien des heures plus tard, l'elfe émergea complètement de sa transe. Son corps était à nouveau réparé, ses blessures refermées et son esprit reposé. Elle ouvrit lentement les yeux... et se retrouva le visage à quelques centimètres de celui de Laïaga. Nu. Comme au premier jour. Et elle n'était pas mieux. Elle se redressa d'un bond, le feu aux joues. Elle heurta la paroi rocheuse, étouffa un petit cri de douleur, et manqua de renverser le lit de camp.


- Argh !

Le son de sa voix et la douleur dans son dos la calmèrent. Elle était vivante ! La froideur du mur, le soufflement du vent, l'odeur de neige, elle était en vie ! Ils étaient en vie ! Elle éclata de rire, les larmes aux yeux. Et s'arrêta, à nouveau consciente de la chaleur du bras de son compagnon, posée dans le creux de ses reins. Elle se crispa, sur la défensive. Elle était mal barrée.

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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Sam 28 Jan 2012 - 23:21


-Argh !

Le cri de surprise, comme le mouvement brusque d’Ellenwen qui frappa contre la paroi de la caverne me réveillèrent en sursaut. Après avoir failli mourir tous les deux, et même si j’étais très, très fatigué, j’avais le sommeil agité. Mais je me rendis vite compte qu’il n’y avait pas de danger. Ellenwen avait simplement été surprise. De se réveiller nue dans mes bras ? Possible, il fallait dire que la situation ne s’était pas souvent produite...
J’eus un petit rire en l’entendant rire elle-même, puis s’arrêter brusquement ; qu’est-ce qu’il lui passait par la tête en ce moment ?

-Bien dormi ? demandai-je avec une certaine banalité, sans trouver la motivation de remuer. Combien de temps ça fait qu’on est rentrés, tu crois ?
*Une nuit seulement, répondit une voix que je connaissais bien dans ma tête.*

Mon sourire s’élargit. Le lien avec Yarrock n’était pas mort. Cela ne serait peut-être pas facile, mais le dragon était prêt à m’accepter à nouveau. Et puis, même si cela n’avait duré qu’une seconde, Shaka nous avait aidé dans le monde des morts... Il nous avait sauvé la vie... Il avait compensé les forces qui me manquaient, et m’avait aidé à retourner dans notre monde, et ce n’était pas rien. Et puis il y avait Ellen’. Je touchai légèrement son esprit, heureux de ne plus me sentir séparé d’elle. Je la sentis tendue.

-Tout va bien ? demandai-je en me redressant.

Je pris conscience mon bras qui l’enlaçait encore, bien plus qu’amicalement, au moment où je le retirai. Je retins mon regard de glisser sur elle, j’aurais voulu me pencher et l’embrasser, ou au moins dire quelque chose de stupide avec « je t’aime » dedans, ou quoi que ce soit dans ce goût-là, mais... non, impossible.
Je me levai, laissant derrière moi la chaleur de la couverture en laine et du corps d’Ellenwen, et frissonnant en sentant la roche froide sous la plante de mes pieds. Qu’avait dit l’esprit déjà ? « L’important est toujours caché »... Qu’est-ce qu’il avait voulu me faire comprendre ? J’imaginais en me moquant de moi-même que ça pouvait être ce que j’espérais. Bien sûr il y aurait eu un millier de petites choses qui seraient allées dans ce sens, elle m’avait choisi pour être le lien qui l’ancrerait dans notre monde tout de même... sauf que prendre ses désirs pour des réalités, c’était stupide. Les gens tiennent pour vrai ce qu’ils souhaitent l’être, c’est bien connu, pas vrai ?
Je m’approchai de mes affaires, attrapai mes braies et les enfilai rapidement, remmenai le reste sur un bras en retournant m’asseoir à côté d’Ellen’.

-Tu sais, je crois que tu attires les aventures incroyables, lui dis-je avec un petit sourire tandis que j’enlevais à la main le gros du vif-argent de mon visage et de mon torse. Même si bon, l’histoire de la Guilde, c’est peut-être un peu ma faute...

