Je souris doucement en regardant Ellen’ s’en aller avec ma chope. Il y a des choses qui ne changent pas malgré tout. Kaminari avait l’air triste, blessé, je ressentais la noirceur de ses émotions qui détonnait sur le fond de la liesse colorée qui baignait l’endroit. Ces émotions étaient bien différentes de la fureur et de la puissance brute qu’il émanait comme une aura les précédentes fois où nous nous étions vus. Le grand dragon corrompu… Bons dieux comme ça devait être dur à porter ; et en même temps, je brûlais de lui poser un million de questions sur ce qu’il avait vécu.

Je décidai assez vite que cela manquerait un tantinet de courtoisie et qu’il valait mieux le laisser en compagnie d’Ellen’ que l’assaillir de mes questions. Marek restait en retrait de la discussion, et Oesgir lui avait Akkan et la femme rousse… euh… Freya ?
Je m’approchai d’eux tandis qu’ils trinquaient. Moi de toute façon, je n’avais plus de chope, ça me faisait une belle jambe.

-Je vous écoutais discuter, j’intervins finalement, vous êtes tous forgerons ? Maintenant, la guerre finie, qu’allez-vous faire pour gagner votre vie ?

Les entendre parler m’avait fait remarquer que je n’étais sans doute pas le seul à voir le monde changer plus vite que moi. Et des idées commençaient à germer dans mon esprit, qui nécessiteraient l’aide de très nombreux forgerons et qui, pour une fois, ne mènerait pas à la guerre. Enfin, je pense.

Oesgir fût surprit par l’intérêt que lui portait Freya. Cela le mit mal à l’aise. Heureusement, celle-ci porta la discussion sur un sujet qui le passionnait et avec lequel il était à l’aise.
- Je suis effectivement forgeron. Vous aussi ? Il marqua une pause. Je n’ai effectivement pas démarché les villes. Dans tous les cas, la guerre s’est arrêtée brutalement. Les deux camps préparant le conflit comme s’il allait encore continuer, les stocks d’armes étaient encore pleins. Mais je préfère cela à vivre cette ignoble guerre.

Oesgir repensait à l’horreur des combats dans lesquels il avait été projeté. Mais comme le disait ci bien Freya, aujourd’hui était jour de fête.

Laïaga intégra le cercle qu’ils formaient.
- Personnellement je ne sais pas encore. J’aimerais continuer ma voie au sein de l’Equilibirum, ou alors trouver un maitre de forge pouvant m’apprendre les secrets de l’art. Et pourquoi ne pas allier les deux ? Et toi que compte tu faire ?

Kami sentait les regards sur lui surtout quand il avait retiré ce qui devait être une larme. Certains semblaient même mal a l’aise. Comme quoi oui même un dragon peut souffrir et même si les sentiments comme la haine et la vengeance faisaient souvent fureur chez le dragon noir. Il lui arrivait, dans des moments de calme comme celui-ci, de ressentir la détresse. Le sentiment de joie ou de plaisir n’était pas aussi omniprésent qu’il aurait aimé. Cela avait commencé depuis un moment et encore aujourd’hui même à la fête c’était le cas.

Cependant si plusieurs personnes ont remarqué l’état d’âme de la créature magique. Seule l’ancienne reine elfe lui avait adressé la parole de nouveau en se collant carrément contre lui. Dire que quelques semaines voir moi avant la femelle elfe avait affronté la colère du dragon noir et qu’en retour il avait affronté sa « puissance ».

-Ellen… Je ne suis pas un animal blessé que la magie peut soigner. Je ne pourrai pas me défaire de la corruption. Elle fait partie de moi à présent. Vous l’avez vue sans parler de mes flammes éteintes a jamais. Quand aux mauvais moments…

Kami révélait les crocs en retroussant les lèvres avec les yeux grands ouverts. Sa gorge eue plusieurs sons roquent. Comme un petit amusement forcer.

-Eux aussi font parti de moi et rien ne pourra plus les effacer. Même ceux que je disais « ami » m’ont trahi.

Kami fixait Ellen avec le même air que d’habitude. S’il n’avait pas cité de nom. Elle devait très certainement savoir de qui il parlait…. En attendant il restait toujours à la même place mais il avait de plus en plus de mal a rester tranquille.

- Valto, je suis désolé si j'ai pu choqué Manithil, mais je ne pensais pas à mal, mon demi-frère m'énerve un peu voila tout, ce grand échalas évite les relations avec les gens, mais si sur une période courte, on peut le comprendre, dans son cas ça fait près de deux siècles qu'il évite soigneusement le contact humain et je parle même pas de trouver une âme soeur ...