Le sourire faisait un peu faux, j’aurais dû être content d’être ici, et je l’étais assurément, mais j’avais ce sentiment d’inachevé. Est-ce que je pouvais vraiment décider de continuer à faire comme si de rien n’était ? Comme si Ellen’ n’était rien de plus que ma tante ? Ma seule famille, par alliance peut-être, mais ma famille quand-même.
Elle ne comprendrait pas, de toute façon, au mieux elle me rabrouerait gentiment, mais elle était la reine des elfes... ce n’était pas un boulot simple, que l’on commençait au matin et quittait le soir, en fin de journée, pour redevenir quelqu’un comme tout le monde.

-En fait, je n’ai jamais dû me retrouver aussi souvent dans la mouise qu’en ta compagnie, continuai-je en enfilant ma chemise. Enfin, à part peut-être avec Shaka. On s’était quand même retrouvés à combattre un Ombre, à deux, alors qu’on apprenait encore la magie, avec lui...

Est-ce qu’on pouvait dire que c’était mieux ainsi ? Est-ce que ce n’était pas un peu ridicule, d’avoir fait tout ça, et de ne rien oser dire maintenant ? « L’important est toujours caché » hein ? Il fallait croire que ça ne marchait pas que pour les elfes.
Mais autant être réaliste. C’étaient des idées à la con qui me passaient par la tête. Et puis j’avais déjà montré que j’attirais plus d’ennuis à Ellenwen que l’inverse, quoi que j’en dise. Autant l’épargner, j’irais boire un verre aux occasions manquées, à la Pause du Marin, et voilà tout. Ça n’empêcherait pas le monde de tourner.
En plus, Ellen’ et moi, ça n’aurait jamais collé. A regret, silencieusement, j’abandonnai définitivement mes espoirs.

-D’ailleurs tu aurais vu la tête de l’Ombre tout à l’heure quand on a réussi à partir ! repris-je avec un petit rire qui ne sonnait pas très juste, lui non plus. Il a... il... il...

Et puis, sans réfléchir, je me penchai vers elle et posai mes lèvres sur celles d’Ellenwen.
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Dim 29 Jan 2012 - 17:52


Son cri devait avoir réveillé Laïaga. Ellenwen le vit se redresser, paniqué, comme s'ils avaient été en danger. Elle ne put s'empêcher de sourire devant son air de hibou mal réveillé. Il avait encore les yeux collés par la fatigue et le sommeil, du vif-argent avait séché sur sa peau et collait à ses cheveux. Il bougeait à peine, comme pour préserver ses forces. En un mot, il ressemblait à un loir sortant d'hibernation.

- Les elfes ne dorment pas. Ils se reposent. Mais dans l'ensemble oui, c'était agréable.

Un souvenir fugitif lui remonta en mémoire. Un sentiment de sécurité et de chaleur, qui l'avait poussé à se blottir dans ses bras. Elle rougit légèrement, priant pour qu'il n'ai rien senti. Et que lui ne se souvienne de rien. Ce qui était probablement le cas. Il retira son bras, posé sur sa hanche, sans une seule hésitation, sans un seul regard. Tendue, l'elfe fronça les sourcils, perturbée par l'apparente décontraction de son compagnon. Il ne lui adressa aucun regard, comme s'il était fâché. Comme s'il lui en voulait de quelque chose. Un instant, elle craignit qu'il ne regrette d'être venue la chercher, ou d'avoir mis sa vie en danger pour elle. Même si, après tout, elle n'avait rien demandé. Elle toucha son esprit, discrètement, et le sentit distant, froid et absent. Blessée, et vexée - c'était donc si peu surprenant de dormir avec une elfe dévêtue ?! - elle tira les couvertures à elle, s'enroulant dans l'étoffe rugueuse comme dans une robe.


- Ça va.

*Et ça irait encore mieux si tu ne te promenais pas entièrement nu en plein hiver...*

Pour se donner une contenance, elle entreprit de condenser un peu d'eau dans le creux de sa paume et entreprit de se débarbouiller. Elle avait presque fini de se nettoyer le visage lorsque l'affaissement de lit lui apprit que l'ancien empereur était revenu s'assoir à ses côtés. Elle rouvrit les yeux et le regarda. Son sourire manqua de lui arracher un soupir de soulagement. Il ne regrettait pas. Elle lui sourit à son tour, prenant garde de ne fixer que son visage. Elle s'était probablement trompée.

*Mwouais...*

Il était peut-être juste mal réveillé ? De toute manière, elle s'en fichait, non ? Elle se détendit légèrement, et entreprit de démêler ses longs cheveux blonds.


- Tu sais, la réciproque est assez vraie. Mais si tu n'as pas encore atteins le niveau de Pierrot pour te fourrer de toi-même dans des emmerdes, tu les attires sans avoir besoin de rien faire... Et pour la Guilde, je suis désolée, mais pour le coup c'est quand même totalement de ta faute.

Elle hésita quelques instants.

- Merci d'être venu. C'était dangereux, stupide et assez suicidaire... Mais...

*Je suis heureuse que tu ais été là ? Tu as failli nous tuer tous les deux mais ça n'a aucune importance ? C'était le plus beau geste qu'on ai jamais fait pour moi ?*

- Merci.

Elle se sentait un peu triste, comme quand on voit partir un ami proche que l'on ne verra plus que de loin en loin, à l'occasion de retrouvailles factices et guindées. Mais après tout, c'était beaucoup mieux comme ça, quoiqu'en dise Nelthor, et quoiqu'en pensa Finwë, qu'elle imaginait déjà soupirer. Elle s'apprêtait à se lever, pour enfiler pudiquement pantalons et chemise, lorsque Laïaga se pencha vers elle et l'embrassa.

- Mmmmh !

Son cri étouffé était un mélange de surprise, d'incompréhension, teinté d'un soupçon de joie et de trois ou quatre autres sentiments qu'elle n'arrivait pas à décrire. Il était un ancien empereur. Il devrait être son ennemi juré. Il était l'amant de sa nièce. Et un parjure. Et...

*Ta gueule !*

Les lèvres contre celle de son compagnon, Ellenwen esquissa un sourire, soulagé et heureux. Pour une fois, pour une petite fois dans sa vie, elle avait le droit à un peu de réconfort et de détente, non ? Elle se dégagea lentement, doucement et détailla l'homme qui lui faisait face. Ses yeux verts. Son beau visage. Ses cicatrices et sa brulure qu'avec un peu de patience et d'acharnement elle ferait disparaitre pour retrouver le visage fin qu'elle connaissait bien. Et son corps dont elle avait pu... son corps qui... Son corps. Sans trop de poser de questions, sans quoi elle aurait paniqué, elle retira un peu de vif-argent des lèvres de son compagnon et souffla :


- Oui. Là on est vraiment dans la merde.

Et elle l'embrassa à son tour, timidement. C'était... agréable... Un peu différent de ce qu'elle se souvenait, mais tout cela remontait à si loin ! Elle sentit des larmes lui monter aux yeux, sans trop savoir pourquoi. Un mélange de joie, de tristesse et d'un soulagement sans fin, contrecoup de sa visite mortelle. Elle se blottit dans les bras de Laïaga, enfouissant sa tête dans son cou. Elle y resta plusieurs minutes, savourant le silence et la paix avant qu'un minimum de conscience ne se rappelle à elle. Elle se crispa légèrement, sans bouger. S'il voulait vraiment... si ce n'était pas juste qu'un coup de folie provoquée par l'approche de la mort, elle se devait au moins d'être honnête. Elle se détacha légèrement, toujours crispée, et sans oser regarder son ami. Elle effleura son esprit, prit une grande respiration et chercha ses mots.

*Je... Je ne sais pas très bien comment formulé ça mais... chez les elfes nous n'avons pas de mariage, pas de liens et pas d'engagement solennel mais... choisir un compagnon, ou une compagne, c'est quelque chose de sacré et de plus profond que chez les humains. Si tu me choisis, ça ne sera pas sans conséquences. Beaucoup d'elfes ne vont pas du tout aimer mon choix et tu ne seras pas souvent le bienvenu là ou tu iras. Tu es ancien empereur, parjure... Et moi je ne pourrais guère quitter le Du Weldenvarden. Et puis, tu es humain et je ne sais pas si tu pourras t'habituer à nos coutumes et à notre vie.*

Elle releva la tête, gênée et malheureuse. Elle n'avait aucune chance. Même si pour elle, le choix était déjà fait.