La jeune femme en profita pour venir s'asseoir à côté de Valto qui s'était lui-même assis, rabattant sa queue, la protégeant ainsi des passants maladroits.

- Elle doit vivre un moment extrêmement dur. Si vous avez besoin d'un endroit où vous reposer, vous serez toujours les bienvenus chez nous à Aberon. Nous habitons dans le quartier elfe, nouvellement construit. Nous y avons largement la place pour vous accueillir.
Je ne vous demande pas d'accepter, ni même de vivre avec nous. Je vous dis que notre porte vous sera toujours ouverte.

Valto se tourna vers elle afin de lui répondre :

*Je te remercie... Mais le quartier elfe n'est pas de notre bord, nous préférons vivre à l'écart de toute cette agitation..*

Avec son museau, il montra la fouille grouillant autour d'eux, il continua :

*Elle n'est pas choquée, mais simplement hantée par le passé, de plus elle est plus méfiante que moi. Et croyez-moi quelqu'un de plus méfiant qu'un loup, c'est handicapant.
Il lui faut juste du temps...*

***

-Non en effet… Rien n’y personne ne peut effacer ce que nous avons vécu à présent. Les têtes tomberont de nouveau, c’est sur oui…. Et s’il faut passer par là pour que tout s’arrête…
Tu n’arriveras pas à tout boire alors tu as n’as aucune excuse !

L'elfe sourit rapidement puis parti se noyer dans la foule, essayant d'enfouir son chagrin là où elle avait tant caché. Elle tentait de voir où elle pourrait trouver un baril assez gros pour le dragon, pour qu'il soit rassasié.
Les gens se poussaient, se collant les uns aux autres, elle détestait cette sensation de proximité, le fait de n'être qu'un avec la foule, lui donnait envie de vomir, de plus l'odeur des humains était vraiment insupportable, entre la sueur et l'alcool...
Elle s'extirpa de la masse et aperçut près d'une auberge plusieurs tonneaux. La chasseuse sourit puis s'approcha de l'aubergiste débordé, qui sans faire attention trébucha sur son pied.
Désolée, elle lui tendit la main pour se relever et demanda s'il était possible d'apporter de l'alcool au seul dragon qui était dans la cité.
L'aubergiste ria au nez de la chasseuse prenant la demande pour une blague. Manîthil, ne souriant pas elle montra du doigt la tête noire qui dépassait des habitations, l'aubergiste cessa de sourire et regarda ses tonneaux d'un air désolé. Puis il répondit avec un sourire narquois et une voix grasse

-J'ai b'soin d'ces tonneaux !

Puis il repartit tournant sèchement le dos à la chasseuse, sentant venir la colère, elle attrapa l'homme par l'épaule et le retourna vers elle. Elle s'approcha doucement de son oreille comme pour ne pas attirer l'attention et chuchota avec une colère à peine contenue :

-Écoutes moi bien, tout le monde ici est joyeux, mais ça ne m'empêchera pas de te foutre une raclée si tu ne me donnes pas ce que je veux, c'est clair ?

Elle lui sourit puis l'aubergiste alla bancalement chercher son fils pour l'aider à porter le tonneau.
Pendant que la jeune elfe attendait Valto lui communiqua:

*Tu es vraiment incorrigible, tu le sais ?*

L'elfe souria une fois de plus d'un air farceur.

*Je sais*

L'aubergiste, aidé de son jeune fils, suivirent l'elfe qui revenait près du groupe qui s'était amplifié de 3 personnes, Manîthil regarda le dragon et l'elfe remercia l'aubergiste, pressé de fuir le lieu avec son garçon.

-Tiens Kaminari ! Je ne suis pas revenue les mains vides ! Tu dois être assoiffé !

L'elfe essaya d'enfouir son chagrin et fit passer son air triste, elle pensa :

Pour une fois que tu a des gens "respectables" autour de toi, essayes de te tenir...

Elle leva sa chope vers le Volant, d'un air compatissant, elle déversa un peu de compassion quand à son état.

*Au futur !*

L'alcool s'engouffra dans sa gorge comme un feu brûlant et revigorant, laissant ses pommettes légèrement rosées, elle revint tranquillement près de Valto qui suivait la conversation depuis le début, elle essaye de rattraper son retard et commença par se présenter :

-Enchantée de vous connaître tous ! Je me nomme Manîthil.

L'elfe continua de boire, tout en suivant les conversations autour d'elle.