*Et je suis tellement plus vieille que toi !*

*Et tellement plus inexpérimentée ! Plus d'un millénaire sans connaitre aucun homme... Elle va galérer !*

Ellen rougit violemment, sentant que l'esprit de Finwë avait aussi touché celui de Laïaga. Elle en resta sans voix. Elle en avait oublié la présence du loup, dans un coin de son esprit.
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Laïaga

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Laïaga
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Lun 30 Jan 2012 - 0:55


Nous nous écartâmes un petit peu, Ellen’ souriait, je lui souris en retour. Un sourire franc et sincère cette fois-ci, un vrai sourire heureux, finalement peut-être que tout était pour le mieux. Que cette journée était une belle journée.

-Oui. Là on est vraiment dans la merde.

J’eus un rire bref en entendant ça. Bon, peut-être que tout n’était pas totalement pour le mieux. Oh, il y avait bien un million de détails qui faisaient que l’on se retrouvait dans une situation pas forcément très enviable... mais j’imaginais sans trop de problèmes faire avec. Ellen’ m’embrassa à nouveau ; elle devait sans doute être d’accord avec moi.
Je passai mes bras autour de sa taille, l’enlaçant avec douceur, bon sang et dire que j’aurais pu la perdre, et...

*Il y en a qui se la coulent douce...
-Il y a longtemps que je ne m’étais pas senti aussi content tu sais ? Vraiment très longtemps.
-Je sais petit homme...
-Tu... Tu viens nous rejoindre ? demandai-je au dragon.*

Il me transmit l’équivalent mental d’un éclat de rire au travers de notre lien.

*Ça fait une journée que je suis en vol figure-toi ! J’ai entendu ton petit cri, avant de sauter dans le monde des morts, du bout du Hadarac !*
-Oh...*

Alors il était venu à mon secours avant que je ne l’appelle. Il aurait très bien pu arriver à la Crête et décider que finalement je n’en valais toujours pas la peine, je le connaissais, mais il ne l’avait pas fait.
Je sentis Ellenwen se détacher légèrement de moi, un peu tendue, je pouvais le sentir tant au contact de son esprit qu’au fait qu’elle ne me regarde pas directement. En quelques secondes, Ellenwen résuma tout ce qui faisait que notre union était totalement improbable. Et puis une voix nouvelle y alla de son petit commentaire impromptu à la fin ; il me fallut quelques secondes pour reconnaître Finwë, le loup qui accompagnait toujours la reine des elfes. Je souris mais me retins de me moquer – gentiment, entendons-nous ! – de la gêne d’Ellen’.

*Je serais curieux de voir ce que c’est, un engagement solennel, pour les elfes, fis-je avec une pointe d’ironie.*

Cela me paraissait déjà bien solennel à moi, pas du tout le genre d’engagement que l’on pouvait prendre à la légère. Néanmoins elle n’avait peut-être pas envie de plaisanter là-dessus, je la sentais triste, comme si elle venait de me perdre, juste après m’avoir eu. Après être allé la chercher jusque dans le royaume des morts, après avoir fait le premier pas malgré ce que ça représentait de risques de se faire envoyer paître, après tout ça, c’était impensable. Tu ne t’en tirerais pas comme ça Ellenwen, tout serait tellement trop simple ! Et triste.

*Je me ferai à tout ça, lui répondis-je après un court silence, un petit plus grave. J’ai plus ou moins l’habitude qu’on ne m’aime pas... Si tu veux de moi comme compagnon, malgré les implications politiques, malgré le désaccord de ton peuple, alors mon choix est tout fait !*

Ce n’était pas tout à fait vrai bien sûr, il n’était jamais agréable d’être détesté, d’autant qu’elle avait oublié de préciser que j’avais été un Ombre pendant plus de sept siècles, à moins qu’elle l’ignore, je ne savais pas trop que penser. Mais ce ne serait plus vraiment de la solitude, je ne serais pas totalement seul, et ça ça changeait tout. De toute façon, des elfes qui me détestaient ouvertement ne pouvaient qu’être mieux que le gratin hypocrite et jaloux du Saint-Empire. Et surtout, Ellenwen valait amplement le sacrifice consenti. Je posai mon front contre le sien. Je pouvais sentir son esprit, sa tension.

*Ne t’inquiète donc pas, je suis sûr que tout sa passera bien ! dis-je en ancien langage.*

Bon sang après tout ce qu’on venait de traverser, tous ces petits obstacles comme un Ombre millénaire tentant de nous tuer ou la parjure la plus folle d’Alagaësia extériorisant ses pulsions sadiques sur nous que nous avions surmonté, je n’imaginais pas grand chose qui puisse être pire. Les elfes étaient des créatures immortels et censément sages et posées.

*Et puis, pour cette différence d’âge, est-ce que ça a vraiment l’air d’avoir jamais eu de l’importance ? continuai-je en repassant à ma langue naturelle. D’autant que j’ai quand même quelques huit siècles derrière moi.*

Même si ce n’était pas tout à fait pareil que son plus que millier d’années d’existence, puisque je n’avais pas été maître de moi-même pendant la majorité de ce temps, mais les souvenirs de cette longue période subsistaient. J’eus un petit sourire qui disait « fais-moi confiance » et déposai un rapide baiser sur ses lèvres. Indicible plaisir que d’enfin pouvoir l’embrasser.

-En plus, tu vas en boucher un coin à tous tes conseillers là ! dis-je à voix haute, d’un ton plus léger.

Je n’avais pas relevé la remarque de Finwë pour ne pas ajouter au malaise de la jeune femme de mille cinq cent ans que je tenais enlacée. Brusquement je me rendis compte que nous avions oublié... enfin que j’avais oublié, hé bien, à peu près tout ce qui se trouvait au-dehors de cette grotte, notamment un certain apprenti magicien qui avait dû rencontrer son ami l’homme-bête depuis un moment. La malédiction sur lui devait donc être levée (je l’imaginais mal se faire tuer, accompagné de deux dragonniers et d’un dragon qu’il l’était.

-Tu as prévu de faire quoi maintenant ? lui demandai-je. J’aurais rien eu contre rester ici et profiter un peu de toi... sans aucune arrière pensée !... avant d’affronter toutes les difficultés que va soulever le fait qu’on soit ensemble, mais je suppose que c’est pas possible ?

*Si tu m’as fait voler pendant des heures d’affilée pour rien, Laïaga, je vais mal le vivre je crois !
-Hé mais j’ai rien...
-Surtout pour me retrouver en pleine tempête et affronter le vent et la neige !*

Je ne répondis pas, me contentant d’exprimer exaspération et amusement tout à la fois.

-D ailleurs Yarrock, mon dragon, ne devrait pas tarder à nous rejoindre, annonçai-je à Ellenwen avec un grand sourire.

Elle savait que je l’avais perdu longtemps auparavant, elle m’avait même proposé de m’aider à le retrouver, finalement elle y était parvenue sans le savoir. J’étais curieux de voir sa réaction !
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Ellenwen

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Ellenwen
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Message Sujet: Re: Passage vers le monde des morts [protégé par bouclier] | Lun 30 Jan 2012 - 23:07


Finwë avait dépassé les bornes ! Ellen avait beau être plus proche du loup que de n'importe qui - Laïaga compris - et, en temps normal, adorer son humour, elle était furieuse. D'une pensée, elle coupa le lien avec celui-ci brusquement. Est-ce qu'elle se permettait de l'observer et de faire des commentaires lorsqu'ils rejoignaient quelques louves solitaires, une fois le printemps venu ! Elle se retourna vers Laïaga, prête à le tuer sur place s'il faisait le moindre commentaire, se permettait la moindre moquerie. Mais elle se retrouva face à un sourire désarmant, amusé mais sans moquerie. Elle se passa la main dans les cheveux et sourit à son tour, par contagion.

- La dernière fois que j'ai assisté à un engagement solennel, tous les elfes m'ont juré allégeance et protection, si ça peut te donner une idée.

Elle se détendit, constatant que son laïus, pourtant fortement pessimiste, ne semblait pas avoir troublé sa détermination. A priori, il semblait aussi fou qu'elle. Ils s'étaient bien choisis... Elle secoua la tête, faussement désespérée, mais touchée par les paroles de son compagnon. Si elle voulait de lui... elle rit doucement. Comme si, en l'embrassant elle ne le lui avait pas clairement signifié. Depuis le temps qu'elle était reine des elfes, elle avait parfois l'impression que son esprit s'était scindé en deux, et qu'une partie d'elle calculait chaque risque et chaque bénéfice. Elle posa son front contre celui de son compagnon, rassurée.

*C'est ça l'avantage d'être la reine, personne ne peut rien me dire. Et je me moque totalement de ce qu'ils pourront dire. Je t'ai choisi.*

Elle se repositionna dans ses bras, s'installant confortablement. Elle se sentait à nouveau en sécurité et totalement heureuse. Avec la vague impression d'avoir bu de l'hydromel et de vivre un instant étrange et unique. Ils étaient dans une grotte, perdus à côté du royaume des morts, alors qu'une tempête de neige faisait rage au dehors, et ils étaient dans les bras l'un de l'autre, comme le premier et dernier couple de l'univers. Et on lui jurait en ancien langage que tout allait bien se passer. Soit son compagnon avait trouvé la solution pour mentir en ancien langage, soit il avait une foi absolue, parfaite, et totalement folle, en l'avenir. Ce qui, à bien y réfléchir, n'était pas si étonnant pour une personne qui l'avait entrainé en plein territoire ennemi, pour la tenter de la sauver quelques heures plus tard, et qui venait de se précipiter tête baissée dans le royaume des morts.


- Merci de me rappeler que j'ai presque le double de ton âge.

Elle lui donna une petite pichenette sur le bout du nez avant de lui rendre son baiser. Définitivement étrange mais définitivement délicieux.


- Que tu crois, ça va surtout leur donner une superbe raison de marmonner, de chuchoter et de colporter des ragots.

Elle retira la couverture à elle, un peu gelée malgré tout... et éclata de rire devant la phrase de Laïaga. Une crise de fou-rire, absolument hors contexte, mais reposant après le stress qu'elle avait subi dans le royaume des morts. Sans aucune arrière pensée... Ben voyons...

- Hé bien... Je ne serais pas contre un bain bouillant, un repas chaud et quelque chose de plus moelleux que ce lit pour parler avec toi. Et des vêtements propres. Mais pour le moment, je n'en ai aucune idée. Je n'ai pas envie de braver une tempête de neige, ni de quitter tes bras. Donc je suppose que si, on a un peu de temps. Pas énormément mais c'est toujours ça de gagner...

*Yarrock ? Yarrock !*

Soit Ellenwen devenait gâteuse, soit Laïaga venait de parler de son dragon porté disparu des années auparavant. Sa première pensée fut un petit gémissement de désespoir. Encore un dragon ? Mais qu'est-ce qu'il avait tous avec leur dragon ? Son deuxième fut un écarquillement des yeux, en prenant conscience de ce que cela signifiait exactement.


- Yarrock ?! Quoi ?! Mais il était parti ? Tu n'avais plus aucun contact avec lui ? Mais, comment ça se fait ? Et pourquoi maintenant ? Depuis quand il arrive ?

Ce fut à cet instant qu'elle sentit la joie, et la fierté de son ami. Elle lui offrit un grand sourire et lui sauta au cou. Elle lui envoya une vague de contentement, mêlée de surprise.


- Il a décidé de revenir ? Tu l'as retrouvé ? C'est génial !

Elle inspira profondément et décida de laisser la curiosité l'emporter. Elle s'installa du plus confortablement qu'elle put, attirant à elle la couverture du deuxième lit et l'arrangeant en coussin derrière son dos.

- Raconte. Tout. Pourquoi tu es venu, comment tu nous as sorti de là-bas. Raconte.
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